Birmanie: les élections de la junte débutent après cinq ans de guerre civile
information fournie par AFP 28/12/2025 à 08:19

Des électeurs font la queue dans un bureau de vote à Rangoun, le 28 décembre 2025 ( AFP / Lillian SUWANRUMPHA )

Des élections législatives, largement restreintes et critiquées à l'international, ont débuté dimanche en Birmanie à l'initiative de la junte au pouvoir, qui les présente comme un retour à la démocratie, près de cinq ans après avoir renversé le gouvernement et déclenché une guerre civile.

L'élection est "libre et équitable", a assuré le chef de la junte, Min Aung Hlaing, après avoir voté de bonne heure dans la capitale administrative du pays, Naypyidaw. "Elle est organisée par l'armée, nous ne pouvons pas laisser ternir notre nom."

L'ancienne dirigeante et prix Nobel de la paix Aung San Suu Kyi est pourtant toujours emprisonnée et son parti a été dissous après le coup d'Etat militaire de février 2021, qui a refermé la parenthèse démocratique dans le pays.

De nombreux pays occidentaux et défenseurs des droits humains ont condamné ce scrutin, échelonné sur un mois, dénonçant notamment la répression de tout semblant d'opposition.

"Il est essentiel que l'avenir de la Birmanie soit déterminé par un processus libre, équitable, inclusif et crédible, qui reflète la volonté de son peuple", a commenté dans un communiqué le bureau birman de l'ONU.

Le Parti de l'union, de la solidarité et du développement (USDP), favorable aux militaires, devrait arriver largement en tête, ce que les critiques considèrent comme un moyen détourné de pérenniser le régime militaire.

- "De mon plein gré" -

Peuplée d'environ 50 millions d'habitants, la Birmanie est déchirée par une guerre civile et les élections ne se tiendront pas dans les larges zones tenues par les rebelles.

"Cette élection ne changera pas la situation politique du pays", a estimé Hman Thit, 23 ans, depuis l'une de ces zones dans l'Etat Shan. "Les frappes aériennes et les atrocités continueront".

La première des trois phases du scrutin s'est tout de même ouverte dimanche à 06H00 (23H30 GMT samedi), notamment à Rangoun, Mandalay et Naypyidaw, des villes aux mains du pouvoir.

"L'élection est très importante et apportera le meilleur au pays", a dit à l'AFP Bo Saw, le premier électeur à se présenter à l'aube dans un bureau du quartier de Kamayut à Rangoun, près de la maison d'Aung San Suu Kyi.

Des véhicules de police patrouillent près d'un bureau de vote à Rangoun, le 28 décembre 2025 ( AFP / Lillian SUWANRUMPHA )

Dans le canton de Zabuthiri, près de la capitale, Thida Hlaing, une femme au foyer de 56 ans, a fait la queue en matinée avec trois membres de sa famille pour "accomplir (son) devoir" de citoyenne.

"Je suis venue de mon plein gré", a-t-elle racontée, fière de montrer son auriculaire taché d'encre, avec lequel elle a apposé son empreinte au moment de voter. "Ce que je veux, c'est un pays pacifique et stable".

- Prison -

L'armée dirige la Birmanie depuis son indépendance en 1948, en dehors d'un interlude démocratique entre 2011 et 2021, qui avait suscité une vague de réformes et d'optimisme pour l'avenir du pays d'Asie du Sud-Est.

Mais quand la Ligue nationale pour la démocratie (LND) d'Aung San Suu Kyi a largement devancé les candidats proches des militaires aux élections de 2020, le général Min Aung Hlaing s'est emparé du pouvoir, invoquant une fraude électorale généralisée.

Agée de 80 ans, Aung San Suu Kyi purge une peine de 27 ans de prison pour plusieurs condamnations allant de la corruption à la violation de règles anti-Covid.

"Je ne pense pas qu'elle considérerait ces élections comme significatives, pas du tout", a déclaré son fils, Kim Aris, depuis la Grande-Bretagne.

Une femme montre son doigt encré après avoir voté à Rangoun, le 28 décembre 2025 ( AFP / Lillian SUWANRUMPHA )

Selon le Réseau asiatique pour des élections libres, les noms des partis qui avaient remporté 90% des sièges lors des dernières élections ne figurent pas cette fois sur les bulletins de vote après avoir été dissous par la junte.

La deuxième phase du scrutin, qui ne pourra pas se tenir dans environ une circonscription sur cinq de la chambre basse, doit avoir lieu dans deux semaines, avant une troisième et dernière phase le 25 janvier.