Les recherches se poursuivent à Hong Kong, l'incendie a fait au moins 159 morts, dont un nourrisson information fournie par Reuters 03/12/2025 à 13:26
par Mei Mei Chu, Joyce Zhou et Jessie Pang
Les recherches se poursuivaient à Hong Kong dans les ruines des immeubles de Wang Fuk Court détruits la semaine dernière par un violent incendie qui a fait au moins 159 morts dont un nourrisson et une personne âgée de 97 ans, a annoncé mercredi la police, laquelle recense encore 31 disparus.
Les habitants contraints de fuir le seul immeuble des huit qui n'a pas été la proie des flammes sont retournés brièvement chez eux pour récupérer leurs affaires, tandis que des centaines d'autres, hébergés dans des logements temporaires, s'efforcent de reconstruire leur vie.
Les enquêteurs continuent les recherches pour retrouver des corps, dont certains ont été découverts sur les toits et dans les cages d'escalier, d'autres réduits à l'état de cendres.
Sur les 159 corps retrouvés, 140 ont été identifiés. Il s'agit de 91 femmes et 49 hommes, âgés de un à 97 ans.
Parmi les 31 personnes toujours portées disparues figurent des employés de maison étrangers originaires d'Indonésie et des Philippines.
ENQUÊTE SUR LES CAUSES
"Nous voulons vraiment, s'il reste des corps sur les lieux, les retrouver dès que possible afin que les familles puissent leur faire un dernier adieu", a déclaré le commissaire de police Chow Yat-ming lors d'une conférence de presse mercredi.
La police a arrêté 21 suspects pour homicide involontaire dans le cadre d'une enquête sur les causes de l'incendie, tandis que l'organisme de lutte contre la corruption de Hong Kong enquête également sur d'éventuelles malversations.
Faxe aux appels à la transparence et à la responsabilité, le chef de l'exécutif, John Lee, a ordonné à une commission dirigée par un juge d'enquêter sur les causes de l'incendie meurtrier et d'examiner la surveillance des travaux de rénovation des bâtiments, accusés d'avoir attisé le brasier.
L'année dernière, les autorités avaient assuré les résidents de Wang Fuk Court qu'ils étaient exposés à des "risques d'incendie relativement faibles" après qu'ils se furent plaints des dangers de départ de feu posés par les rénovations, a déclaré le département du Travail.
Les autorités de Hong Kong ont pointé du doigt le filet en plastique et la mousse isolante de qualité inférieure utilisés sur le chantier. Elles ont déclaré mercredi que les filets de chantier installés sur tous les bâtiments résidentiels en rénovation devaient être retirés, ce qui concerne environ 200 immeubles privés et plus de 10 bâtiments publics.
Au moins deux personnes, dont l'ancien conseiller municipal pro-démocratie Kenneth Cheung et un étudiant qui avait lancé une pétition publique demandant une enquête indépendante sur l'incendie, ont été placées en détention par la police depuis samedi, ont déclaré deux sources à Reuters. Tous deux ont depuis été libérés sous caution.
Mercredi, la Chine a réitéré son avertissement contre toute tentative d'utiliser la catastrophe pour "replonger Hong Kong dans le chaos" de 2019, lorsque des manifestations pro-démocratiques massives avaient défié Pékin et déclenché une crise politique.
MAINTIEN DES ÉLECTIONS
Le gouvernement maintient les élections législatives "réservées aux patriotes" prévues ce dimanche, malgré les doutes concernant la participation de la population locale, encore sous le choc de la catastrophe.
Analystes et habitants considèrent ce scrutin comme un test de légitimité pour le gouvernement de Hong Kong, qui tente d'apaiser la colère de la population, dans un contexte de répression.
"Honnêtement, c'est exaspérant. Je pense que c'est un manque de respect", s'insurge Trent Heung, un homme de 37 ans qui s'est déplacé sur les lieux de l'incendie pour déposer des fleurs avant d'aller travailler.
"Tout le monde est encore en deuil et je ne pense vraiment pas qu'il faille donner la priorité à quoi que ce soit d'autre que de rendre hommage aux victimes et aux personnes touchées et de s'assurer qu'elles sont bien prises en charge", a-t-il ajouté.
DES LOGEMENTS TEMPORAIRES INADAPTÉS POUR BEAUCOUP
Portant des valises et des sacs, les habitants du seul immeuble épargné par le brasier qui a duré 40 heures ont été escortés ce mercredi jusqu'à leurs appartements et ont eu 90 minutes pour faire leurs valises.
"Toute ma vie est là", déclare Lam, une femme de 60 ans chargée de sacs vides, attendant que sa fille l'aide à rassembler ses affaires essentielles dans son appartement.
Les autorités n'ont pas précisé quand le bâtiment non endommagé serait de nouveau accessible, car elles recueillent des preuves dans le cadre de l'enquête criminelle.
Plus de 2.600 sinistrés ont été transférés vers des logements temporaires, selon le gouvernement, dont 1.013 dans des auberges, des camps ou des chambres d'hôtel. Par ailleurs, 1.607 résidents ont emménagé dans des logements dits transitoires.
"Je ne peux pas dormir la nuit en pensant à ma maison. Tout ce que j'ai acquis pendant des décennies a disparu", témoigne Leung, 71 ans, revenue sur les lieux avec son mari et sa fille pour parler avec le personnel d'assistance.
Leung et son mari avaient été placés dans un hébergement temporaire la semaine dernière, après l'incendie de leur appartement. Elle a estimé que l'endroit était trop éloigné des transports publics et trop petit pour les loger tous les deux. Ils ont donc choisi de rester avec leur fille en attendant de trouver un hébergement plus adapté.
Bonnie, leur fille âgée de 41 ans, juge qu'il était "inconcevable qu'une telle tragédie, avec autant de morts, puisse se produire à Hong Kong".
"Papa et maman, et de nombreux résidents, ont lutté pendant tant d'années. Avoir un chez soi ici nous apportait la paix, c'est très douloureux de tout perdre", confie la jeune femme.
(Reportage de Mei Mei Chu, Joyce Zhou, Jessie Pang et Laurie Chen ; rédigé par Farah Master et John Geddie ; version française Coralie Lamarque ; édité par Sophie Louet)