Congrès des régions à Saint-Malo : une relation compliquée avec Emmanuel Macron
information fournie par Boursorama avec Media Services 28/09/2023 à 14:26

Les rapports entre les présidents de régions et le chef de l'État connaissent un regain de tension à cause des récentes sorties de ce dernier sur les transports et les carburants. Tous les barons locaux déplorent une absence de dialogue.

Le président de la région Hauts-de-France Xavier Bertrand et le président de la République Emmanuel Macron, le 12 mai 2023 à Dunkerque. ( POOL / PASCAL ROSSIGNOL )

Réunis mercredi et jeudi à Saint-Malo (Ille-et-Vilaine) pour leur congrès annuel , les présidents de régions ont fait part de la dégradation de leurs relations avec Emmanuel Macron - qui n'ont jamais été sereines. Le pass rail ? "Ça n'a pas été travaillé". Les RER métropolitains ? "C'est une mauvaise blague". À l'abri des remparts de la cité corsaire, les élus ne retiennent pas leurs coups. Surtout le nordiste Xavier Bertrand, engagé depuis trois semaines dans une passe d'armes sur les carburants.

"Avec ce gouvernement, c'est souvent le bras de fer"

À tel point qu'Emmanuel Macron lui a renvoyé la balle, lui réclamant "une proposition pour baisser (son) budget", dont une fraction provient d'une taxe sur les carburants. Mais pas question pour les Hauts-de-France de renoncer à la ponction de 1,8 centime par litre d'essence, quand l'État capte un euro. Expérimenté, élu de droite rappelle qu'il finance déjà "un chèque carburant plus ambitieux" que l'aide de 100 euros reconduite en catastrophe par l'exécutif après l'abandon de la vente à perte "bricolée sur un coin de table".

Parole d'opposant plus que de partenaire. Cela est dans l'ordre des choses, puisque la quasi-totalité des provinces sont aux mains de la gauche ou de la droite , mais pas du camp présidentiel. D'autant que, chez certains, prospèrent des ambitions présidentielles. "Je préfèrerais le dialogue", se défend Xavier Bertrand, "mais avec ce gouvernement, c'est souvent le bras de fer", car "ils ne nous font pas confiance". Un pluriel superflu, tant les critiques ciblent systématiquement le chef de l'État. "Un jacobin" qui s'est "bâti sur un modèle d'homme providentiel", dénonce le Normand Hervé Morin. "Il n'a déjà pas confiance dans son gouvernement, pourquoi voudriez-vous qu'il fasse confiance aux collectivités ?"

Macron n'a jamais reçu tous les présidents de régions

De fait, depuis son accession à l'Élysée en 2017, "il n'a jamais reçu tous les présidents de région", regrette Carole Delga. L'occitane, qui représente les 18 grands élus locaux, juge que le président de la République - qui n'a jamais exercé d'autre mandat auparavant - "fait beaucoup d'erreurs liées à son inexpérience et à sa méconnaissance du terrain". Pour ne pas dire du "pays réel".

Tous pointent le paradoxe de cette controverse sur les carburants , à l'heure de la planification écologique. "Sur un plein de 100 euros, il y a un euro pour la région, ça n'est pas à la hauteur", relève le Breton Loïg Chesnais-Girard, qui souligne que "cette taxe sert à faire rouler les trains". L'équation est complexe, "on ne peut pas se permettre de s'invectiver les uns les autres", car "on est embarqués dans le même bateau", explique-t-il face au port.

"Main tendue" en vain à Borne

Évidemment, les régions aimeraient fixer le cap. Mais elles n'ont pas prise sur leurs ressources, et déplorent de concert une baisse des rentrées de TVA. "Si on nous prive de nos moyens, on ne pourra plus investir autant dans les transports", prévient Frank Leroy, président de la région Grand-Est. Arrivé en début d'année, il a vite pu constater le "dialogue de sourds" tant décrié. Comme sur ce "pass rail" annoncé durant l'été, "sans en parler une seule fois en préalable aux régions concernées". Pour "arrêter cette espèce de méfiance", il suffirait pourtant, selon lui, de "pas grand chose" : "quelques réunions par-ci, par-là, on ne me fera pas croire que ce n'est pas possible".

Les régions ont d'ailleurs demandé jeudi des "assises des transports" à la Première ministre Élisabeth Borne, venue clore leur congrès. "Nous vous tendons la main, saisissez-là", lui a lancé Carole Delga. En vain : la cheffe du gouvernement ne venait "pas faire de grandes annonces", seulement réaffirmer sa "volonté de construire ensemble". Mais difficile d'y croire, quand les régions "découvrent des annonces qui pèsent sur leurs finances à travers des vidéos sur YouTube", a fustigé le président du Sénat Gérard Larcher, qui juge qu'"on ne peut pas continuer à travailler ainsi". D'ailleurs, la moitié des présidents n'étaient pas - ou plus - présents pour écouter la cheffe du gouvernement.