Nucléaire: Trump répète vouloir mener des essais, sans clarifier ses intentions exactes information fournie par AFP 31/10/2025 à 18:54
Donald Trump a réitéré vendredi son intention de reprendre les essais d'armes nucléaires, sans toutefois lever l'ambiguïté sur ce qu'il entendait exactement par cette annonce qui a suscité inquiétude et protestations dans le monde entier.
"Nous allons procéder à des tests, oui, et d'autres pays le font aussi. S'ils le font, nous le ferons aussi", a déclaré le président américain aux journalistes à bord de l'avion présidentiel Air Force One, en réponse à une question de l'AFP.
Interrogé pour savoir s'il parlait d'essais d'armes capables de porter une tête nucléaire ou bien de la détonation même d'une charge nucléaire, il a refusé de répondre, disant simplement maîtriser "ce que nous faisons, où nous le faisons".
La veille, il avait tenu des propos similaires, qui avaient fait l'effet d'un choc dans le monde. "En raison des programmes d'essais menés par d'autres pays, j'ai demandé au ministère (de la Défense) de commencer à tester nos armes nucléaires sur un pied d'égalité" avec la Russie et la Chine, avait-il annoncé.
Cette décision a suscité de vives protestations. Dernier à réagir, l'Iran, accusé par les Occidentaux et Israël de développer l'arme atomique malgré ses démentis, a jugé que les Etats-Unis faisaient porter "le risque de prolifération le plus dangereux au monde".
C'est "une mesure régressive et irresponsable" et une "menace grave pour la paix et la sécurité internationales", a déclaré sur X le chef de la diplomatie iranienne Abbas Araghchi. "Le monde doit s'unir pour demander des comptes aux États-Unis".
Des survivants japonais des bombes d'Hiroshima et Nagasaki en août 1945, uniques occurrences de l'usage de l'arme suprême et symbole depuis du tabou militaire absolu, se sont joints aux protestations.
- "Dissuasion crédible" -
Les propos de Donald Trump vont "à l'encontre des efforts déployés par les nations du monde entier pour construire un monde pacifique sans arme nucléaire et est absolument inacceptable", a ainsi dénoncé l'organisation Nihon Hidankyo dans une lettre à l'ambassade des Etats-Unis au Japon.
A Kuala Lumpur, où il venait de rencontrer son homologue chinois, le ministre américain de la Défense, Pete Hegseth, a justifié vendredi la décision par la nécessité d'avoir une "dissuasion nucléaire crédible".
"Reprendre les essais est une manière assez responsable, très responsable de le faire", a-t-il estimé.
Mais lui non plus n'a pas clarifié de quel type d'essais l'on parlait. "Nous travaillerions avec le ministère de l'Énergie", a-t-il simplement ajouté.
Aucune puissance n'a procédé officiellement à un essai nucléaire depuis trois décennies - à l'exception de la Corée du Nord (à six reprises entre 2006 et 2017). Mais de nombreux pays, Etats-Unis en tête, effectuent régulièrement des tests de vecteurs - missiles, sous-marins, avions de chasse ou autres.
Selon l'Institut international de recherche sur la paix de Stockholm (Sipri), la Russie dispose de 4.309 ogives nucléaires déployées ou stockées, contre 3.700 pour les Etats-Unis et 600 pour les Chinois. Ces chiffres excluent les ogives destinées à être démantelées.
- "Escalade imprudente" -
Dans un contexte géopolitique incandescent, et alors que la rhétorique nucléaire revient périodiquement au premier plan depuis l'invasion de l'Ukraine par la Russie en février 2022, Washington verse de l'huile sur le feu.
Ces essais "ne doivent jamais être permis", a insisté jeudi Farhan Haq, porte-parole adjoint du secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres. "Nous ne devons pas oublier l'héritage désastreux des plus de 2.000 essais nucléaires menés ces 80 dernières années".
Washington est signataire du Traité d'interdiction complète des essais nucléaires (Tice). Faire exploser des ogives en constituerait une violation flagrante.
La décision de Donald Trump répond aux manoeuvres de Moscou: cette semaine, le président russe, Vladimir Poutine, s'est félicité de l'essai final réussi d'un missile de croisière d'"une portée illimitée", puis de celui d'un drone sous-marin.
Mais le Kremlin a précisé jeudi qu'il s'agissait d'essais d'armes capables de porter une charge nucléaire et non de bombes elles-mêmes, disant espérer "que le président Trump en a été informé correctement".
Pékin, pour sa part, a émis le souhait que Washington respecte "sérieusement" ses obligations internationales et prenne "des mesures concrètes pour préserver le système mondial de désarmement et de non-prolifération".
La Campagne internationale pour l'abolition des armes nucléaires (Ican), prix Nobel de la paix en 2017, a jugé les intentions américaines "pas claires" et dénoncé "une escalade inutile et imprudente de la menace nucléaire".