Face-à-face corsé entre Turquie et Australie pour décrocher la prochaine COP information fournie par AFP 13/11/2025 à 17:54
Un choix s'offre aux visiteurs de la COP30 à Belem en quête d'un bon café: un cappuccino sur le stand australien ou le puissant café turc sur le pavillon d'Ankara, symbole du bras de fer entre les deux pays pour organiser la prochaine conférence.
Au moment même où le Brésil tente de montrer au monde que la diplomatie climatique fonctionne encore, les deux pays sont sous pression pour se mettre d'accord afin d'éviter un scandale dans la ville amazonienne de Belem.
Sans retrait d'une des deux candidatures pour la COP31 de 2026 ou sans compromis, Australie et Turquie risquent de perdre la partie. Une situation inédite, qui verrait l'organisation de la prochaine conférence climat de l'ONU revenir par défaut à l'Allemagne.
D'autres COP ont fait l'objet d'une forte concurrence par le passé mais "jamais aucune n'a connu un tel suspense", souligne auprès de l'AFP Alden Meyer, vétéran des sommets climatiques pour le groupe de réflexion E3G.
Ce n'est d'ailleurs, selon certains, pas un hasard si les deux stands se trouvent côte à côte dans l'immense enceinte brésilienne: "C'est à 100% fait exprès", assure Kathryn McCallum, militante du réseau d'ONG Climate Action Network Australia.
"En gros, la présidence brésilienne leur dit: +Débrouillez-vous+", car "ils ne veulent pas que cela éclipse les discussions cruciales en cours", juge-t-elle.
- Supporters -
La proximité des stands n'a pas empêché une vingtaine de supporters australiens de promouvoir jeudi la candidature du pays pour la COP31, sous le regard des Turcs.
Un autre jour, une foule enthousiaste s'était pressée autour du pavillon australien à l'occasion de la visite de la reine Mary de Danemark, originaire de Tasmanie.
Côté turc, c'est un calligraphe qui attire les visiteurs qui repartent avec des illustrations personnalisées et des sacs en toile.
Mais parallèlement à ces opérations de séduction à ciel ouvert, la diplomatie est à l'oeuvre en coulisses. Un émissaire a été nommé par le Brésil pour tenter de rapprocher les positions avant la clôture du sommet, prévue le 21 novembre.
"Nous sommes toujours déterminés à organiser la COP31", affirme à l'AFP la diplomate turque Aysin Turpanci.
De son côté, l'Australie se targue d'"un soutien international large et solide", par la voix de Josh Wilson, son ministre adjoint du Climat. Son pays a "engagé des discussions avec la Turquie au plus haut niveau", dit-il.
Mais aucun des deux pays ne semble prêt à plier et l'heure tourne.
Jeudi, le Premier ministre australien Anthony Albanese a expliqué depuis Sydney que le président turc Recep Tayyip Erdogan "maintient sa position en réponse à l'Australie qui maintient sa position".
Pour un membre de la délégation turque, interrogé par l'AFP, le rapport de force est de "50-50".
- Berlin pousse -
Selon les règles de l'ONU qui régissent les COP, les villes d'accueil sont choisies à tour de rôle chaque année au sein de cinq blocs régionaux.
Pour l'an prochain c'est au tour de l'Europe occidentale et d'un groupe d'autres Etats dont la Turquie, l'Australie et le Canada, qui doivent décider par consensus qui organisera l'événement.
Faute de décision, le sommet aura lieu à Bonn, en Allemagne, qui accueille le secrétariat de l'ONU Climat.
Or "je sais que l'Allemagne ne souhaite pas organiser cette COP", confie à l'AFP Jennifer Morgan, ancienne envoyée climatique de l'Allemagne. Selon elle, Berlin pousse les deux pays à trouver une solution.
Pendant ce temps, l'Éthiopie a été désignée mardi par les pays africains pour organiser la COP32 en 2027. Quel qu'il soit, le futur hôte de la COP31 aura peu de temps pour se préparer.
Les nations du Pacifique, qui co-organiseraient avec l'Australie en cas de victoire de Canberra, observent la situation avec inquiétude: "Plus nous serons fixés tôt, mieux ce sera - et espérons-le, ce sera en Australie", dit à l'AFP Vishal Prasad, membre de l'organisation Pacific Islands Students Fighting Climate Change.
Les îles du Pacifique sont particulièrement vulnérables au réchauffement climatique.