L'UE décide de geler les actifs russes aussi longtemps que nécessaire
information fournie par Reuters 12/12/2025 à 19:08

(Actualisé avec décision)

par Jan Strupczewski

L'Union européenne (UE) a donné vendredi son feu vert à l'immobilisation des actifs souverains russes en Europe aussi longtemps que nécessaire, levant ainsi l'un des principaux obstacles à l'utilisation de ces avoirs pour financer l'effort de guerre ukrainien contre la Russie.

Les gouvernements des Vingt-Sept ont décidé par un vote à la majorité qualifiée de geler quelque 210 milliards d'euros "jusqu'à ce qu'il n'y ait plus de menace immédiate aux intérêts économiques de l'Union", évitant ainsi de devoir renouveler tous les six mois cette immobilisation par un vote à l'unanimité, au risque de se heurter au veto de pays prorusses, à commencer par la Hongrie.

Le Premier ministre hongrois Viktor Orban a estimé dans un message sur Facebook que cette initiative causerait des "dommages irréparables" au bloc communautaire. "La Hongrie proteste contre cette décision et fera tout son possible pour rétablir la légalité", a-t-il assuré.

La Banque de Russie a averti vendredi que toute utilisation de ses avoirs serait illégale, promettant de recourir à tous les moyens disponibles pour protéger ses intérêts.

Dans un autre communiqué, la banque centrale russe a dit engager des poursuites contre l'institution financière Euroclear, basée à Bruxelles, qui détient environ 185 milliards d'euros des actifs russes gelés en Europe.

Le dépositaire belge est déjà visé par plusieurs plaintes devant des tribunaux de Moscou depuis le gel des avoirs russes consécutif à l'invasion à grande échelle de l'Ukraine par les forces russes en février 2022.

RASSURER LA BELGIQUE

La décision des Vingt-Sept doit aider à convaincre la Belgique de soutenir le projet de "prêt de réparation" à l'Ukraine présenté le 3 décembre dernier par la Commission européenne, qui vise à utiliser les avoirs russes gelés pour répondre aux besoins financiers de Kyiv en 2026 et 2027, à hauteur de 165 milliards d'euros au maximum.

Le prêt serait remboursé par l'Ukraine une fois que la Russie accepterait de verser des indemnités de guerre à Kyiv.

La Belgique réclame également un mécanisme de solidarité européen afin de ne pas se retrouver seule face aux menaces de poursuites judiciaires de Moscou.

"La Commission est prête à travailler davantage pour voir comment répondre aux inquiétudes de la Belgique et ce travail est en cours au moment où je vous parle", a déclaré le commissaire européen à l'Economie, Valdis Dombrovskis, lors d'une conférence de presse.

La Commission européenne a également présenté une solution alternative pour financer l'effort de guerre ukrainien, un emprunt communautaire, considéré toutefois avec scepticisme par les pays dits "frugaux" comme l'Allemagne ou les pays nordiques.

Les deux options seront débattues par les chefs d'Etat et de gouvernement de l'UE lors du Conseil européen des 18 et 19 décembre.

Selon plusieurs sources diplomatiques européennes, l'Allemagne ne voit pour seule alternative que le prêt de réparation, qu'elle est disposée à garantir à hauteur de 50 milliards d'euros.

"Nous pensons que le prêt de réparation est de loin la meilleure option car il ne pèse pas sur les pays, leurs finances publiques et leurs niveaux d'endettement", a déclaré la ministre des Finances danoise Stephanie Lose, dont le pays occupe actuellement la présidence de l'UE.

"Il reste toujours des inquiétudes auxquelles il faut répondre. Il est normal qu'il y ait une discussion, mais nous continuerons à oeuvrer pour clarifier tous les éléments en espérant être en mesure d'avancer vers une décision lors du Conseil européen de la semaine prochaine", a-t-elle dit à la presse avant une réunion des ministres des Finances de l'UE.

(Avec Andreas Rinke, Andrew Gray, John Irish, Lili Bayer, Inti Landauro, Krisztina Than, rédigé par Jan Strupczewski et Ingrid Melander, Jean-Stéphane Brosse pour la version française, édité par Kate Entringer et Sophie Louet)