En zone rurale, le "sentiment d'abandon" face aux fermetures d'agences bancaires information fournie par AFP 05/08/2025 à 07:13
Sur le marché de Riotord, le sujet est encore dans les conversations. L'unique agence bancaire de ce village de la Haute-Loire a fermé définitivement fin juillet, au regret des élus, d'habitants et de commerçants.
L'agence du Crédit Agricole dans ce village de 1.200 âmes, au sud de Saint-Etienne, baisse le rideau. 27 autres agences de ce groupe bancaire ont fermé cet été dans des zones rurales de la Loire et la Haute-Loire.
Un désengagement qui touche l'ensemble du territoire national depuis près de 20 ans et concerne tous les établissements bancaires. Entre 2006 et 2023, le nombre d'agences en France a baissé de 15%, passant de 39.500 à 33.500 selon la Banque centrale européenne (BCE).
Avec la généralisation du paiement électronique, la tendance est aussi la même pour les distributeurs automatiques de billets, dont 1.500 ont été supprimés en 2024, selon la Banque de France.
A Riotord, l'agence du Crédit Agricole n'ouvrait que deux matinées par semaine, mais désormais le retrait d’espèces "pour les personnes âgées, c’est compliqué, parce qu’elles n’ont pas de moyen de transport", pour retirer ailleurs, s'inquiète Stéphane Billard, qui vend des fruits et légumes sur le marché.
Guy Peyrard, le maire de Riotord, affirme se battre encore "pour le maintien du distributeur automatique de billets", "un service indispensable à la population", juge-t-il.
Mais la banque lui a dit "qu’il faudrait plusieurs dizaines de milliers de retraits par an pour justifier son coût de maintenance. S’il le faut, la commune mettra la main à la poche pour le conserver", avance l’élu.
Réunions publiques, pétitions, courriers... dans la Loire et la Haut-Loire, élus et habitants des communes concernées par les fermetures ont protesté.
Il y a eu "une levée de boucliers des maires qui n’ont pas été avertis par anticipation (…) qui ont été mis devant le fait accompli au cours de la première quinzaine de juillet", affirme Bernard Souvignet, président de l’Association des maires de France (AMF) pour la Haute-Loire.
- "Impact" sur le commerce -
"Tous font remonter que cela aura un gros impact sur les commerçants car l’argent qui est retiré dans leur commune est dépensé prioritairement sur place. Et si les gens doivent retirer ailleurs, ils auront tendance à dépenser l’argent dans ces autres communes", explique-t-il.
A La Ricamarie (Loire), dans la banlieue stéphanoise, la fermeture de l'agence du Crédit Agricole "provoque un sentiment d’abandon", selon Cyrille Bonnefoy, le maire de cette commune de 8.000 habitants, "déjà marquée socialement, avec des habitants qui ont une faible mobilité".
Une cliente, Valérie Kaleta-Bruyère, 56 ans, se dit "terriblement déçue par la méthode employée par la banque qui avait déjà fermé l’agence et déménagé en catimini le mobilier depuis plusieurs mois".
"Je suis en train de préparer un courrier leur annonçant que je vais fermer mon compte (…) j’en fais une question de principe", assure-t-elle.
À la tête du réseau d'agences du Crédit Agricole Loire/Haute-Loire, Antoine Paliard estime que "le regroupement des conseillers des plus petites agences leur permettra d’accorder plus de temps aux clients".
Plutôt que de maintenir une vingtaine de DAB comme le réclame des élus, la banque propose d’étendre les "Relais CA", qui offrent à ses clients la possibilité de retirer un peu d’argent liquide dans des commerces partenaires.
Il ajoute que trois camions-banque conduits par des conseillers bancaires effectuent aussi des tournées hebdomadaires dans des communes isolées, permettant d’effectuer les mêmes opérations que dans une agence.
A Montagny, village de 1.100 habitants dans la Loire, Claudine Burnichon, 43 ans, gère une supérette, et se dit "satisfaite" d’être aussi Relais CA depuis sept ans, "surtout au profit d’une clientèle d’habitués".
"La rémunération apportée par la banque (ndlr : 0,84 euro par opération) n’est pas élevée mais cela compense en général les commissions" liées à l’utilisation du terminal de paiement électronique (TPE). "Et cela réduit les dépôts d’espèces que je vais faire à Roanne", ajoute-t-elle.