Japon: La BoJ va ralentir le rythme de ses achat d'obligataires face aux nouveaux risques
information fournie par Reuters 17/06/2025 à 10:29

Le siège de la Banque du Japon à Tokyo

par Leika Kihara et Makiko Yamazaki

La Banque du Japon (BoJ) a maintenu mardi ses taux d'intérêt à leurs niveaux actuels et décidé de ralentir le rythme de ses achats d'obligations à partir de la prochaine année fiscale, démontrant sa préférence pour une approche prudente dans la normalisation d'une politique monétaire encore souple.

Comme prévu, la banque centrale nippone a décidé à l'unanimité de maintenir ses taux d'intérêt à court terme à 0,5% lors de sa réunion de deux jours qui s'est achevée mardi.

Cette décision a été prise alors que l'escalade du conflit au Moyen-Orient et les incertitudes concernant l'impact des droits de douane américains compliquent la tâche de la banque centrale nippone de relever des taux d'intérêt encore bas et réduire un bilan qui s'est gonflé jusqu'à atteindre à peu près la taille de l'économie japonaise.

"Pour l'instant, la politique commerciale de chaque pays est extrêmement incertaine", a déclaré le gouverneur de la BoJ, Kazuo Ueda, lors d'une conférence de presse après la réunion de la banque centrale.

"Le risque de baisse est donc plus important pour l'économie japonaise et les prix", a-t-il dit.

Les marchés se concentrent sur la manière dont le gouverneur équilibre les risques liés aux surtaxes américaines et les pressions inflationnistes nationales afin d'obtenir des indices sur la date à laquelle la BoJ pourrait reprendre ses hausses de taux d'intérêt.

L'institution a également décidé de ne pas modifier son plan de réduction des émissions obligataires, qui court jusqu'en mars 2026, dans le cadre duquel elle réduira ses achats d'obligations d'État de 400 milliards de yens par trimestre.

La BoJ a par ailleurs défini un nouveau plan qui débutera au mois d'avril 2026, dans le cadre duquel l'instutiton coupera de moitié le montant de la réduction trimestrielle, de sorte que les achats mensuels tombent à environ 2.000 milliards de yens d'ici mars 2027.

Naoki Tamura, membre du conseil de la BoJ, s'est toutefois opposé à cette décision et a demandé à la banque centrale de continuer à réduire ses achats de 400 milliards de yens par trimestre au cours de l'exercice 2026.

Le ralentissement de la réduction du bilan indique que la BoJ craint de perturber les marchés après une récente flambée des rendements des obligations d'État à très long terme.

INCERTITUDE SUR L'INFLATION

La BoJ a mis fin à son contrôle de la courbe des taux et a commencé à réduire ses achats massifs d'obligations. Elle a également relevé les taux à court terme à 0,5% en janvier, estimant que le Japon progressait vers la réalisation durable de son objectif d'inflation de 2%.

L'inflation de base au Japon a toutefois atteint 3,5% en avril, son plus haut niveau depuis plus de deux ans, dépassant largement l'objectif de 2% fixé par la BoJ, en raison notamment d'une hausse de 7% des prix des denrées alimentaires.

Dans sa déclaration, la BoJ a maintenu son point de vue selon lequel l'inflation devrait augmenter progressivement en raison des pénuries de main-d'oeuvre.

Selon un récent sondage Reuters, une légère majorité d'économistes s'attend à ce que la prochaine augmentation de 25 points de base ait lieu au début de 2026, mais l'incertitude quant aux perspectives économiques reste élevée dans un contexte de turbulences commerciales.

Le Premier ministre japonais Shigeru Ishiba et le président américain Donald Trump ont convenu lundi de faire avancer les négociations commerciales, mais n'ont pas réussi jusqu'à présent à faire une percée qui permettrait de réduire ou d'éliminer les droits de douane qui menacent de tirer vers le bas une économie fortement orientée vers l'exportation.

(Reportage Leika Kihara, Makiko Yamazaki, Kantaro Komiya et Satoshi Sugiyama; version française Camille Raynaud et Diana Mandia, édité par Blandine Hénault)