SYNTHÈSE-Etats-Unis et Russie discutent à Abou Dhabi, Moscou pilonne Kyiv
information fournie par Reuters 25/11/2025 à 13:09

par Idrees Ali et Pavel Polityuk

Le secrétaire d'État américain à l'Armée Dan Driscoll s'est entretenu avec des responsables russes à Abou Dhabi lundi soir et mardi matin dans le cadre d'une nouvelle offensive diplomatique de l'administration Trump visant à mettre fin à la guerre en Ukraine, a déclaré un porte-parole du dirigeant américain.

Ces discussions interviennent alors que les responsables américains et ukrainiens cherchent par ailleurs à s'entendre sur des sujets sensibles, Kyiv craignant de devoir accepter un accord en grande partie dicté par le Kremlin.

"Les discussions se déroulent bien et nous restons optimistes. Le secrétaire Driscoll se coordonne étroitement avec la Maison blanche (...) à mesure que ces pourparlers avancent", a déclaré le lieutenant-colonel Jeff Tolbert, porte-parole de Dan Driscoll.

La nature exacte des discussions à Abou Dhabi n'a pas été précisée dans l'immédiat et on ignore la composition de la délégation russe.

Le responsable américain a précisé que Dan Driscoll, qui s'est imposé comme l'interlocuteur privilégié de la diplomatie américaine pour l'Ukraine, devrait également rencontrer des responsables ukrainiens lors de son séjour à Abou Dhabi.

Cette nouvelle étape fait suite à des discussions à Genève, dimanche, à l'issue desquelles les Etats-Unis et l'Ukraine ont dit avoir élaboré une "nouvelle version, améliorée, du plan de paix", sans plus de précisions.

"À la suite des réunions de Genève, nous entrevoyons de nombreuses perspectives qui peuvent concrétiser le chemin vers la paix. Il y a des résultats tangibles, et il reste encore beaucoup à faire", a déclaré mardi le président ukrainien Volodimir Zelensky sur X après un entretien téléphonique avec le Premier ministre britannique Keir Starmer.

MOSCOU DÉFEND L'ACCORD TRUMP-POUTINE

Le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, a pour sa part déclaré mardi qu'un plan de paix amendé devrait refléter "l'esprit et la lettre" des accords conclus entre le président Vladimir Poutine et son homologue américain Donald Trump lors d'un sommet entre les deux hommes organisé en août, en Alaska.

Ce plan excluait que Kyiv adhère à l'Otan, plafonnait l'armée ukrainienne à 600.000 hommes et prévoyait notamment une cession intégrale du Donbass à la Russie sous la forme d'une zone démilitarisée.

Le groupement de la "coalition des volontaires", une alliance internationale emmenée par le Royaume-Uni et la France pour soutenir l'Ukraine, doit tenir une visioconférence dans l'après-midi. Une réunion virtuelle des ministres des Affaires étrangères de l'Union européenne est également prévue mercredi.

Par ailleurs, le chef de la sécurité nationale ukrainienne a indiqué que Volodimir Zelensky pourrait se rendre aux États-Unis dans les prochains jours pour finaliser un accord avec Donald Trump.

Sur le plan militaire, la Russie a lancé dans la nuit de lundi à mardi une attaque de drones contre la capitale ukrainienne, Kyiv, provoquant des incendies dans deux immeubles résidentiels et faisant au moins six morts et 13 blessés, selon les autorités.

Le plan en 28 points mis au point par l'administration Trump et présenté comme une proposition non définitive, prévoit que l'Ukraine cède des territoires, accepte de limiter ses forces armées et renonce à ses ambitions d'adhésion à l'Otan. Il a suscité des craintes, du côté de Kyiv comme de ses alliés européens, quant à la volonté de Donald Trump de pousser l'Ukraine à signer un accord de paix trop favorable à Moscou.

Volodimir Zelensky a déclaré lundi que Kyiv allait continuer à travailler avec ses partenaires à l'élaboration d'un compromis à partir des propositions américaines en vue d'un accord de paix avec la Russie, afin que ces dernières renforcent l'Ukraine au lieu de l'affaiblir.

INCURSION DE DRONES EN ROUMANIE

Dans son allocution nocturne, il a jugé que de "nombreux éléments corrects" avaient été incorporés dans la nouvelle mouture élaborée dimanche à Genève et précisé qu'il discuterait des points les plus sensibles avec Donald Trump.

Volodimir Zelensky a cependant estimé que la concrétisation d'un accord de paix final serait difficile, tandis que le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, insistait sur le fait que le plan de Donald Trump pourrait constituer "une très bonne base de négociations".

Le président français Emmanuel Macron a pour sa part une nouvelle fois rejeté mardi matin toute "capitulation" de Kyiv.

"Nous voulons la paix mais nous ne voulons pas une paix qui soit une capitulation, qui mette l'Ukraine dans une situation impossible et qui donne la possibilité à la Russie de continuer d'aller plus loin et de mettre notre sécurité à tous en danger", a-t-il expliqué sur RTL.

"Le plan qui a été proposé par les États-Unis est une démarche qui va dans le bon sens : la paix. Ensuite, il y a des éléments qui méritaient d'être discutés et améliorés. Personne ne peut dire aux Ukrainiens quelles concessions territoriales ils sont prêts à faire", a ajouté Emmanuel Macron.

Des avions de chasse roumains et allemands de l'Otan ont été déployés mardi près de la frontière roumaine avec l'Ukraine en réponse à une incursion de drones dans l'espace aérien roumain que Bucarest a qualifiée de provocation russe.

Le ministre roumain de la Défense, Ionut Mosteanu, a déclaré que les pilotes de l'Otan avaient failli abattre un drone, mais qu'ils s'étaient abstenus par crainte de provoquer des dégâts au sol.

Les tensions se sont accrues ces derniers mois le long du flanc oriental de l'Europe après que des drones russes présumés ont violé l'espace aérien de plusieurs États membres de l'Otan.

(Reportage Idrees Ali, Phil Stewart, Devika Nair, Pavel Polityuk, Alessandro Parodi, Michel Rose, Luiza Ilie et Sergiy Karazy, rédigé par Matthias Williams, version française Benjamin Mallet, édité par Sophie Louet)