Législatives aux Pays-Bas à valeur de test sur la montée du populisme européen
information fournie par Reuters 29/10/2025 à 10:59

Geert Wilders lors du dernier débat précédant les élections à la Chambre des représentants, à La Haye

par Stephanie van den Berg et Bart H. Meijer

Les Néerlandais sont appelés aux urnes mercredi pour des élections législatives anticipées lors desquelles ils ont le choix entre soutenir la politique anti-immigration du populiste Geert Wilders, qui a provoqué la chute de la coalition conservatrice, ou opérer un recentrage du pouvoir.

Alors que les partis d'extrême-droite sont en tête des enquêtes d'opinion en Grande-Bretagne, en France et en Allemagne, le scrutin aux Pays-Bas peut servir de révélateur de la capacité du populisme à gagner encore du terrain en Europe.

Geert Wilders avait porté son Parti pour la liberté (PVV) vers une victoire retentissante en 2023, formant ensuite une coalition conservatrice sans toutefois accéder au poste de Premier ministre, en raison du refus de ses partenaires.

Le chef de file de l'extrême droite a fait chuter cette coalition en juin dernier après avoir réclamé en vain des mesures strictes contre l'accueil des demandeurs d'asile aux Pays-Bas.

Les sondages d'opinion montrent toutefois que l'avance autrefois considérable du PVV s'est effritée et que certains rivaux de Geert Wilders sont pratiquement à égalité avec l'admirateur peroxydé du président américain Donald Trump.

Alors que le PVV est donné vainqueur du scrutin, les quatre partis représentant la droite et la gauche traditionnelles - dont le Parti populaire libéral et démocrate (VVD) et les chrétiens-démocrates - devraient remporter presque autant de sièges et ont exclu l'hypothèse d'une coalition avec la formation de Geert Wilders, ce qui devrait empêcher ce dernier de gouverner, à moins d'une victoire plus large qu'attendu.

Les bureaux de vote ont ouvert à 06h30 (05h30 GMT) dans une partie du pays et fermeront à 21h00. Les premiers sondages de sortie des urnes, qui s'avèrent traditionnellement exacts, seront alors publiés.

LE CENTRE-GAUCHE A GAGNÉ EN VISIBILITÉ

Les élections sont devenues de plus en plus imprévisibles aux Pays-Bas, où former une coalition durable est une tâche difficile pouvant nécessiter des semaines voire des mois de négociations.

A quelques jours du scrutin, près de la moitié des électeurs disaient encore être indécis, d'après les enquêtes d'opinion.

Geert Wilders, qui est connu pour ses positions anti-islam et vit sous protection constante en raison de menaces de mort, propose de faire des économies en rejetant toutes les demandes d'asile, ce qui serait contraire aux traités de l'UE, en expulsant les réfugiés ukrainiens de sexe masculin et en mettant fin à l'aide au développement afin de financer des prestations dans l'énergie et la santé.

Selon les analystes politiques, le déclin du soutien populaire dont bénéficie Geert Wilders reflète la frustration des électeurs à l'égard des vives querelles qui ont miné la dernière coalition gouvernementale.

Le fait que le politicien néerlandais fasse l'éloge de Donald Trump, alors même que ce dernier est perçu comme testant les limites de la démocratie aux Etats-Unis, inquiète en outre une partie de l'électorat.

Le parti de centre-gauche D66 a pour sa part gagné en visibilité ces dernières semaines grâce aux prestations de son chef de file Rob Jetten, âgé de 38 ans, qui promet une relance de la construction de logements et des dépenses importantes dans le domaine de l'éducation.

"Ce dont souffrent les Pays-Bas, c'est de 20 ans de discussions politiques sur l'asile sans le moindre résultat", a-t-il déclaré mardi lors d'un débat télévisé. "Mon ambition est que dans quatre ans, nous n'ayons plus à parler d'asile tout le temps, parce que nous aurons réglé le problème."

LES CHRÉTIENS-DÉMOCRATES ATTIRENT DES ÉLECTEURS DU PVV

Les chrétiens-démocrates, emmenés par Henri Bontenbal, ont pour leur part attiré une partie de l'électorat du PVV en faisant campagne en faveur d'un gouvernement stable et des valeurs traditionnelles.

A Volendam, ville de pêcheurs située près d'Amsterdam et bastion de Geert Wilders, le dirigeant d'extrême droite peut cependant encore compter sur des fidèles.

"Nous devons être capables de prendre soin de nous-mêmes, et c'est pourquoi je vote pour le PVV. Nos concitoyens d'abord", a déclaré à Reuters Jaap Schilder, 40 ans, propriétaire d'une poissonnerie et élu local.

Le refus des partis traditionnels de former une coalition avec le PVV pourrait favoriser les votes dits tactiques au profit d'autres formations conservatrices, ont déclaré des analystes politiques.

Même si Geert Wilders "obtient le plus de votes et le plus de sièges au Parlement, il n'entrera probablement pas au sein de la coalition", a commenté Henk van der Kolk, professeur en politiques électorales à l'université d'Amsterdam.

(Rédigé par Stephanie van den Berg et Ingrid Melander ; version française Camille Raynaud, Jean Terzian et Benjamin Mallet)