La France fixe une nouvelle doctrine d'intervention en mer contre les traversées clandestines vers l'Angleterre information fournie par AFP 28/11/2025 à 14:56
Après des mois de discussions, la France a annoncé vendredi qu'elle allait débuter "prochainement" des opérations visant à intercepter en mer des petits bateaux clandestins en chemin vers l'Angleterre, avant qu'ils n'embarquent des groupes de migrants.
Ce changement de doctrine engagé par Paris sous pression de Londres était en gestation depuis plusieurs mois.
Les forces de l'ordre françaises peinent à trouver la parade face aux "taxi-boats", un mode d'action des passeurs consistant à faire partir une embarcation d'un point éloigné des principales plages de départ où sont rassemblés les migrants.
Le taxi-boat s'approche ensuite du rivage et vient récupérer des passagers directement dans l'eau, avant de poursuivre sa route vers l'Angleterre.
"La Gendarmerie maritime sera bientôt en mesure d'effectuer des opérations de contrôle et d'intervention en mer, sur des embarcations soupçonnées d'être des taxi-boats", a déclaré à l'AFP la préfecture maritime de la Manche et de la mer du Nord (Prémar), confirmant des informations du journal Le Monde.
Le quotidien évoque un document signé par le préfet maritime mais aussi ceux du Nord, de la Somme et du Pas-de-Calais.
Le ministère de l'Intérieur français, contacté, n'était pas joignable dans l'immédiat pour réagir.
Côté britannique, un porte-parole du gouvernement a simplement rappelé vendredi à l'AFP que Londres a "déjà travaillé à s'assurer que les autorités en France réforment leurs tactiques en mer afin qu'elles puissent intervenir dans les eaux peu profondes".
- Pas de filets à ce stade -
Actuellement, une fois une embarcation clandestine en mer, seul le dispositif de secours intervient en cas de besoin, en raison des risques que présentent ce type d'opérations, comme prévu par les conventions internationales.
Désormais, il pourra aussi y avoir des "opérations de contrôle et d'intervention (...) issues d'études menées par l'ensemble des services de l'Etat concernés", a précisé la Prémar. Elles "comportent des dispositions prenant en compte la primauté de la sauvegarde de la vie humaine".
"L'ensemble des travaux sur le sujet se fait en lien avec les parquets concernés", a souligné vendredi à l'AFP Cécile Gressier, la procureure de Boulogne-sur-Mer (Pas-de-Calais).
Ces futures opérations de la gendarmerie maritime sont prévues en amont de l'embarquement de passagers, pour ne pas mettre leurs vies en péril, a précisé à l'AFP un porte-parole de la Prémar.
De même, "l'emploi de filets visant à stopper le taxi-boat n'est pas envisagé à ce stade", toujours selon la Prémar.
Cette méthode, mentionnée la semaine dernière dans la presse, avait soulevé l'indignation d'associations d'aide aux migrants et d'ONG comme Amnesty International.
Les taxi-boats embarquent leurs passagers sur une ou plusieurs haltes et repartent en direction de l'Angleterre surchargés, transportant régulièrement plus de 70 candidats à l'exil dans des conditions périlleuses.
Au moins 27 migrants sont morts cette année lors de ces dangereuses tentatives de traversées de la Manche, selon un décompte de l'AFP à partir de données officielles.
Depuis le 1er janvier, plus de 39.000 personnes sont arrivées sur les côtes anglaises à bord de petites embarcations, selon les données britanniques. Soit plus que sur la totalité de 2024, mais moins qu'en 2022, année record avec 45.000 traversées réussies.
Plus de la moitié des personnes arrivées clandestinement au Royaume-Uni entre septembre 2024 et septembre 2025 sont de cinq nationalités: Erythréens (la nationalité la plus représentée), Afghans, Iraniens, Soudanais et Somaliens.
Le gouvernement travailliste britannique, sous pression de l'extrême-droite, a annoncé ce mois-ci une réforme pour durcir sa politique d'asile et d'immigration, espérant ainsi décourager les arrivées irrégulières de migrants sur ces "small boats", qu'il peine à endiguer.