Retraites, économies: coup d'envoi de l'inflammable budget de la Sécu à l'Assemblée
information fournie par AFP 04/11/2025 à 19:52

La ministre de la Santé Stéphanie Rist s'exprime à l'Assemblée nationale le 29 octobre 2025 à Paris ( AFP / Thibaud MORITZ )

"Nouvelle étape du marathon budgétaire à l'Assemblée: les députés ont entamé mardi dans l'hémicycle l'examen du budget de la Sécurité sociale, qui contient la suspension de la réforme des retraites mais aussi plusieurs mesures explosives, et dont l'adoption la semaine prochaine est encore très incertaine.

Franchises médicales, durée des arrêts de travail, cotisation sur les tickets-restaurants... Les discussions sur le Projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) s'annoncent inflammables.

Le gouvernement a prévu des économies massives pour réduire le déficit de la Sécu à 17,5 milliards en 2026, contre 23 cette année.

"Sans maîtrise, le système finirait par se consumer de lui-même", a déclaré la ministre de la Santé Stéphanie Rist, assumant un "effort collectif" en ouverture des débats en présence du Premier ministre Sébastien Lecornu.

"Vous tentez de nous faire avaler un ensemble d'horreurs camouflé par vos faux compromis", a rétorqué Elise Leboucher (LFI), défendant sans succès une motion de rejet, largement repoussée (61 voix contre 326).

Le Premier ministre Sébastien Lecornu (C) à l'Assemblée nationale lors de l'examen du projet de budget, le 31 octobre 2025 à Paris ( AFP / ALAIN JOCARD )

Les débats sur les articles sont programmés jusqu'à dimanche soir, avant un vote sur l'ensemble du texte mercredi, après deux journées de relâche en raison de l'Armistice du 11-Novembre.

Mais selon plusieurs sources parlementaires et gouvernementale, la discussion sur la suspension de la réforme des retraites, condition de la non-censure du PS, pourrait être renvoyée à mercredi, juste avant le vote, pour permettre au maximum de députés d'être présents.

Ce PLFSS sera sans aucun doute remanié.

Sébastien Lecornu a lui-même déclaré être prêt à renoncer au gel des pensions de retraite, casus belli pour de nombreux groupes, et des minimas sociaux. Mais tous les compromis ne sont pas sur la table, a-t-il prévenu devant les députés de son parti Renaissance : "on ne va pas mettre l'économie à terre".

En commission, la suspension de la réforme des retraites a été approuvée par le RN et les socialistes. Les députés Renaissance se sont abstenus. Les Républicains et Horizons entendent au contraire maintenir la réforme.

Et des incertitudes planent sur son financement. Elle coûterait au moins 100 millions d'euros en 2026 et 1,4 milliard en 2027. La commission a largement rejeté les propositions du gouvernement: une surtaxe sur les complémentaires santé, et une sous-indexation des pensions de retraite par rapport à l'inflation.

- "Sort du gouvernement" -

Pour remplir les caisses, le PS propose une hausse de la CSG sur les revenus du capital. Une version adoptée en commission tablait sur 2,7 milliards d'euros. Un mécanisme auquel Sébastien Lecornu a semblé ouvert, comme certains députés Renaissance ou MoDem.

"J'y suis opposé", a lancé mardi le rapporteur général du texte, Thibault Bazin (LR), estimant que la mesure pèsera également sur "les produits d'épargne de millions de Français: plans d'épargne logement, plans d'épargne populaire et j'en passe".

Cette mesure sera peut-être l'une des clés pour faire adopter la partie recettes du texte. Les parlementaires l'avaient rejetée en commission.

S'ils la rejettent à nouveau dans l'hémicycle (peut-être jeudi ou vendredi selon des députés) c'est tout l'examen qui s'interromprait, sans avoir abordé la suspension de la réforme des retraites.

"C'est sur le PLFSS que le sort du gouvernement se joue dans les jours qui viennent", a résumé à l'AFP le socialiste Jérôme Guedj.

Autre point chaud des débats: le doublement annoncé des franchises médicales (reste à charge des patients sur des consultations et médicaments), qui rapporterait 2,3 milliards d'euros. La mesure ne figure pas dans le texte et reste à la main du gouvernement par décret, et hérisse à droite comme à gauche.

- Vote le 12 novembre -

Les députés devront se hâter: près de 2.500 amendements ont été déposés (une partie sera irrecevable).

Si l'examen n'est pas terminé le 12 novembre, le texte sera quoi qu'il arrive transmis au Sénat en raison des délais constitutionnels.

Si le vote a bien lieu, son adoption dépendra en grande partie des abstentions.

Celle des écologistes et des communistes, qui réclament notamment que les carrières longues soient comprises dans la suspension de la réforme des retraites via un amendement gouvernemental.

Celle du PS, qui a pour l'instant exclu de voter pour.

Et celle du RN, Marine Le Pen n'ayant pas exclu la possibilité d'une abstention - tout comme celle d'un vote contre.