Budget: Bayrou présente l'addition, les boucliers se lèvent déjà
information fournie par AFP 15/07/2025 à 12:56

Le Premier ministre français François Bayrou assiste à un discours à l'Hôtel de Brienne à Paris, le 13 juillet 2025 ( POOL / Ludovic MARIN )

Le Premier ministre, François Bayrou, dévoile mardi à 16H00 les grandes orientations du budget 2026, un casse-tête financier et politique visant 40 milliards d'euros d'économies, en plus d'augmenter le budget des armées, et qui soulève déjà une levée de boucliers des oppositions.

Résoudre l'équation paraît relever de l'exploit mathématique, tant les marges de manœuvre financières sont réduites.

Objectif: ramener le déficit à 4,6% du PIB l'an prochain, contre 5,8% en 2024. Le tout dans un contexte international inflammable, entre tensions commerciales et militaires, ce qui a conduit Emmanuel Macron à demander dimanche un effort additionnel de 3,5 milliards d'euros pour la défense.

Le chef de l'Etat a fait néanmoins pression sur le Parlement pour qu'il vote le budget "en heure", expliquant qu’une censure à l'automne comme l'an dernier "décalerait" les crédits notamment pour les armées.

Le ministre français de l'Economie Eric Lombard (g) s'entretient avec le Premier ministre français François Bayrou après le conseil des ministres hebdomadaire au palais de l'Elysée à Paris, le 2 juillet 2025 ( AFP / Ludovic MARIN )

Le Premier ministre a promis auprès de l'AFP de ne laisser aucune "poussière" de dépenses "sous le tapis". Mais, politiquement, son socle de soutiens paraît plus friable que jamais.

Chacun sur l'échiquier posait, avant même cette présentation, ses lignes rouges.

Au Rassemblement national, qui se place en arbitre de la censure après avoir renversé le gouvernement Barnier en décembre, le député et membre de la direction du parti, Jean-Philippe Tanguy, a promis de renverser le gouvernement en cas de hausse d'impôts, voire de gel budgétaire ("année blanche"), une autre manière selon lui "de piquer de l'argent aux gens".

Le rendement de cette année blanche, qui consiste à reconduire à l'identique certaines dépenses sans tenir compte de l'inflation, varie selon le périmètre retenu. Elle pourrait s'étendre au barème de l'impôt sur le revenu, voire mettre à contribution les retraités.

- "Sur un fil" -

Du côté de La France insoumise, l'année blanche serait "une année rouge pour les Français" et "les mêmes causes produiront les mêmes effets", a estimé le coordinateur du mouvement Manuel Bompard, qui avait voté aussi la censure en décembre.

Pour le député socialiste Philippe Brun, "ce qui serait inacceptable", c'est que "les plus riches (...) soient totalement exemptés d'efforts".

François Bayrou (G) avec le ministre des Armées Sébastien Lecornu (D) lors du défilé du 14 juillet 2025, à Paris ( POOL / MOHAMMED BADRA )

La gauche rêve d'obtenir une taxe inspirée par l'économiste français Gabriel Zucman sur les "ultra-riches", en prélevant 2% par an de leur patrimoine, pour un rendement annuel de 20 milliards d'euros. Mais le camp macroniste n'en veut pas.

La patronne de la CGT, Sophie Binet, a invité le gouvernement à aller "chercher l'argent là où il est, à savoir dans la poche des actionnaires, des rentiers, des plus riches".

Autant dire que François Bayrou, qui s'exprimera à 16H00 pendant 45 minutes lors d'une conférence de presse, avant certains de ses ministres (Eric Lombard, Catherine Vautrin, Amélie de Montchalin, François Rebsamen et Astrid Panosyan-Bouvet), infographies à l'appui, marche sur un fil. Plusieurs chefs de groupes parlementaires ont été invités.

Le ministre de l'Economie, Eric Lombard, assurera le service après-vente au 20H00 de France 2.

Le Premier ministre décline sur tous les registres le "piège mortel" qui guette le pays, face au mur de la dette qui a atteint 114% du PIB en mars, un combat dont il a fait son ADN politique et dont la dramatisation vise à ce que la note, qui s'annonce salée, soit mieux acceptée.

Il promet "un plan cohérent, suffisamment précis, même s'il restera à finaliser avec le Parlement, pour que tout le monde mesure la part que chacun doit prendre à cet effort".

- Deux volets -

Avec "deux volets": l'un tourné vers "un retour à un équilibre supportable des finances publiques". Et l'autre de "soutien à la production".

M. Bayrou, qui a présenté vendredi ses intentions à Emmanuel Macron et devait le revoir ce mardi en fin de matinée, a promis "des efforts ici ou là" en matière de fiscalité mais pas de hausse d'impôts généralisée. La contribution pour les hauts revenus instaurée l'an dernier devrait être remodelée et reconduite, selon une source ministérielle.

L'Etat dans son ensemble devra se serrer la ceinture, ainsi que les collectivités.

Des coups de rabot sont aussi évoqués dans les niches fiscales, les aides publiques aux entreprises ou encore chez les opérateurs de l'Etat.

Suscitant déjà la controverse, un nouveau durcissement des règles de l'assurance chômage se profile, alors que M. Macron compte financer l'effort militaire par "plus de production et plus d'activité". De quoi raviver les spéculations autour d'un relèvement du temps de travail ou la suppression de jours fériés.

D'autres gisements d'économies ont été identifiés sur la facture des transports médicalisés, des affections de longue durée (ALD) ou des arrêts maladie.