La seule banque de lait maternel du Kenya, bouée de sauvetage de bébés prématurés
information fournie par AFP 14/09/2025 à 10:13

Une infirmière tient des bouteilles de lait maternel provenant de donations faites à la banque de lait de la maternité de l'hôpital Pumwani à Nairobi, le 4 septembre 2025 ( AFP / Tony KARUMBA )

Entourée d'incubateurs, un tube rouge inséré dans son nez minuscule, Grace-Ella, quatre jours, est nourrie à un lait maternel venant d'autres femmes que sa maman à la maternité Pumwani de Nairobi, la seule à proposer cette aide vitale aux nourrissons prématurés au Kenya.

Dans ce pays d'Afrique de l'Est, environ 134.000 bébés naissent prématurément chaque année, selon les chiffres officiels, tandis que les complications qui en résultent sont la principale cause de décès néonataux.

Les mères qui accouchent bien avant terme sont souvent incapables de produire du lait maternel. Elles doivent recourir à des substituts en poudre qui peuvent être moins nutritifs et augmentent le risque d'infection, surtout si l'eau à laquelle ils sont mélangés est contaminée.

Une infirmière se tient à côté d'une vitrine réfrigérée contenant des bouteilles de lait maternel provenant de donations faites à la banque de lait de la maternité de l'hôpital Pumwani à Nairobi, le 4 septembre 2025 ( AFP / Tony KARUMBA )

La banque de lait maternel kényane, créée en 2019 avec le soutien de l'ONG PATH et de fonds britanniques, permet à des bébés comme Grace-Ella de bénéficier de la générosité d'autrui.

"C'était vraiment passionnant", se réjouit sa mère Margaret Adhiambo, qui n'avait jamais entendu parler de cette solution avant d'accoucher à 30 semaines. Et concède avoir d'abord été sceptique.

"Cela me donnait un sentiment de culpabilité, comme si je ne pouvais pas donner mon propre lait maternel à ma fille", explique-t-elle. Mais finalement "cela m'a aidée, car (elle) n'est pas morte de faim."

- "C'est bien d'aider" -

La maternité de Pumwani est la seule à proposer ce service au Kenya, qui est aussi rare sur le reste de continent, alors que l'Afrique subsaharienne enregistre 43% des décès néonataux dans le monde. Elle représente pourtant moins de 16% de la population globale, selon des estimations de la Banque mondiale.

Les bébés en sous-poids sont confrontés à de nombreux risques sanitaires, et le lait maternel peut faire pencher la balance en leur faveur.

Une infirmière prend des bouteilles de lait maternel provenant de donations faites à la banque de lait de la maternité de l'hôpital de Pumwani à Nairobi, le 4 septembre 2025 ( AFP / Tony KARUMBA )

"Lorsque nous les nourrissons au lait maternel, nous constatons qu'ils grandissent plus vite que les bébés nourris au lait artificiel", explique à l'AFP Muthoni Ogola, médecin responsable du programme.

Pourtant, l'Organisation mondiale de la santé (OMS) estime que moins de la moitié des nouveaux-nés dans le monde sont exclusivement allaités.

L'un des principaux avantages du lait maternel réside dans les anticorps transmis au nourrisson, pointe Hannah Wangeci Maina, infirmière à Pumwani, assumant avec énergie la supervision d'une maternité accueillant au moins 90 mères.

"Nous avons généralement beaucoup de mères qui font la queue pour recevoir du lait maternel", observe-t-elle.

Lors d'une récente visite de l'AFP, elle accompagnait Esther Wanjiru, 22 ans, dans sa démarche de don. Mère pour la première fois, celle-ci a subi un dépistage de maladies infectieuses, dont le VIH et l'hépatite, avant de s'asseoir pour tirer son lait.

"C'est bien d'aider", se réjouit la nouvelle maman à l'AFP pendant la procédure. "C'est un peu comme un massage", ajoute-t-elle avec un sourire timide.

Son lait a ensuite été testé, avant et après pasteurisation, puis congelé. Il pourra être conservé jusqu'à 12 mois.

- Financement -

Pour l'équipe de l'hôpital, il est cependant frustrant de ne disposer de suffisamment d'équipement que pour fournir du lait aux enfants hospitalisés entre ses murs, ainsi que de dons occasionnels à deux autres hôpitaux.

La banque de lait maternel reste une option beaucoup moins chère que le lait en poudre, mais l'équipement est coûteux, explique Christine Kiteshuo, directrice générale de l'hôpital.

"Certains de ces équipements ne sont disponibles qu'en Europe (ou) aux États-Unis. Il nous est donc difficile de nous en procurer", souligne-t-elle.

L’hôpital aimerait aider plus de mères s’il avait plus de moyens, notamment celles vivant dans des quartiers informels sans réfrigérateur, ni eau courante propre.

"C’est l’un des défis auquel nous faisons face actuellement. Nous ne pouvons pas aider les mères en dehors de l’établissement", regrette Mme Kiteshuo.