Aurélia doit-elle débloquer son PER pour acheter sa résidence principale?
information fournie par Le Particulier 26/10/2025 à 10:00

Aurélia hésite à débloquer son PER pour acheter sa résidence principale: quel arbitrage entre apport immobilier immédiat et capital retraite future? ( crédit photo : Getty Images )

Aurélia, 32 ans, est active depuis ses 18 ans. Elle voudrait acheter son premier appartement. Elle pèse le pour et le contre : vaut-il mieux faire un prêt bancaire ou familial, ou débloquer son Plan d’Épargne Retraite (PER) pour constituer un apport ? Quels montants, quelles règles et quelle fiscalité ?

Sommaire:

  • Aurélia et son projet: l’épargne au cœur du choix

  • PER: principe et fiscalité attractive

  • Une stratégie d’investissement adaptée à son profil de risques

  • Déblocage anticipé: une exception pour l’achat de la résidence principale

  • Le jeu en vaut-il vraiment la chandelle?

  • Stratégie mixte choisie par Aurélia: le retrait partiel de son PER
  • Les points de vigilance: Aurélia doit y rester attentive

Aurélia et son projet: l’épargne au cœur du choix

Aurélia, 32 ans, vit depuis plusieurs années dans un petit studio lumineux niché au 5ème étage d’un immeuble du centre-ville de Limoges, où elle a toujours vécu. Elle travaille depuis ses 18 ans dans la restauration. A 20 ans, elle a reçu un capital de 10.000 euros de la part de sa grand-mère, qu’elle a placé sur un PER (Plan épargne retraite). Un contrat qu’elle a ensuite alimenté, modestement mais patiemment, mois après mois. Grâce à l’effet de capitalisation, elle dispose désormais d’une épargne de 48.000 euros.

Depuis ses 20 ans, Aurélia s’est répété qu’avec 50.000 euros, elle achèterait un appartement. Proche de l’objectif, elle se met en ordre de bataille pour réfléchir aux meilleures options pour elle, à la fois en termes de sécurité financière, de confort de vie et d’investissement patrimonial.

PER: principe et fiscalité attractive

Le PER est un produit conçu pour aider les particuliers à se constituer un capital en vue de compléter leurs revenus à la retraite. À la différence d’un livret classique ou d’un compte-titres, le PER est pensé sur le long terme, avec un horizon d’épargne de plusieurs décennies. En effet, par principe, les fonds placés sont bloqués jusqu’à l’âge de départ à la retraite.

L’atout majeur du PER réside dans les avantages fiscaux qu’il propose. Lorsque vous détenez un PER, les versements d’argent que vous y faites sont déductibles de vos revenus imposables. Par ailleurs, au moment d’un retrait d’argent (on parle aussi de rachat) partiel ou total, les sommes issues de vos versements sont exonérées d’impôt sur le revenu. Les plus-values réalisées sont soumises aux prélèvements sociaux (17,2%).

Exemple
Aurélia ne connaît rien aux marchés financiers mais elle aime le risque. Dans le cadre de la gestion déléguée de son contrat, elle a donc opté pour une gestion dynamique. Un professionnel s’occupe de gérer et de faire fructifier son épargne sur les marchés financiers. Avec le recul, elle a bien fait: sur ces 12 dernières années de détention de son contrat, elle a bénéficié d’un taux de rendement moyen de ses placements de 3,8%. Autrement dit, sur les 21.600 euros qu’elle a placés elle-même depuis l’ouverture de son PER, Aurélia a généré environ 5200 euros de plus-value. Quant aux 10.000 euros de sa grand-mère, ils ont permis de dégager plus de 55000 euros de gains.

Exemple
Aurélia a mis chaque mois 150 euros sur son PER, soit 1800 euros par an. Elle a pu donc déduire ces 1800 euros de ses revenus déclarés, chaque année. Or, comme elle est soumise depuis toujours au taux marginal d’imposition (TMI) de 11%, elle a économisé chaque année 198 euros d’impôts, soit environ 2380 euros depuis ses 12 ans de détention.

Une stratégie d’investissement adaptée à son profil de risques

Le capital placé sur un PER peut être investi dans différents supports financiers, regroupés au sein de deux familles principales:

- Les fonds en euros: ce sont des supports sécurisés, garantis en capital par l’assureur. Chaque année, les intérêts versés s’ajoutent au capital et deviennent acquis définitivement (effet cliquet).

Le rendement est modeste mais la sécurité prime. Ces fonds conviennent aux épargnants proches de la retraite ou à ceux privilégiant la stabilité.

- Les Unités de Compte (UC): ici, pas de garantie en capital. La valeur de l’épargne évolue en fonction des marchés. Les UC regroupent une grande diversité de supports: des fonds actions (investis en Bourse, plus risqués mais potentiellement plus rentables à long terme), des fonds diversifiés (mélange d’actions, d’obligations, d’immobilier), des fonds thématiques (santé, climat, technologie…), des fonds solidaires (une partie des actifs financent des projets à impact social ou environnemental). Cette ouverture permet d’espérer de meilleures performances mais implique d’accepter une volatilité, donc un risque de pertes temporaires.

Cette diversité offre la possibilité de construire une stratégie d’investissement adaptée à son profil de risque et à ses objectifs: un jeune actif comme Aurélia peut se permettre un profil dynamique avec une forte part d’actions. Dans tous les cas, une épargne de long terme permet de bénéficier pleinement de l’effet des intérêts composés et de la capitalisation.

Déblocage anticipé: une exception pour l’achat de la résidence principale

Le PER est initialement bloqué jusqu’à la retraite mais la loi prévoit des cas de déblocage anticipé, le plus courant étant l’achat ou la construction de la résidence principale. Dans ce cas, tout ou partie de l’épargne peut être mobilisée, sans clôture obligatoire du contrat. L’achat du logement doit bien être destiné à être la résidence principale, pour une primo-accession ou l’acquisition d’un logement en état futur d’achèvement. Enfin, le capital versé (hors gains) est exonéré d’impôt sur le revenu lors du déblocage pour résidence principale. Les plus-values sont soumises aux prélèvements sociaux (17,2%). Cette possibilité transforme le PER, a priori illiquide, en une option de financement flexible pour les primo-accédants.

À noter

Dans notre exemple, Aurélia peut donc tout à fait sortir tout ou partie de son capital pour constituer un apport immobilier. Si elle sortait tout son argent, elle aurait à payer 17,2% de prélèvements sociaux sur les 16.200 euros de gains générés sur son contrat, soit 2786 euros. Sur les 48.000 euros affichés sur son PER, Aurélia en récupérerait donc déjà 45.214 euros. Toutefois, le capital versé (21.600 euros) est taxable à l’IR lors du déblocage anticipé pour achat de la résidence principale, selon le barème progressif. Pour Aurélia et son taux de 11%, environ 2376 euros sont à déduire. Elle s’éloigne donc de l’objectif de 50.000 euros pour passer le cap de l’achat immobilier.

Le jeu en vaut-il vraiment la chandelle?

En débloquant l’intégralité de son PER tout de suite, Aurélia disposerait d’un apport confortable pour pouvoir acheter un appartement à 200.000 euros, frais d’agence compris. Avec un crédit de 152.000 euros (200 000 euros - 48 000 euros) à un taux de 4% sur 20 ans, elle n’aurait plus que 900 euros par mois à payer (contre 1215 euros sans apport). Cela lui permet d’économiser plus de 80.000 euros d’intérêts et de frais bancaires, sur 20 ans.

Des chiffres encourageants, mais à comparer aux gains fiscaux futurs perdus. Car si Aurélia vide aujourd’hui son PER, elle renonce à deux leviers puissants:

- La déduction fiscale des versements futurs: si elle continue à placer 150 euros par mois sur son PER, elle continue aussi de pouvoir déduire 1800 euros par an de ses revenus et donc économiser 198 euros par an, soit 3960 euros sur 20 ans.

- L’effet boule de neige de la capitalisation: avec 58.000 euros sur un PER à 3,5% par an pendant 20 ans, le montant total accumulé atteint plus de 115.000 euros. En prenant en compte ses 150 euros par mois, soit 36.000 euros sur 20 ans, elle disposerait de 167.000 euros à la fin!

En d’autres termes, si l’économie immédiate réalisée sur son crédit immobilier est tangible, le manque à gagner sur son avenir patrimonial l’est tout autant. Le vrai dilemme est là: faut-il privilégier la sérénité financière d’aujourd’hui ou la constitution d’un capital retraite solide demain?

Stratégie mixte choisie par Aurélia: le retrait partiel de son PER

Aurélia n’est pas obligée de débloquer l’intégralité de son PER. Une solution équilibrée consiste à ne retirer qu’une partie de son épargne, par exemple 30.000 euros, pour constituer un apport significatif tout en laissant le reste fructifier dans son plan. Elle y gagne ainsi sur deux tableaux. Une réduction sensible du capital emprunté et donc de ses mensualités, mais aussi la possibilité de conserver une réserve financière destinée à sa retraite, en croissance continue grâce à l’effet de la capitalisation et aux avantages fiscaux attachés au PER.

Cette stratégie présente plusieurs atouts. En diminuant son besoin de financement, Aurélia réduit mécaniquement sa charge de crédit et les intérêts payés à la banque. Dans le même temps, elle garde un pied dans la préparation de son avenir, en maintenant une partie de son capital investi sur un support restant fiscalement avantageux. Seule la part débloquée est soumise aux prélèvements sociaux sur les plus-values, optimisant ainsi la fiscalité globale de l’opération.

Les points de vigilance: Aurélia doit y rester attentive

Il existe néanmoins des points de vigilance. Pour bénéficier de l’exonération d’impôt, l’achat doit concerner une résidence principale, condition incontournable. Il faut aussi mesurer l’impact à long terme d’un retrait anticipé: débloquer aujourd’hui 30.000 à 45.000 euros représente autant de capitalisation perdue, soit potentiellement plusieurs dizaines de milliers d’euros de manque à gagner au moment de la retraite. Le choix doit donc être éclairé par une comparaison fine entre le coût du crédit, réduit grâce à l’apport, et le rendement attendu du PER si les fonds restaient investis. Enfin, il ne faut pas négliger les frais annexes liés à l’acquisition: notaire, assurance, frais de dossier bancaire, pouvant rogner les bénéfices attendus.

En définitive, l’arbitrage partiel apparaît souvent comme la meilleure voie pour concilier projet immobilier et préparation de la retraite. Aurélia peut ainsi réaliser son rêve d’accession à la propriété tout en continuant à bâtir, sur le long terme, un capital retraite fiscalement optimisé.