Mines antipersonnel : des experts s'inquiètent de la volonté de plusieurs pays de l'Otan de se retirer des traités
information fournie par Boursorama avec Media Services 08/04/2025 à 09:59

"85% des victimes d'engins explosifs sont des civils, dont plus de la moitié sont des enfants", selon l'ONU.

Un démineur à Arica, au Chili. (illustration) ( AFP / PATRICIO BANDA )

Ce sont des "décennies d'"efforts mondiaux" qui sont menacés par la volonté de cinq pays de l'Otan de se retirer du traité interdisant l'utilisation des mines antipersonnel, déplorent les experts, avant une réunion cette semaine à Genève visant à renforcer la lutte contre ces engins explosifs.

Plusieurs organisations ont déploré ces dernières semaines ces annonces, dont le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) qui les a qualifiées de "dangereux recul pour la protection des civils dans les conflits armés".

"Les États qui se retirent de ces traités risquent d'éroder des protections vitales et menacent des décennies d'efforts mondiaux visant à éradiquer ces armes inhumaines", a averti le CICR.

Le 1er avril, la Finlande a annoncé vouloir se retirer du traité de la convention internationale interdisant les mines antipersonnel, dit d'Ottawa. Quelques semaines avant, quatre autres pays de l'Otan situés sur le flanc oriental de l'alliance militaire - la Pologne, la Lituanie, la Lettonie et l'Estonie - ont aussi fait un pas vers une sortie du traité, tous invoquant également la menace croissante que représente la Russie.

Ces annonces vont peser sur la réunion de trois jours qui débute mercredi à Genève, sous l'égide du Service d'action contre les mines de l'ONU (Unmas) et du Centre international de déminage humanitaire de Genève (CIDHG). Cette réunion va se dérouler "dans un environnement compliqué" , a commenté le directeur du CIDHG, Tobias Privitelli, en conférence de presse. Pour lui, les progrès réalisés ces dernières décennies pour débarrasser le monde des mines antipersonnel sont menacés.

60 pays touchés par le fléau des mines

De l'Ukraine à la Birmanie, en passant par le Soudan et la Syrie, près 60 pays et territoires sont contaminés par des restes explosifs de guerre (REG), des engins explosifs improvisés ou des mines terrestres, a rappelé pour sa part James Staples, un des responsables de l'Unmas.

Les coupes dans les budgets d'aide étrangère des États-Unis viennent s'ajouter aux vents contraires auxquels les deux organisations sont confrontées. Bien que les États-Unis ne fassent pas partie des 160 signataires du traité d'Ottawa, ils étaient le premier bailleur de fonds dans la lutte contre les mines. Washington fournissait plus de 300 millions de dollars par an, soit environ 40% de l'aide internationale, selon le rapport 2024 de l'Observatoire des mines.

Le financement américain "a sans aucun doute sauvé des vies et fait la différence pour des centaines de milliers de personnes", a assuré James Staples. Bien que des exemptions temporaires aient été accordées à certains programmes, la Campagne internationale pour l'interdiction des mines terrestres (ICBL) a mis en garde contre l'incertitude du financement à long terme.

Selon l'Observatoire des mines, le nombre de personnes tuées ou blessées par les mines et les REG est passé d'environ 25.000 en 1997 à moins de 5.800 en 2023 , et des millions de mines ont été détruites dans le monde.

En incluant d'autres types de REG, comme les bombes à sous-munitions et les engins explosifs improvisés, le nombre de victimes s'élevait à environ 15.000 en 2023, selon James Staples.

"85% des victimes d'engins explosifs sont des civils, dont plus de la moitié sont des enfants" , a-t-il ajouté, soulignant que le danger persiste bien souvent pendant des décennies après les conflits.