Mayo College, l'école des Maharajas devenue le creuset de l'élite indienne information fournie par AFP 21/09/2025 à 10:33
Franchir le portail du prestigieux Mayo College, à Ajmer, dans l'Etat du Rajasthan, dans le nord-ouest de l'Inde, c'est plonger dans 150 ans d'une histoire qui a vu les fils de l'élite d'aujourd'hui remplacer ceux des maharajas.
"J'ai un immense respect pour cet héritage mais je souhaite que notre établissement soit tourné vers l'avenir et adapté à un monde en pleine mutation", souligne Saurav Sinha, son principal.
En 1875, c'est installé dans un palanquin et accompagné de 300 domestiques, que le premier élève de l'établissement, le fils du maharajah d'Alwar, y a fait son entrée.
L'école, qui fête cette année son 150ème anniversaire, a alors été créée par le vice-roi pour faciliter les bonnes relations entre les dirigeants locaux indiens et le colonisateur britanniques.
Réplique des meilleurs pensionnats anglais, elle a vite été désignée comme l'Eton de l'Orient.
Il existe une dizaine d'écoles aussi prestigieuses à travers le pays le plus peuplé de la planète, qui compte près d'1,5 million établissements scolaires, pour beaucoup sous-équipés.
Les descendants de maharajas ne sont plus qu'une poignée sur les 850 élèves, âgés de 9 à 18 ans, de Mayo College.
Fils de ministres, de grands patrons, de diplomates ou de hauts-gradés de l'armée sont désormais légion.
Y entrer est réservé aux plus fortunés. Pas mois de 10.000 euros de frais de scolarité chaque année, une fortune dans un pays où le produit intérieur brut par habitant est de 2.000 euros par an.
A la tête d'une société d'événementiel à Jodphur, au Rajashtan, Abhishek Singh Tak n'a pourtant pas hésité.
"C'était une évidence pour moi d'envoyer mes deux fils étudier ici" car "il prépare à tout", explique cet ancien élève de Mayo.
- Eveiller la curiosité -
Depuis le majestueux bâtiment principal, construit avec le même marbre que celui du célébrissime Taj Mahal, il assure que l'école lui a "tout apporté".
Ses deux fils, Nirbhay, 10 ans, et Viren, 17 ans, considèrent ce cocon luxueux, où ils résident neuf mois par an, comme leur maison.
Le plus jeune rêve d'Oxford, au Royaume-Uni, l'aîné de l'université de New Delhi ou de Sciences-Po en France, en espérant devenir diplomate.
Si la discipline militaire qui a fait sa réputation reste de rigueur, l'accent est mis sur le bien-être et le développement de la confiance des élèves.
Avec ses 76 hectares, ses arbres majestueux et ses pelouses étonnamment vertes dans cet Etat désertique, le cadre est idyllique. Les écoliers, levés à 06H00 et couchés à 21H30 ont toutefois peu de répit.
"Nous sommes tellement occupés que je n'ai pas le temps de penser à ma famille", s'amuse Arrin, 11 ans, suscitant le rire complice de ses camarades.
Un an après avoir quitté Bombay pour rejoindre le Mayo, il semble épanoui au milieu de ses congénères. "Ce qui me manque le plus, c'est la cuisine", affirme-t-il, droit comme un i, les mains dans le dos comme exigé.
Rajesh Soni, directeur du primaire, reconnaît que l'éloignement familial rend souvent les débuts un plus difficiles pour les plus jeunes. Alors pour faciliter leur adaptation, des psychologues ont été recrutés et l'équipe éducative féminisée.
"La priorité est d'en faire un endroit où règne le bonheur pour qu'ils puissent tout explorer et s'accomplir", dit-il.
- "Autonomie" -
"Mon fils est scolarisé ici depuis plus d'un an. Il a acquis une énorme confiance en lui et est devenu très indépendant et autonome", se félicite Daakshi Bhide, 38 ans, professeure d'anglais.
Avant le début des cours, les élèves, en majorité de confession hindoue, se réunissent dans leur uniforme impeccable bleu marine sur chemise blanche, pour réciter des prières et évoquer l'actualité.
Puis, c'est l'heure des cours, en anglais, de sciences, langues étrangères, littérature ou relations internationales, savoir-vivre, art et musique.
L'après-midi, sport obligatoire, à choisir parmi vingtaine de disciplines: du polo au golf, en passant par le tir ou le tennis. Depuis quelques années, le foot a détrôné le cricket, roi en Inde.
Les installations sont d'un luxe inouï - piscine olympique, golf de neuf trous, écuries avec une soixantaine de chevaux.
C'est pour devenir footballeur professionnel, qu'Arrin, fils d'une médecin et d'un homme d'affaires, a rejoint Mayo.
Mais l'immense majorité des élèves envisagent plutôt des études à l'université pour la haute fonction publique ou les affaires.
Si un bon tiers des inscrits songe étudier à l'étranger, la plupart veulent rester en Inde, à l'image d'Advaya Sidharth Bhatia, 17 ans, qui rêve de fonder sa société pour "un jour, aider son pays".