A peine nommé, le gouvernement Lecornu II déjà sous intense pression
information fournie par Reuters 13/10/2025 à 14:18

Le Premier ministre français Sébastien Lecornu visite un commissariat de police à L'Haÿ-les-Roses

Une semaine à haut risque s'est ouverte lundi pour le gouvernement tout juste remanié du Premier ministre Sébastien Lecornu, qui va se retrouver confronté à l'Assemblée nationale aux motions de censure du Rassemblement national (RN) et de La France insoumise (LFI).

Le chef du gouvernement, qui réunit ses troupes en début d'après-midi à Matignon, participera au Conseil des ministres mardi matin à l'Elysée avant de prononcer à l'Assemblée un discours de politique générale dont chaque mot devra être pesé.

"Nous avons déposé la motion de censure qui fera tomber le #GouvernementLecornu2 !", a écrit sur X la cheffe de file des députés insoumis, Mathilde Panot. "Elle est signée par des député·es Ultramarins, communistes, écologistes et l'ensemble du groupe insoumis. Le pays n'a pas de temps à perdre. Lecornu tombera et Macron suivra".

Les présidents des groupes RN et Union des droites pour la République (UDR), Marine Le Pen et Eric Ciotti, ont annoncé sur le même réseau avoir déposé leur propre motion.

"Les Français attendent aujourd'hui une rupture politique", a déclaré plus tôt dans la matinée le président du RN, Jordan Bardella, précisant que son camp voterait la censure, d'où qu'elle vienne.

Le RN réclame une dissolution rapide de l'Assemblée nationale, tandis que LFI privilégie l'option d'un départ anticipé du président Emmanuel Macron.

Au regard des déclarations des deux camps extrêmes et de la composition de l'Assemblée nationale où aucun groupe n'est majoritaire, Sébastien Lecornu ne pourra échapper à une censure que s'il s'assure soutien de ses partenaires et obtient a minima une abstention du groupe "socialistes et apparentés", qui compte 69 membres.

"Il n'y aura pas de censure si le Premier ministre s'engage sur l'abandon du 49.3 et la suspension de la réforme des retraites", a déclaré à Reuters le député PS spécialiste du budget Philippe Brun, en référence à l'article de la Constitution qui donne la possibilité au gouvernement de faire adopter un projet de loi sans vote de l'Assemblée nationale.

Ces propos font écho à ceux du Premier secrétaire du PS, Olivier Faure, dans La Tribune Dimanche.

Concernant les autres formations politiques, l'incertitude sur le vote demeure.

"Je pense que la quasi-intégralité des députés communistes et écologistes voteront la censure", a dit le coordinateur de LFI, Emmanuel Bompard.

L'Elysée a dévoilé dimanche le nouveau gouvernement de Sébastien Lecornu, présenté comme plus technique et moins politique avec l'arrivée de personnalités issues de la société civile, sans pour autant convaincre les oppositions.

DÉBAT SUR LES RETRAITES

En voyage en Egypte, le président Emmanuel Macron a invité lundi les forces politiques à privilégier la stabilité.

"Le devoir de tous, c'est d'oeuvrer à la stabilité, ce n'est pas de faire des paris sur l'instabilité", a-t-il dit à Charm el-Cheikh dans le cadre d'un sommet sur l'accord de cessez-le-feu dans la bande de Gaza.

Le temps presse pour Sébastien Lecornu s'il veut faire adopter le budget 2026 d'ici le 31 décembre.

Un conseil des ministres est prévu mardi à 10h00 (08h00 GMT) puis le Premier ministre prononcera, "probablement à 15 heures", sa déclaration de politique générale à l'Assemblée nationale, a précisé la nouvelle porte-parole du gouvernement, Maud Bregeon.

"Les choses sont très claires : personne n'a de majorité à l'Assemblée nationale. Notre rôle, c'est d'éviter la défiance", a-t-elle dit sur RTL.

"Voter une motion de censure, c'est voter une motion de dissolution", a-t-elle mis en garde.

L'abandon du recours à l'article 49.3 de la Constitution, déjà promise par Sébastien Lecornu, favorisera le débat au Parlement sur tous les aspects du budget, a-t-elle estimé.

"Les forces politiques, et particulièrement le PS, doivent accepter de débattre. Le PS a demandé l'abandon du 49.3, ils l'ont eu, ils ont demandé l'ouverture d'un débat sur la fiscalité, ils vont l'avoir", a-t-elle dit.

Quant à l'épineuse question de la réforme des retraites contestée de 2023, Maud Bregeon a indiqué que Sébastien Lecornu l'aborderait dans son discours au Palais-Bourbon.

"La suspension de la réforme de la retraite, c'est la condition sine qua non de la stabilité politique", a estimé sur TF1 la secrétaire générale de la CFDT, Marylise Léon. "Il faut pouvoir avoir un débat entre organisations syndicales, patronales, partis politiques, parlementaires, pour utiliser l'année 2026 justement de suspension de cette réforme pour dire : 'qu'est-ce qu'on veut construire ?'".

(Rédigé par Blandine Hénault, avec la contribution de Claude Chendjou, Benjamin Mallet, Geert De Clercq, édité par Elizabeth Pineau)