Roumanie/Présidentielle-Le candidat de l'extrême droite en tête du premier tour information fournie par Reuters 05/05/2025 à 02:49
par Luiza Ilie et Elizaveta Gladun
Le candidat de l'extrême droite George Simion est arrivé dimanche en tête du premier tour de l'élection présidentielle en Roumanie, selon les résultats quasi-définitifs, un scrutin considéré comme un révélateur de la montée du nationalisme à travers l'Union européenne.
Après dépouillement de plus de 99,5% des bureaux de vote, George Simion était crédité de 40,6% des suffrages devant le maire centriste indépendant de la capitale Bucarest, Nicusor Dan, avec environ 21%.
Les deux candidats seront opposés au second tour le 18 mai.
Une victoire de George Simion, 38 ans, chef de file de l'Alliance pour l'unification des Roumains (AUR), pourrait entraîner un isolement du pays, freiner les investissements privés et affaiblir le flanc oriental de l'Otan alors que la guerre en Ukraine est entrée dans sa quatrième année, ont déclaré des observateurs politiques.
Elle serait également à même de renforcer la cohorte de dirigeants eurosceptiques au sein de l'UE, aux côtés des Premiers ministres hongrois et slovaque, au moment même où le bloc communautaire veut afficher un front uni face au président américain Donald Trump, autant du point de vue sécuritaire que commercial.
"Ce n'est pas seulement une victoire électorale, c'est une victoire de la dignité roumaine. C'est la victoire de ceux qui n'ont pas perdu espoir, de ceux qui croient encore en la Roumanie, un pays libre, respecté et souverain", a déclaré George Simion après la publication des sondages de sortie des urnes.
Le candidat de l'extrême droite a profité d'une vague de mécontentement au sein de la population à l'égard des politiciens des partis traditionnels.
Il a exprimé son opposition à l'aide militaire à l'Ukraine, critiqué les dirigeants de l'UE et s'est dit aligné sur le mouvement "Make America Great Again" de Donald Trump.
George Simion a de nouveau revendiqué cette "filiation" dans des commentaires effectués dimanche auprès de médias étrangers peu après la fermeture des bureaux de vote. "Nous sommes un parti trumpiste (...) qui fera de la Roumanie un partenaire fort au sein de l'Otan et un allié étroit des Etats-Unis", a-t-il dit.
CONVERGENCES
Nicusor Dan, qui a fait campagne principalement sur la lutte contre la corruption, a devancé dans les suffrages l'ancien sénateur Crin Antonescu, candidat centriste soutenu par les trois partis de la coalition gouvernementale pro-occidentale.
Il a reçu un soutien notable de la part des électeurs expatriés, lesquels ont pris pour habitude ces dernières années de soutenir les candidats anti-système. D'après les résultats après dépouillement de 96% des bulletins, les Roumains de l'étranger ont voté à 60% pour George Simion, 26% pour Nicusor Dan et 7% pour Crin Antonescu.
"Les yeux tournés vers l'Occident. Je pense que c'est de cela qu'il doit s'agir. De garder la Roumanie dans la direction de l'Ouest", a déclaré dimanche soir Nicusor Dan à des journalistes.
Des observateurs disent penser que Nicusor Dan éprouvera des difficultés à battre George Simion au second tour, citant les tensions entre le maire de Bucarest et les partis traditionnels qui devraient dissuader les électeurs de ceux-ci à lui apporter leur soutien.
Il y a, chez les libéraux et les sociaux-démocrates au pouvoir, davantage de convergences avec George Simion qu'avec Nicusor Dan, estiment les observateurs.
Cette élection s'est tenue cinq mois après un scrutin finalement annulé en décembre dernier par la Cour constitutionnelle après la victoire d'un candidat pro-russe, Calin Georgescu.
La commission électorale de Roumanie a en outre rejeté en mars une nouvelle candidature de Calin Georgescu, dont George Simion est présenté comme l'héritier, en raison d'une campagne entachée de soupçons de manipulations russes.
Cette décision a suscité des critiques de la part de plusieurs membres de l'administration américaine, dont le vice-président J.D. Vance, qui y a vu l'illustration d'une liberté d'expression selon lui bâillonnée en Europe.
Le président roumain a un rôle semi-exécutif incluant le commandement des forces armées et la présidence du conseil de sécurité, qui décide de l'aide militaire. Il peut aussi opposer son veto à des votes importants de l'UE et nommer le Premier ministre, les juges, les procureurs et les responsables des services secrets.
(Luiza Ilie et Elizaveta Gladun; version française Camille Raynaud et Benjamin Mallet, édité par Jean Terzian)