"Indigne" : le Contrôleur des prisons recommande de "suspendre les incarcérations" à Bois-d'Arcy
information fournie par Boursorama avec Media Services 16/12/2022 à 13:08

Le contrôleur des prisons a constaté un taux d'occupation de 165% et une "désorganisation générale de la détention" dans la maison d'arrêt.

( AFP / KENZO TRIBOUILLARD )

Il faut "suspendre les incarcérations" à la maison d'arrêt de Bois-d'Arcy, dans les Yvelines. Le Contrôleur général des lieux de privations de liberté (CGLPL) a émis vendredi 16 décembre cette rare recommandation après avoir constaté des "conditions de détention indignes" dans l'établissement.

Dans des recommandations en urgence publiées au Journal officiel et préalablement envoyées au ministère de la Justice, le CGLPL explique avoir constaté sur place mi-septembre un taux d'occupation de 165% et une "désorganisation générale de la détention" , qui ne permettaient "de garantir ni la sécurité des personnes écrouées, ni celle des personnes qui travaillent au centre pénitentiaire".

Le contrôleur des prisons estime de fait "nécessaire" de "suspendre les incarcérations jusqu'à ce qu'une inspection générale de la justice confirme que la sécurité des détenus est assurée (...) et que leurs conditions de travail permettent aux surveillants d'assurer l'ensemble de leurs missions".

867 détenus pour 530 places

La maison d'arrêt comptait au moment du contrôle 867 détenus pour 530 places théoriques.

"466 détenus sont hébergés à deux dans des cellules individuelles, 201 détenus sont hébergés à trois, toujours en cellule individuelle", détaille le CGLPL, selon qui "la population détenue est accueillie dans des conditions dégradées et inadaptées".

"Les détenus ne disposent pas d'un espace suffisant pour vivre et se mouvoir en cellule.(...) L'espace toilettes n'est séparé du reste de la cellule que par des cloisons incomplètes", décrit l'autorité administrative. Le CGPLL pointe par ailleurs le "désœuvrement" des détenus qui, "à part deux heures de promenade par jour", passent pour la plupart "l'essentiel de la journée en cellule".

En réponse à ces recommandations, le ministère de la Justice a adressé au Contrôleur des prisons une série d'observations, également publiées au Journal officiel. Évoquant une situation "préoccupante", Éric Dupond-Moretti assure dans ce document daté du 30 novembre que "des courriers sont régulièrement rédigés par le directeur interrégional (des services pénitentiaires) à l'attention de la cour d'appel de Paris et de celle de Versailles" pour "souligner" la surpopulation carcérale à Bois-d'Arcy. "Une nouvelle lettre sera prochainement adressée à ce sujet", affirme le ministre.

Record de détenus en France

Fin novembre, l e nombre de détenus en France avait atteint un nouveau record absolu à 72.809 personnes , pour 60.698 places opérationnelles.

Outre la suspension des incarcérations, le Contrôleur des prisons recommande de garantir aux détenus "le respect de leur santé et de leur intégrité physique", notamment face au risque d'incendie, ainsi que l'accès dans leur cellule à "une plaque chauffante, un réfrigérateur et à de l'eau chaude".

Des clichés du CGLPL consultés par l' AFP montrent des dispositifs de "chauffes" installés en cellule bricolés à l'aide de cannettes et de mouchoirs imbibés d'huile. Une opération de rénovation électrique "actuellement en phase de travaux" et devant s'achever en 2024 "permettra de répondre à l'ensemble de ces préconisations", selon Éric Dupond-Moretti.

Le CGLPL recommande par ailleurs de garantir aux détenus une douche quotidienne. Dans ses observations, le ministre explique que les personnes incarcérées ont accès aux douches "a minima trois fois par semaine", conformément au code pénitentiaire, et que "celles qui participent à des séances sportives ont systématiquement accès aux douches du gymnase après la séance".