Aux Etats-Unis, la vaccination des nouveaux-nés contre l'hépatite B sur la sellette information fournie par AFP 04/12/2025 à 04:16
Des experts nommés par le ministre de la Santé vaccinosceptique de Donald Trump Robert Kennedy Jr. se penchent jeudi sur la vaccination des nouveaux-nés contre l'hépatite B, qu'ils envisagent de reporter contre l'avis de nombre de médecins.
Ce groupe, qui se réunit pour deux jours de discussions à Atlanta, dans le sud-est des Etats-Unis, avait déjà modifié à la marge en septembre des recommandations vaccinales sur le Covid-19 et la rougeole, et pourrait cette fois décider de remaniements plus conséquents.
Désormais composé de personnalités choisies par le ministre et pour beaucoup critiqués par le milieu scientifique pour leur manque d'expertise dans le domaine, ce Comité consultatif sur les pratiques de vaccination (ACIP) a initié un vaste réexamen de la sûreté de plusieurs vaccins, dont certains utilisés depuis des décennies.
Une initiative qui inquiète la communauté médicale américaine, qui craint une démarche visant à restreindre les accès aux vaccins, alors même que les taux de vaccination du pays évoluent à la baisse depuis la pandémie et font craindre le retour de maladies contagieuses mortelles, comme la rougeole, qui a fait en 2025 plusieurs morts.
"Tout changement qu'apportera l'ACIP ne sera assurément pas fondé sur des faits ou des preuves, mais plutôt sur une idéologie", prévient ainsi Sean O'Leary, spécialiste en maladies infectieuses et pédiatrie, qui dénonce le manque de qualification des nouveaux membres.
- Premières 24 h -
Auparavant routinières, ses réunions ont pris une importance nouvelle dans ce contexte hautement politique, d'autant que le groupe prévoit de se prononcer cette fois sur la vaccination contre l'hépatite B, recommandée dans le pays depuis 1991 pour les nouveaux-nés, mais décriée par des groupes antivax ainsi que par l'administration Trump.
Le président américain lui-même, coutumier des assertions sans fondement scientifique, avait ainsi assuré en septembre qu'il n'y avait "aucune raison" de vacciner un nouveau-né dans ses premières 24 heures de vie car "l'hépatite B se transmet par voie sexuelle", et avait suggéré "d'attendre que le bébé ait 12 ans et soit bien développé".
Des propos condamnés par la communauté médicale, qui rappelle que les nouveaux-nés peuvent être notamment contaminés par leur mère lors de la grossesse ou l'accouchement. Elle a aussi averti que tout report, même de quelques semaines, conduirait certainement à une baisse des taux de vaccination.
Et ce alors qu'une analyse de plus de 400 études publiée cette semaine par une équipe de chercheurs de l'université du Minnesota conclut en une absence d'éléments soutenant le bénéfice d'un tel report.
- "Plus confiance" -
L'hépatite B est une maladie virale du foie qui peut se transmettre par voie sexuelle et par le sang et expose les personnes touchées à un risque élevé de décès par cirrhose ou cancer du foie. Or "ce sont des morts tout à fait évitables", insiste M. O'Leary.
Les recommandations formulées par le comité sont traditionnellement suivies par les autorités fédérales et dictent notamment la prise en charge ou non des vaccins par certaines assurances et programmes de vaccinations. Un détail qui compte dans un pays où le prix d'un seul vaccin peut s'élever à plusieurs centaines de dollars.
Néanmoins, le poids du comité s'est considérablement affaibli ces derniers mois, après que plusieurs institutions scientifiques américaines et Etats dirigés par l'opposition démocrate ont annoncé cesser de suivre ses recommandations.
"Les États forment leurs propres comités consultatifs parce qu'ils ne font confiance à rien de ce qui se passe sous la houlette de Robert Kennedy Jr", explique le pédiatre infectiologue américain Paul Offit auprès de l'AFP.
Le ministre, qui relaie de longue date des théories complotistes sur les vaccins, a en effet initié une profonde refonte des agences sanitaires américaines, limogeant à tour de bras des experts réputés et coupant des financements pour le développement de vaccins.
Et pourrait aller encore plus loin en réformant les procédures d'approbation des vaccins aux Etats-Unis, selon un document interne de l'Agence du médicament ayant fuité il y a quelques jours.