SYNTHÈSE-L'Ukraine soutient "l'essence" de l'accord avec la Russie, des sujets sensibles demeurent
information fournie par Reuters 25/11/2025 à 22:52

(Actualisé avec rencontre à venir entre Yemak et Driscoll)

par Idrees Ali et Tom Balmforth

L'Ukraine a fait savoir mardi qu'elle soutenait le cadre de l'accord de paix avec la Russie proposé par les Etats-Unis, ajoutant toutefois que des questions sensibles devaient encore être réglées lors d'une rencontre entre le président Volodimir Zelensky et son homologue américain Donald Trump.

Ces déclarations suggèrent que la nouvelle offensive diplomatique de l'administration Trump visant à mettre fin à la guerre pourrait porter ses fruits, mais le rejet par Moscou de tout accord qui s'éloignerait trop de ses propres objectifs menace de faire échouer le processus.

Pour finaliser le plan de paix, le président Donald Trump a annoncé mardi avoir chargé l'émissaire spécial américain Steve Witkoff de rencontrer Vladimir Poutine à Moscou.

"Il ne reste plus que quelques points de désaccord", a écrit Donald Trump sur son réseau Truth Social, ajoutant que secrétaire d'État américain à l'Armée Dan Driscoll rencontrera la partie ukrainienne.

Le chef de cabinet de Volodimir Zelensky, Andriy Yemak, a déclaré s'être entretenu avec Daniel Driscoll et a annoncé son intention de le rencontrer cette semaine à Kyiv.

"Merci pour votre objectivité et votre esprit constructif", a-t-il écrit sur Telegram.

"Comme indiqué par le président Trump, nous attendons (le secrétaire d'Etat à l'armée) à Kyiv cette semaine, et nous sommes prêts à continuer de travailler aussi vite que possible pour finaliser les étapes nécessaires pour mettre fin au bain de sang."

Le secrétaire d'État américain à l'Armée Dan Driscoll, selon l'un de ses porte-parole, s'est entretenu avec des responsables russes à Abou Dhabi lundi soir et mardi dans le cadre des négociations relatives au plan de paix.

Ces entretiens font suite à des discussions à Genève, dimanche, à l'issue desquelles Washington et Kyiv ont dit avoir élaboré une "nouvelle version, améliorée, du plan de paix", sans plus de précisions.

Les responsables américains et ukrainiens cherchent à s'entendre sur des sujets particulièrement sensibles du plan de Donald Trump, Kyiv craignant de devoir accepter un accord en grande partie dicté par le Kremlin qui se traduirait notamment par des concessions territoriales.

"L'Ukraine, après Genève, soutient l'essence de ce cadre, et certaines des questions les plus sensibles restent des sujets de discussion entre les présidents", a déclaré un responsable ukrainien.

Lors d'une réunion en visioconférence, mardi après-midi, de la "coalition des volontaires", une alliance internationale emmenée par le Royaume-Uni et la France pour soutenir l'Ukraine, Volodimir Zelensky s'est dit prêt à poursuivre les discussions sur l'accord soutenu par les États-Unis et à discuter des points sensibles de celui-ci avec Donald Trump lors de pourparlers qui devraient, selon lui, inclure les alliés européens.

KYIV ÉVOQUE UNE VISITE DE ZELENSKY AUX ETATS-UNIS

Selon une retranscription de son intervention obtenue par Reuters, il a aussi appelé les dirigeants européens à élaborer un cadre pour le déploiement d'une "force de réassurance" en Ukraine et à continuer de soutenir Kyiv tant que Moscou ne montrerait aucune volonté de mettre fin à la guerre.

Le secrétaire d'Etat américain Marco Rubio a participé à cette réunion de la "coalition des volontaires", une première, a souligné l'Elysée.

Dans la foulée, Donald Trump a déclaré qu'un accord était proche entre l'Ukraine et la Russie.

Le chef de la sécurité nationale ukrainienne avait auparavant indiqué que Volodimir Zelensky pourrait se rendre aux États-Unis dans les prochains jours pour finaliser un accord avec Donald Trump, ce que Washington n'a pas confirmé.

La porte-parole de la Maison blanche, Karoline Leavitt, avait pour sa part fait état sur X "d'énormes progrès vers un accord de paix", ajoutant qu'il restait "quelques détails délicats, mais pas insurmontables, à régler".

La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a appelé à continuer de mettre la pression sur la Russie.

"Comme la pression reste le seul langage auquel la Russie réagit, nous continuerons de l'intensifier jusqu'à ce qu'il y ait une réelle volonté de s'engager sur une voie crédible de paix", a-t-elle déclaré sur X.

Sur le plan militaire, la Russie a lancé mardi une attaque de drones et de missiles contre Kyiv, tuant sept personnes et en blessant 21 autres dans la capitale ukrainienne, selon les autorités.

Un sommet organisé à la hâte entre Donald Trump et le président russe Vladimir Poutine en Alaska au mois d'août a suscité des inquiétudes à Kyiv et dans les capitales européennes quant à la possibilité que les Etats-Unis cèdent à de nombreuses exigences russes, même si le locataire de la Maison blanche a ensuite exercé une pression accrue sur Moscou.

MOSCOU DÉFEND L'ACCORD TRUMP-POUTINE

La dernière proposition de paix américaine en date, un plan en 28 points dévoilé la semaine dernière, a cependant ravivé les craintes, du côté de Kyiv comme de ses alliés européens, que Donald Trump pousse l'Ukraine à signer un accord de paix trop favorable à Moscou.

Ce plan exigerait de l'Ukraine qu'elle cède davantage de territoires, qu'elle accepte de limiter ses forces armées et qu'elle renonce à ses ambitions d'adhésion à l'Otan, des conditions que Kyiv rejette de longue date en faisant valoir qu'elles équivaudraient à une capitulation.

Volodimir Zelensky, qui est plus vulnérable que jamais depuis le début de la guerre à la suite d'un scandale de corruption, avait jugé lundi que de "nombreux éléments corrects" avaient été incorporés dans la nouvelle mouture élaborée dimanche à Genève.

Le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, a pour sa part déclaré mardi qu'un plan de paix amendé devrait refléter "l'esprit et la lettre" des accords conclus entre Vladimir Poutine et Donald Trump lors du sommet entre les deux hommes organisé en août.

Ce plan excluait que Kyiv adhère à l'Otan, plafonnait l'armée ukrainienne à 600.000 hommes et prévoyait notamment une cession intégrale du Donbass à la Russie sous la forme d'une zone démilitarisée.

"PAS DE VOLONTÉ RUSSE" DE CESSEZ-LE-FEU, DIT MACRON

Après la réunion de la "coalition des volontaires", le président français Emmanuel Macron a appelé à "continuer de mettre la pression sur la Russie pour qu'elle veuille négocier", à maintenir le soutien à l'Ukraine et à poursuivre les discussions de paix. Dans la matinée, il avait une nouvelle fois rejeté toute "capitulation" de Kyiv.

"Il n'y a aujourd'hui clairement pas de volonté russe d'avoir un cessez-le-feu. Et les propos qui ont été tenus par le ministre des Affaires étrangères russe (...) l'ont montré. Il a dit qu'il n'y avait pas de volonté de discuter sur le plan dit amendé qui ressortait des discussions de Genève", a-t-il déclaré.

Evoquant les actifs gelés russes, Emmanuel Macron a annoncé que l'Union européenne finaliserait dans les prochains jours "une solution qui permette de sécuriser des financements (et) donne de la visibilité" à l'Ukraine.

Il a ajouté qu'un groupe de travail piloté par la France et la Grande-Bretagne serait mis en place mercredi, avec également une implication de la Turquie et des États-Unis, pour permettre de finaliser dans les prochains jours les contributions de chacun aux garanties de sécurité apportées à l'Ukraine dans la perspective d'un accord de paix.

Une réunion virtuelle des ministres des Affaires étrangères de l'Union européenne est par ailleurs prévue mercredi.

Des avions de chasse roumains et allemands de l'Otan ont en outre été déployés mardi près de la frontière roumaine avec l'Ukraine en réponse à une incursion de drones dans l'espace aérien roumain que Bucarest a qualifiée de provocation russe.

(Reportage Idrees Ali, Phil Stewart, Devika Nair, Tom Balmforth, Pavel Polityuk, Alessandro Parodi, Michel Rose, Luiza Ilie et Sergiy Karazy, rédigé par Matthias Williams, version française Benjamin Mallet et Zhifan Liu, édité par Sophie Louet)