Les abus seront sanctionnés : c'est l'avertissement que tous les fournisseurs de gaz et d'électricité ont reçu fin octobre de la Commission de régulation de l'énergie (CRE). Dans un contexte de flambée des prix, celle-ci entend protéger les consommateurs de l'augmentation de tarifs imposée par certains fournisseurs.
Les fournisseurs d'énergie sanctionnés en cas d'abus / iStock-TebNad
L'impact de la flambée des prix sur le consommateur
Les tarifs réglementés du gaz sont gelés jusqu'à fin 2022. Mais des fournisseurs alternatifs proposent, depuis l'ouverture en 2007 du marché à la concurrence, des offres au prix du marché, fixées librement. Les consommateurs qui ont fait ce choix ne sont pas protégés contre une flambée des prix de l'énergie. Il était tentant pour certains fournisseurs de répercuter la hausse spectaculaire actuelle sur leurs clients. De fait, la CRE observe des pratiques abusives, avec des augmentations de tarifs pouvant atteindre 30 %. L'information n'est pas clairement explicitée au client, et elle est envoyée par mail, au risque de passer inaperçue. De plus, certains de ces fournisseurs peu scrupuleux n'hésitent pas à se débarrasser d'abonnés (y compris de gros clients) en résiliant leurs contrats. Une dizaine refuserait même tout nouveau client.
Des fournisseurs alternatifs dans le collimateur de la CRE
L'Arenh (Accès régulé à l'électricité nucléaire historique) permet aux fournisseurs alternatifs d'acheter à EDF de l'électricité nucléaire à prix réduit (42 € le mégawattheure, soit plus de deux fois moins que sur les marchés de gros). Selon la CRE, la moitié des stocks d'énergie des fournisseurs alternatifs provient de cet accord-cadre avec l'EDF. En théorie, les fournisseurs concernés par le dispositif Arenh ne peuvent pas augmenter leurs tarifs au-delà d'une certaine limite ni résilier des contrats. Mais, sur un marché où les prix s'envolent jusqu'à des pics de 200 €/MWh, il semble que certains prestataires peu scrupuleux profitent de ces aides pour tenter de faire un bénéfice substantiel. L'ANODE (Association nationale des opérateurs détaillants en énergie), qui fédère et défend une quinzaine de fournisseurs alternatifs, minimise cependant cette pratique en considérant qu'elle reste marginale et que la plupart auraient des pratiques responsables.
La sanction des abus par la répression des fraudes
La CRE est donc montée au créneau le 28 octobre dans les colonnes des Échos, en reprochant à certains fournisseurs de ne pas s'être suffisamment préparés à une hausse substantielle des prix du gaz et de l'électricité. Estimant que le consommateur n'a pas à subir cette prise de risque, elle menace de sanctions les mauvais élèves qui envisageraient de faire des bénéfices avec les aides accordées. Elle a chargé la DGCCRF (répression des fraudes) de sanctionner les abus constatés. Même si les modifications de contrats restent autorisées, les changements de tarifs abusifs ne seront pas tolérés et des actions en justice pourront être intentées contre les fautes les plus graves. Face à ce grand bouleversement, de plus en plus de consommateurs pourraient revenir au tarif réglementé. Certains fournisseurs risquent donc, au moins de façon temporaire, d'interrompre leur activité et de ne plus assurer la livraison d'énergie. Dans une telle situation, la loi énergie-climat du 8 novembre 2019 prévoit de nommer des "fournisseurs de secours", qui prendraient le relais en attendant qu'une solution soit trouvée.