Européens sanctionnés par Washington : quel est cet arsenal européen sur la tech qui fait enrager les États-Unis
information fournie par Boursorama avec Media Services 24/12/2025 à 14:22

Dénonçant des actes de "censure", l'administration Trump a sanctionné cinq personnalités européennes engagées en faveur de la régulation de la tech et contre la désinformation, dont l'ancien commissaire européen Thierry Breton.

( AFP / JUSTIN TALLIS )

L'UE dispose de l'arsenal juridique le plus puissant au monde pour réguler le numérique, très critiqué par la Maison Blanche. Washington a notamment très mal pris l'amende de 2,95 milliards d'euros infligée par l'UE en septembre à Google pour abus de position dominante dans la publicité en ligne et celle de 120 millions d'euros dont a écopé en décembre, X, le réseau social du milliardaire Elon Musk, pour tromperie et manque de transparence.

• Haine en ligne, désinformation

Désinformation, haine en ligne, contrefaçons ou produits dangereux... Le règlement sur les services numériques (DSA) vise à protéger les utilisateurs européens en imposant aux plateformes des obligations et restrictions à la mesure de leur puissance.

Il oblige notamment les plateformes à:

- Mettre en place un système de signalement de contenus problématiques

- Agir "promptement" pour retirer tout contenu illicite

- Bannir le ciblage publicitaire des mineurs

Les très grandes plateformes, comme X, TikTok, Meta, Apple ou Google sont aussi sujettes à des règles supplémentaires. Ces entreprises doivent analyser les risques liés à leurs services en matière de diffusion de contenus illégaux, d'atteinte à la vie privée ou à la liberté d'expression, de santé ou de sécurité publique. Et mettre en place les moyens pour les atténuer (modération des contenus...). Elles doivent aussi fournir au régulateur et à des chercheurs agréés un accès à leurs algorithmes pour que le respect du règlement puisse être contrôlé.

Toute infraction à ce règlement peut-être très lourdement sanctionnée : les amendes peuvent atteindre jusqu'à 6% du chiffre d'affaires annuel . En cas de violations graves et répétées, les plateformes pourront être interdites d'exercer leur activité en Europe.

• Lutte contre les abus de position dominante

Le règlement sur les marchés numériques (DMA) vise lui à mettre fin à l'abus de position dominante des géants technologiques, comme Google, Apple, Facebook, Amazon ou Microsoft. L'objectif : protéger l'émergence et la croissance de start-up en Europe et améliorer le choix offert aux utilisateurs. Plusieurs règles très concrètes sont prévues à cet effet.

Les grandes plateformes ont tendance à "enfermer" les utilisateurs en les poussant à utiliser leurs services pré-installés : navigateur internet, cartographie, météo... Le DMA garantit la possibilité de désinstaller ces services intégrés par défaut et facilite le choix d'alternatives.

Les utilisateurs doivent pouvoir choisir les boutiques d'applications logicielles de leur choix et télécharger directement leurs applications sur les sites des fournisseurs, sans passer par les acteurs dominants : l'App Store d'Apple ou Google Play.

Les plateformes ont aussi interdiction de croiser des données collectées à travers différentes plateformes pour le ciblage publicitaire de leurs utilisateurs sans leur consentement -une pratique au cœur des modèles économiques de Google et Meta.

Pour éviter toute fragmentation du marché intérieur, le pouvoir de contrôle et de sanctions est confié à la Commission européenne qui a constitué une équipe d'experts comptant actuellement une centaine de personnes. Le règlement prévoit des amendes pouvant aller jusqu'à 10% du chiffre d'affaires mondial de l'entreprise , et même 20% en cas de récidive.

• RGPD et IA

Le règlement général sur la protection des données (RGPD) est l'une des législations européennes les plus contraignantes et les plus connues dans le secteur de la tech. Il impose notamment aux entreprises de demander le consentement des citoyens lorsqu'elles réclament leurs données personnelles, de les informer de l'usage qui en sera fait et de leur permettre de supprimer les données.

Ce texte, qui a donné lieu à de nombreuses amendes depuis son application en 2018, permet des sanctions allant jusqu'à 20 millions d'euros ou 4% du chiffre d'affaires mondial d'une entreprise.

L'UE s'est aussi dotée d'une ambitieuse loi en matière d'intelligence artificielle (AI Act), qui cible en particulier les systèmes à hauts risques dans la sécurité, la santé ou les droits fondamentaux, mais fait face à de nombreuses pressions, notamment américaines , pour en assouplir les règles et retarder sa mise en application.