Apple pourrait devoir rembourser 13 milliards d'euros à l'Irlande information fournie par Boursorama avec Media Services 09/11/2023 à 15:14
Le géant californien avait gagné en première instance, dans ce litige qui dure depuis 2016. Mais la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) devrait contraindre Apple à rendre ces rabais fiscaux.
C'est un revers pour Apple. Dans un avis non contraignant mais généralement suivi par les juges, l'avocat général de la Cour recommande, jeudi 9 novembre, que soit rejugé ce litige. Ce qui remet en cause la victoire obtenue par le géant américain en première instance. La cour basée à Luxembourg devra dire dans les prochains mois si elle suit ou non cet avis.
L'affaire oppose depuis sept ans le fabricant de l'IPhone à la Commission européenne. Elle remonte à 2016, quand Bruxelles avait ordonné au géant américain de rembourser 13 milliards d'euros à l'Irlande, y voyant un rabais fiscal assimilable à une aide d'État illégale. Cette somme correspond aux bénéfices tirés d'un traitement fiscal favorable entre 2003 et 2014, dans ce pays où Apple avait rapatrié l'ensemble de ses revenus engrangés en Europe - ainsi qu'en Afrique, au Moyen-Orient et en Inde -.
0,005% d'impôts en Irlande en 2014
Le Tribunal de l'UE avait annulé cette décision de la Commission européenne en 2020. Mais celle-ci avait ensuite formé un pourvoi auprès de la CJUE. "Dans ses conclusions, l'avocat général Giovanni Pitruzzella propose à la Cour d'annuler l'arrêt et de renvoyer l'affaire devant le Tribunal afin que celui-ci se prononce à nouveau sur le fond", indique la Cour jeudi. Selon l'avocat général, "le Tribunal a commis plusieurs erreurs de droit" et il est "nécessaire" qu'il "effectue une nouvelle appréciation".
Lors d'une audition devant la cour en mai, l'avocat de l'exécutif européen, Paul-John Loewenthal, avait justement plaidé une "violation de la procédure" et "de nombreuses autres erreurs juridiques" par le Tribunal de l'UE. Il avait estimé que la filiale irlandaise d'Apple avait réglé un taux d'imposition effectif sur ses bénéfices européens "allant de 1% en 2003 à 0,005% en 2014".
Dernière instance
Me Loewenthal avait cité la direction d'Apple, qui avait qualifié elle-même, devant le Sénat américain, les avantages fiscaux accordés par Dublin d'"incitations à l'investissement équivalant à des aides d'État". L'avocat d'Apple, Daniel Beard, avait martelé que le groupe n'avait obtenu "aucun traitement de faveur" en Irlande et qu'il n'y avait "pas eu d'aide d'État". Selon lui, le groupe de Cupertino (Californie) a payé en Irlande les impôts dus sur ses bénéfices générés dans le pays, conformément aux règles fiscales de Dublin.
La CJUE est la cour de dernière instance. Elle ne se prononce pas sur le fond, mais seulement sur les questions de droit. Elle pourra décider de confirmer ou bien d'annuler en tout ou partie la décision de première instance, ou encore décider de renvoyer l'affaire devant le Tribunal de l'UE, comme le recommande l'avocat général.
Revers face à d'autres multinationales
Apple n'a pas commenté cet avis, mais rappelle le jugement de première instance qui lui était favorable. "La décision du Tribunal était très claire : Apple n'a bénéficié d'aucun avantage sélectif ni d'aucune aide d'État, et nous pensons que cette décision doit être confirmée", indique le groupe dans un communiqué. Concernant la réaction de Dublin, "la position de l'Irlande a toujours été, et reste, que le montant correct de l'impôt irlandais a été payé et que l'Irlande n'a fourni aucune aide d'État à Apple. Nous attendons maintenant l'arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne sur cette question", indique le ministre irlandais des Finances Michael McGrath.
La Commission européenne rappelle de son côté qu'elle ne commente pas les affaires judiciaires en cours. Bruxelles bataille face à des multinationales dans plusieurs dossiers fiscaux du même type. L'UE a notamment subi des revers devant la justice européenne face à Fiat (groupe Stellantis ), Amazon et Starbucks, dans des litiges au Luxembourg et aux Pays-Bas.