Agriculture : formation, "intérêt général majeur"... que contient le projet de loi d'orientation agricole ?
information fournie par Boursorama avec Media Services 18/02/2025 à 12:24

Députés et sénateurs vont chercher un compromis ce mardi. Objectif : voter le texte juste avant le Salon de l'agriculture, inauguré samedi 22 février par Emmanuel Macron. ( AFP / JEAN-FRANCOIS MONIER )

A quatre jours du Salon de l'agriculture, le projet de loi d'orientation agricole est soumis au vote du Sénat ce mardi 18 février.

Mot d'ordre : "souveraineté alimentaire". Le projet de loi d'orientation agricole est soumis ce mardi 18 février au vote du Sénat, après l'adoption par l'Assemblée au printemps. Objectif affiché : accélérer l'arrivée de nouvelles générations d'agriculteurs délestés de certaines contraintes environnementales. Députés et sénateurs ont néanmoins deux visions distinctes sur ce texte qui agrège des sujets très divers — formation, haies ou encore statut des chiens de protection des troupeaux. Des parlementaires des deux chambres tenteront à partir de ce mardi soir d'aboutir à une version commune lors d'une commission mixte paritaire (CMP), in extremis avant l'ouverture du Salon de l'agriculture samedi.

L'agriculture, "intérêt général majeur"

Comme l'exigeait le premier syndicat agricole, la FNSEA, l'une des mesures phares consacre l'agriculture au rang d'"intérêt général majeur". Objectif : nourrir la réflexion du juge administratif et faciliter le parcours des projets de structures de retenues d'eau ou de bâtiments d'élevage hors-sol lorsqu'ils sont mis en balance avec un objectif de préservation de l'environnement. Des élus et des juristes doutent de la portée du dispositif, la protection de l'environnement ayant une valeur constitutionnelle, alors que cet intérêt général majeur est inscrit dans une loi simple.

Le texte porte aussi l'agriculture dans le champ de protection des "intérêts fondamentaux de la Nation" définis dans le code pénal et dont les atteintes sont durement sanctionnées. Le Sénat est allé plus loin dans ce rééquilibrage entre projets agricoles et environnement en instaurant un principe décrié de "non-régression de la souveraineté alimentaire", sorte de miroir de la non-régression environnementale déjà consacrée.

A l'initiative de la droite, le Sénat a aussi écarté la plupart des références à la "transition écologique et environnementale" dans les objectifs des politiques agricoles, lui préférant la notion plus neutre "d'adaptation".

Formation, installation et financement

Le projet de loi entend donner un cadre d'action au monde agricole pour relever deux défis majeurs : attirer des bras face aux départs massifs à la retraite attendus d'ici dix ans, et adapter les systèmes de production au dérèglement climatique. A ce stade, il fixe comme objectif "400.000 exploitations agricoles" d'ici 2035, et 500.000 paysans travaillant sur ces exploitations pour 2035. Un nouveau diplôme de niveau bac+3 serait également créé, qui pourrait être baptisé "Bachelor agro" si la proposition du gouvernement - retenue par le Sénat - subsiste.

Il met en place un guichet unique départemental (France services agriculture, rebaptisé France installations-transmissions au Sénat) pour accompagner les agriculteurs voulant s'installer ou céder leur exploitation. Le texte prévoit aussi un "diagnostic modulaire" censé aider les jeunes agriculteurs à reprendre des fermes en leur fournissant des informations sur "la viabilité économique, environnementale et sociale" des exploitations.

Le Sénat a par ailleurs incité le gouvernement à créer en 2026 une "aide au passage de relais" pour les agriculteurs en fin de carrière qui mettent leurs terres à disposition de repreneurs.

Irrigation et élevage

Le texte accorde une présomption d'urgence en cas de contentieux autour de la construction d'une réserve d'eau pour l'irrigation. Objectif : réduire les délais de procédures. Cette présomption d'urgence concernera aussi des projets de bâtiments d'élevage, dont les permis de construire sont régulièrement l'objet de recours d'associations de défense de la nature.

Par ailleurs, les parlementaires ont fait un pas vers un "droit à l'erreur" des agriculteurs, en approuvant le fait que "la bonne foi" d'un exploitant "est présumée" lors d'un contrôle administratif.

Atteintes à l'environnement

Un article, nettement étendu au Sénat, révise l'échelle des peines en cas d'atteintes à l'environnement en dépénalisant très largement ces infractions lorsqu'elles ne sont pas commises "de manière intentionnelle", au profit d'une simple amende administrative de 450 euros maximum. Les députés de gauche y voient une inversion de la charge de la preuve, voire un "permis de détruire l'environnement", qui de surcroît ne concernerait pas uniquement les agriculteurs.

Réglementation "unique" sur les haies

La FNSEA estimait que le principal obstacle à la plantation de haies était le millefeuille administratif, avec "14 réglementations différentes", notamment pour des opérations impliquant la destruction d'une haie.