Manifestations en Iran: la justice fera preuve de "fermeté" en cas de déstabilisation information fournie par AFP 31/12/2025 à 12:18
Le pouvoir judiciaire iranien fera preuve de "fermeté" si la récente mobilisation contre la vie chère dans le pays est instrumentalisée à des fins de "déstabilisation", a mis en garde mercredi le procureur général de la République islamique.
"Du point de vue judiciaire, les manifestations pacifiques pour la défense des moyens de subsistance (...) sont compréhensibles", a déclaré Mohammad Movahedi-Azad, cité par la télévision d'Etat, après trois jours de protestations de commerçants à Téhéran, auxquelles des étudiants se sont joints à travers le pays.
"Toute tentative visant à transformer les manifestations économiques en un outil d'insécurité, de destruction des biens publics ou de mise en oeuvre de scénarios conçus à l'étranger sera inévitablement suivie d'une réponse légale, proportionnée et ferme", a-t-il ajouté.
Le Mossad, le service de renseignement extérieur israélien, a invité en persan sur le réseau social X les protestataires iraniens à intensifier leur mobilisation, affirmant être présent avec eux "sur le terrain".
L'Iran, qui ne reconnaît pas Israël, l'accuse depuis longtemps de mener des opérations de déstabilisation sur son territoire et de sabotage contre ses installations nucléaires.
Des manifestations spontanées contre l'hyperinflation et le marasme économique ont débuté dimanche dans le plus grand marché pour téléphones portables de Téhéran, avant de gagner en ampleur.
Mardi, au troisième jour de ce mouvement initié par des commerçants, des manifestations étudiantes ont éclaté dans au moins dix universités de la capitale et de plusieurs villes iraniennes, selon les agences de presse Irna et Ilna.
Mercredi en début d'après-midi, les médias iraniens n'avaient pas fait état de nouvelles mobilisations, alors qu'écoles, banques et établissements publics ont été fermés sur décision des autorités dans la quasi-totalité du pays, en raison du froid et pour économiser l'énergie.
- "Pour un bout de pain" -
Mercredi, les rues de Téhéran étaient calmes, loin de la circulation chaotique habituelle, tandis que des habitants se promenaient dans les parcs par un temps ensoleillé, a constaté l'AFP.
Dans la capitale, les prestigieuses universités Beheshti et Allameh Tabataba'i ont aussi annoncé que leurs cours se tiendraient en ligne toute la semaine prochaine pour cause de froid, selon l'agence de presse Irna.
Les autorités n'ont fait officiellement aucun lien avec les manifestations.
Téhéran enregistre actuellement des températures négatives la nuit, qui ne sont pas exceptionnelles en cette période de l'année.
La monnaie nationale, le rial, a perdu depuis un an plus d'un tiers de sa valeur face au dollar, tandis qu'une hyperinflation à deux chiffres fragilise déjà depuis des années le pouvoir d'achat des Iraniens.
Certains produits de première nécessité deviennent de fait inabordables pour une partie de la population, qui pâtit des sanctions internationales contre l'Iran depuis quatre décennies.
"Tout le monde ici se bat pour un bout de pain", résumait un manifestant interrogé mardi par le quotidien Etemad.
- Anxiété -
La crainte d'un nouveau conflit avec Israël après la guerre de 12 jours qui a opposé les deux pays en juin et le rétablissement en septembre des sanctions onusiennes contre l'Iran pour son programme nucléaire - un dossier sur lequel les négociations sont au point mort avec les Etats-Unis - sont des facteurs d'anxiété supplémentaires pour la population.
Le nouveau gouverneur de la Banque centrale Abdolnasser Hemmati, qui a pris ses fonctions mercredi, a notamment pour priorité de freiner l'inflation, selon le gouvernement.
Ce mouvement de grogne contre la vie chère est à ce stade sans commune mesure avec les grandes manifestations qui avaient secoué l'Iran fin 2022, après la mort en détention de Mahsa Amini, une jeune iranienne.
Son décès, suite à une arrestation pour un voile prétendument mal ajusté, en infraction avec le strict code vestimentaire en vigueur en Iran, avait soulevé une vague de colère, dans laquelle plusieurs centaines de personnes avaient trouvé la mort, dont des dizaines de membres des forces de sécurité.
En 2019, des manifestations avaient aussi éclaté en Iran après l'annonce d'une forte hausse du prix de l'essence. La contestation avait alors touché une centaine de villes, dont Téhéran, et fait des dizaines de morts.