Emirats, Libye... Comment les majors pétrolières produisent aux Etats-Unis mais payent leurs impôts ailleurs information fournie par Boursorama avec Media Services 24/10/2025 à 09:26
Une étude dressant le panorama des stratégies fiscales des mastodontes du secteur a été réalisée à partir des déclarations publiées depuis 2017 par onze entreprises américaines.
Les majors pétrolières américaines produisent la majorité de leurs hydrocarbures aux Etats-Unis mais payent plus d'impôts à l'étranger, du fait des exemptions et abattements dont elles bénéficient et qui ont augmenté depuis le début du deuxième mandat de Donald Trump, selon un rapport publié jeudi 24 octobre.
L'analyse, "les Etats-Unis et la planète en dernier: comment les Etats-Unis subventionnent l'extraction d'hydrocarbures à l'étranger", a été réalisée à partir des déclarations publiées depuis 2017 par onze entreprises américaines cotées du secteur pétrolier et gazier.
Des géants sous-taxés
Selon les données, ces groupes se voient imposer un taux effectif moyen de 12,1% par an, loin des 21% censés être le taux de l'impôt sur les sociétés dans le pays. Chevron est encore mieux lotie, avec un taux effectif de 7,9% Les Etats-Unis sont progressivement devenus les premiers producteurs mondiaux de gaz et pétrole mais, si les entreprises étudiées y extraient 51% de leur production, elles n'y ont payé que 18% des impôts versés au total. Parmi les exemples cités, le cas d'ExxonMobil est représentatif: le groupe a ainsi versé 11,5 milliards de dollars aux Emirats arabes unis entre 2023 et 2024, soit cinq fois le montant acquitté auprès du fisc américain durant la même période.
Son concurrent ConocoPhillips a de son côté versé deux fois plus d'impôts en Libye qu'aux Etats-Unis, alors que sa production américaine représente 70% de sa production totale.
Lobbying et ombre de la corruption institutionnalisée
"Le principal élément de notre rapport est que, en effet, ces entreprises sont très peu taxées. Elles sont même sous-taxées quelles que soient les données prises en compte", a expliqué pour l'AFP son auteur, Zorka Milin, de l'organisation non gouvernementale Financial Accountability and Corporate Transparency (Fact). "Ces politiques fiscales n'ont aucun sens économique, environnemental ou éthique. Il faut que le Congrès agisse pour combler les lacunes", a-t-elle ajouté.
Ces taux d'imposition faibles sont dus à un nombre important d'exemptions et règles spécifiques à l'industrie pétrolière et gazière, qui permettent à ces entreprises de soustraire à leurs impôts aux Etats-Unis les taxes déjà payées dans des pays étrangers, même ceux notoirement connus pour leur degré élevé de corruption.
L'industrie pétrolière et gazière américaine bénéficie d'exemptions et subventions depuis plus d'un siècle mais a su faire pression sur les législateurs pour renforcer ses exemptions avec le temps. Dernier exemple en date, ses entreprises ont ainsi dépensé 20 millions de dollars en activités de lobbying durant les six mois précédant l'adoption de la "Grande et belle loi" voulue par Donald Trump, qui a notamment détricoté les réformes portant sur l'impôt sur les sociétés et lancées durant le mandat de son prédécesseur, Joe Biden.