Boxe: L'équipe de France féminine privée de Mondiaux sur fond d'imbroglio autour des tests de féminité information fournie par Reuters 04/09/2025 à 14:32
L’équipe de France féminine de boxe ne participera pas aux premiers Mondiaux organisés par World Boxing à Liverpool, au Royaume-Uni, n’ayant pas reçu à temps les résultats des tests génétiques de sexe désormais obligatoires, a annoncé jeudi la Fédération française de boxe (FFBoxe).
"C’est avec stupéfaction et indignation que le staff de l’équipe de France a appris, ce mercredi soir, que les boxeuses françaises ne pourraient pas participer aux premiers championnats du monde organisés par World Boxing", a annoncé la FFBoxe dans un communiqué publié jeudi matin.
Depuis fin mai, World Boxing, la fédération internationale reconnue à titre provisoire par le Comité international olympique (CIO), a instauré des tests génétiques obligatoires pour déterminer le sexe et l'éligibilité à concourir dans ses compétitions.
Ces tests "ne peuvent être [entrepris] qu’à des fins médicales, de recherche scientifique ou (…) dans la lutte contre le dopage", explique le ministère des Sports, cité par la FFBoxe dans son communiqué.
"Le cas d’espèce visant à vérifier l’éligibilité des athlètes en application d’un critère de sexe génétique ne relève, a priori, d’aucune de ces finalités. Sa réalisation serait donc interdite en droit français", poursuit le ministère.
La FFBoxe explique avoir informé World Boxing qui l’a orientée vers un laboratoire à Leeds, à environ 120 km au nord-est de Liverpool, avec "l’assurance, toujours selon World Boxing, d’obtenir des résultats dans les délais impartis", ajoute le communiqué.
"Or, malgré les garanties réitérées par World Boxing, le laboratoire, qu’elle nous avait elle-même recommandé après s’être assurée qu’il était en capacité de répondre à notre demande, n’a pas été en mesure de nous livrer les résultats des examens dans les temps", a déclaré la FFBoxe.
"Avec, comme conséquence, l’exclusion de nos athlètes ainsi que d’autres boxeuses de délégations étrangères qui se sont retrouvées, elles aussi, piégées."
Les cinq boxeuses tricolores sélectionnées ne figurent pas dans les tableaux de compétition dévoilés mercredi soir.
La boxeuse française Maëlys Richol (-65 kg) a exprimé sa colère sur Instagram.
"Après une année entière de travail, nous nous retrouvons écartées non pas pour une question sportive, mais à cause d'une gestion désastreuse et injuste", a-t-elle écrit. "C'est extrêmement dur à encaisser. Nous sommes frustrées, en colère, et profondément déçues."
"INADMISSIBLE"
World Boxing a déclaré dans un communiqué "ne pas commenter les cas individuels" et estimé "très décevant pour les boxeurs que certaines fédérations nationales n'aient pas été en mesure de terminer ce processus à temps", avant de préciser les informations que la fédération internationale dit avoir transmises aux fédérations nationales le 21 août dernier.
"Cette note précisait : « Remarque : les résultats des tests de vérification du sexe peuvent prendre 48 heures. Tout test effectué après le 1er septembre compromettrait la participation de votre athlète au tirage au sort officiel et à la compétition. Veuillez tenir compte de votre heure d'arrivée au Royaume-Uni si vous devez vous soumettre à un test de sexe au Royaume-Uni", a expliqué World Boxing.
"World Boxing et ses partenaires ont travaillé avec plusieurs fédérations nationales au cours des trois dernières semaines afin de faciliter l'accès aux centres de test dans plusieurs endroits en Grande-Bretagne, et de nombreux boxeurs qui participent à la compétition ont été testés via ce processus."
Dans une déclaration transmise à Reuters, la ministre des Sports Marie Barsacq a jugé "ce qu'il s'est passé (...) inadmissible".
"Le laboratoire recommandé par l'organisateur des Mondiaux n'a pas transmis les résultats des tests génétiques à temps pour valider leur participation", a-t-elle ajouté. "J'adresserai dans la journée un courrier à World Boxing à qui je demande de faire toute la lumière sur les raisons qui ont abouti à cet imbroglio. L'absence de la France affaiblit l’intérêt sportif de ces Championnats du monde."
Mercredi soir, sur son compte Instagram, la championne olympique 2016 Estelle Mossely, dont la liste pour l'élection à la présidence de la FFBoxe avait été invalidée le mois précédant le scrutin de décembre dernier, a fustigé une "catastrophe sportive".
"C'est une faute professionnelle de la part des personnes en charge des athlètes", a-t-elle estimé. "Comment peut-on faire de telles erreurs à ce niveau là ? Les conséquences sont trop importantes. Le responsable doit démissionner."
"La FFBoxe ne peut pas continuer de fermer les yeux. Elle ne peut pas continuer de cautionner l'échec de l'équipe femmes à cause de certains responsables pourtant toujours maintenus à leur poste", a-t-elle ajouté.
La FFBoxe a cependant réfuté toute négligence dans son communiqué : "En dépit des allégations déplacées de certains qui se plaisent à vouloir rejouer l’élection fédérale, ce dysfonctionnement, qui porte un préjudice notoire à nos athlètes, n’est donc aucunement imputable à la Fédération française de boxe, laquelle n’est coupable d’aucune négligence."
Le président de la FFBoxe Dominique Nato s'est défendu et a regretté "une trahison", dans un entretien à L'Equipe.
"Le laboratoire s'était engagé à communiquer les résultats dans les délais impartis", a-t-il déclaré. "C'est un manque de professionnalisme de World Boxing qui est une jeune fédération, qui n'a pas encore chaque personne à la bonne place. Il n'y avait pas besoin de se précipiter à mettre ces tests sans en mesurer la portée. Je suis dépité pour les filles, les entraîneurs, les clubs."
"Je veux bien assumer mes responsabilités, mais, derrière, on me trahit", a-t-il conclu.
(Rédigé par Vincent Daheron, édité par Blandine Hénault et Augustin Turpin)