Loi immigration : un amendement durcit nettement les possibilités de régularisations dans les métiers en tension
information fournie par Boursorama avec Media Services 09/11/2023 à 09:13

Gérald Darmanin a jugé "acceptable" le nouvel article rédigé par la droite.

( AFP / LUDOVIC MARIN )

C'est la ligne rouge établie par la droite : la création d'un droit automatique à la régularisation pour les travailleurs sans-papiers dans les métiers en tension. La droite sénatoriale a nettement durci mercredi 8 novembre l'article phare du projet de loi immigration du gouvernement.

Dans le texte initial du gouvernement, l'article 3 -supprimé mercredi soir- proposait d'octroyer un titre de séjour d'un an renouvelable aux personnes qui travaillent dans des "métiers en tension" et justifient de trois ans de présence en France ainsi que de huit fiches de paie. Il a été supplanté par un nouvel article proposé par la majorité sénatoriale de droite et du centre, "acceptable" pour le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin et adopté dans la nuit de mercredi à jeudi.

Ce n'est qu' à "titre exceptionnel", et non plus de plein droit comme le prévoyait le gouvernement, qu'un travailleur pourra prétendre à la régularisation à condition d'avoir exercé pendant au moins douze mois sur les deux dernières années dans des "métiers et zones géographiques caractérisés par des difficultés de recrutement", selon les termes de cet article 4 bis.

Le demandeur devra également justifier d'au moins trois ans de résidence ininterrompue en France pour se voir délivrer une carte de séjour "travailleur temporaire" ou "salarié" d'un an. Une "procédure strictement encadrée" qui relèverait "du seul pouvoir discrétionnaire du préfet et ne créerait donc pas un droit opposable à la régularisation" pour les sans-papiers, se félicitent les rédacteurs de l'article.

Un examen de l'intégration, du mode de vie, des valeurs...

La délivrance de la carte de séjour "serait en outre conditionnée à un examen par l'administration de la réalité et de la nature des activités professionnelles de l'étranger, de son insertion sociale et familiale, de son respect de l'ordre public, de son intégration à la société française, à ses modes de vie et à ses valeurs, ainsi que de son respect des principes de la République" , peut-on lire.

Cet article conserve, en revanche, la caractéristique centrale de la proposition gouvernementale : celle permettant aux travailleurs en situation irrégulière de déposer eux-mêmes une demande de régularisation, sans obtenir l'aval de leur employeur, qui n'y a pas toujours intérêt. "L'important, c'est l'esprit de compromis que veut le gouvernement pour avoir l'essentiel de ce qu'il demande : une mesure de régularisation de personnes qui travaillent dans notre pays depuis très longtemps et dont les patrons (refusent de) les régulariser", a déclaré mercredi soir Gérald Darmanin.

Ce dernier a repris en substance ce qu'il avait affirmé en ouverture des débats au Sénat lundi : faire sauter le "verrou" de l'employeur permettra de faire sortir ces personnes du "joug" de certains patrons "voyous" ou "peu scrupuleux".

Aujourd'hui, pour être régularisé au titre de la circulaire "Valls" de 2012 (6.000 à 10.000 régularisations par le travail chaque année), un employé doit présenter une promesse d'embauche signée par son employeur : une procédure "moyen-âgeuse", a encore dénoncé Gérald Darmanin.

Si l'article 4 bis entre en vigueur après le passage du texte à l'Assemblée nationale à compter du 11 décembre, il "va créer une nouvelle circulaire", qui va "s'additionner à (la circulaire) Valls", a jugé Gérald Darmanin mercredi devant les sénateurs. "L'employeur n'a plus à valider la demande de régularisation du salarié , c'est au salarié de fournir les preuves de son travail", a résumé le président du groupe centriste au Sénat, Hervé Marseille.