Alassane Ouattara réélu président de la Côte d'Ivoire avec un score fleuve information fournie par AFP 27/10/2025 à 21:13
Alassane Ouattara a été réélu lundi président de la Côte d'Ivoire, un quatrième mandat obtenu sur un score écrasant, après un scrutin privé des deux principales figures de l'opposition et boudé par la moitié des électeurs.
M. Ouattara, 83 ans, qui affrontait quatre opposants de faible poids politique, a obtenu 89,77% des suffrages, selon les résultats provisoires proclamés par la Commission électorale indépendante (CEI).
La participation, qui s'élève a 50,1%, est le reflet du désintérêt pour le scrutin d'une partie des 8,7 millions d'Ivoiriens appelés aux urnes samedi, dans ce pays premier producteur mondial de cacao et pôle de stabilité dans une région troublée par les putschs et les attaques jihadistes.
Les zones du sud et de l'ouest, où l'opposition est historiquement forte, ont particulièrement boudé l'élection, en l'absence de l'ex-président Laurent Gbagbo (2000-2011) et du banquier international Tidjane Thiam, leaders du PPA-CI et du PDCI.
Ces derniers, qui n'avaient donné aucun mot d'ordre avant le scrutin, étaient exclus du vote en raison de leur radiation de la liste électorale, le premier pour une condamnation pénale et le second pour des questions de nationalité.
La commune abidjanaise de Yopougon, qui fut un fief de M. Gbagbo, a par exemple enregistré une participation de 31%. Mais là-bas, comme dans tous les départements du pays, ceux qui ont voté ont placé "ADO" largement en tête, avec 86,6% des voix.
En revanche, dans le nord, région dominée par l'ethnie malinké de M. Ouattara, le président a fait carton plein, avec parfois des scores dépassant 99% comme dans la localité de Kong, un de ses bastions, et une participation au-delà de 90%.
- "Peur" -
"Le taux de participation montre deux choses. D'abord, la mobilisation des partisans de M. Ouattara à été importante, comme le montrent les scores soviétiques dans certaines régions. Et ensuite, les partisans du PPA-CI et du PDCI ne se sont pas rendus aux urnes", pointe l'analyste politique Geoffroy Kouao.
"L'absence de MM. Gbagbo et Thiam, leurs appels à ne pas participer au scrutin et le climat de tension qui s'est détérioré au cours des derniers jours laissaient présager une démobilisation significative de l'électorat", confirme William Assanvo, chercheur à l'Institut des études de sécurité (ISS).
Du côté du parti au pouvoir, on souligne que la participation est similaire aux élections de 2015 et 2020, quand M. Ouattara avait déjà été réélu sur des scores fleuves, là aussi sans opposant majeur.
Lundi soir, Tidjane Thiam a estimé qu'il ne s'agissait pas d'une "véritable élection" et que le scrutin avait "divisé" le pays.
Disant rejeter toute violence, il a appelé à agir "pacifiquement pour reconquérir la démocratie": "jamais il n'est trop tard pour dialoguer", a-t-il ajouté.
La veille, le Front commun qui regroupe son parti et celui de Laurent Gbagbo avait annoncé dénier "toute légitimité" à Alassane Ouattara et réclamé de nouvelles élections.
Près de 44.000 membres des forces de l'ordre étaient déployés sur tout le territoire et le pouvoir avait interdit les manifestations du Front commun en octobre, procédant à des centaines d'arrestations pour troubles à l'ordre public notamment.
Quatre adversaires étaient toutefois en lice, mais aucun n'avait le soutien d'un important parti.
L'entrepreneur et ex-ministre du Commerce Jean-Louis Billon, dissident du PDCI, est 2e avec 3,09%, et l'ex-Première dame Simone Ehivet Gbagbo a obtenu 2,42%. Cette dernière a "pris acte" des résultats tout en estimant que le taux de participation était "inexact".
Le souverainiste proche des milieux russes Ahoua Don Mello et la centriste Henriette Lagou ferment la marche, avec respectivement 1,97% et 1,15% des voix.
- 10 morts depuis mi-octobre -
Le scrutin s'est déroulé dans le calme sur une grande partie du territoire ivoirien, mais des heurts ont éclaté dans plusieurs localités du sud et de l'ouest.
Si la CEI a relevé des actes de violence, elle a jugé les incidents "marginaux et vite circonscrits".
L'élection présidentielle est toujours synonyme de tensions politiques et intercommunautaires dans l'esprit de nombreux Ivoiriens, après les scrutins de 2010 (3.000 morts) et 2020 (85 morts).
Selon le Conseil national des droits de l'homme (CNDH, société civile), six personnes sont mortes pendant la campagne électorale avant le scrutin.
Trois autres sont mortes le jour du vote, dans deux localités du centre-ouest, lors d'affrontements intercommunautaires, et un adolescent de 13 ans a été tué par un tir provenant d'un véhicule de transport, toujours dans la même région, selon des sources sécuritaire et gouvernementale.
Au total, 10 personnes ont été tuées depuis mi-octobre, en marge du processus électoral, dont quatre le jour du scrutin - sept selon l'opposition.
Lundi soir, l'ambiance était calme à Abidjan, qui avait retrouvé une activité quasi normale dans la journée après un week-end électoral où la capitale économique était inhabituellement déserte.
Le Conseil constitutionnel doit proclamer les résultats définitifs courant novembre.