Aller au contenu principal Activer le contraste adaptéDésactiver le contraste adapté
Plus de 40 000 produits accessibles à 0€ de frais de courtage
Découvrir Boursomarkets
Fermer

Comment financer la formation continue ?
Dernière mise à jour le : 03/07/2023

ertertertre

ertertertre

Les violences urbaines que connaît la France en ce début juillet nous rappellent l'impérieuse nécessité de la présence de l'Etat en termes de sécurité et de justice, mais aussi de formation pour lutter contre la dérive de certains jeunes. Pour Nathalie Chusseau, dégager les sources de financement nécessaires à la formation tout au long de la vie est aujourd'hui une priorité

La formation professionnelle se définit comme un processus d'acquisition de connaissances et de compétences requises sur le marché de l'emploi, en formation initiale (apprentissage, lycée professionnel) ou en formation continue. Elle implique donc une adéquation entre les besoins des entreprises et les compétences.

Or, nous évoluons dans un monde en proie à des transformations radicales :

  • La révolution numérique et l'intelligence artificielle (IA) vont fortement modifier la structure des emplois : 39% des employés ont un risque d'automatisation fort et, selon Goldman Sachs, l'IA détruirait 300 millions d'emplois dans le monde dont 25% en Europe.
  • La transition énergétique et les engagements de décarbonation à l'horizon 2050 sont source de destructions et créations d'emplois.
  • La transition démographique va accroître les besoins dans les métiers du soin et de la prise en charge de la dépendance des personnes âgées, cette dernière devant passer de 30% en 2015 à 47% en 2050.

Face à ces transitions, de fortes incertitudes demeurent sur les emplois détruits et ceux qui seront créés, c'est pourquoi il faut adapter les compétences car la demande de travail évolue constamment. Or, la formation professionnelle protège contre l'obsolescence des qualifications et permet de s'adapter aux innovations. La formation à tous les âges de la vie est donc une priorité pour développer les compétences et s'adapter à un marché du travail en mutation. Pourtant, chaque année, seulement 32% des travailleurs participent à une formation liée au travail, ce qui est bien en dessous de la moyenne de l'OCDE (41%). On note aussi de grandes différences selon les catégories de travailleurs : 15% pour les peu qualifiés, 13% pour les seniors. Enfin, le taux d'emploi des 60-64 ans est seulement de 36% alors qu'il est de 75% pour les 55-59 ans.

Adapter les compétences dans un tel contexte implique nécessairement de s'interroger sur le financement de la formation professionnelle aussi bien par les entreprises que par les pouvoirs publics.

Le financement public est crucial, puisque l'État et les régions sont très présents dans la formation. Concernant les jeunes, un effort considérable a été réalisé via un développement très important de l'apprentissage. A ce jour, on a quasiment atteint le million d'apprentis. Toutefois, ce succès est à nuancer : tous les niveaux de diplôme ne sont pas concernés par une dynamique aussi forte. Les formations de niveau bac+3 ou plus sont passées de 21% en 2018 à 40% en 2021.

A l'inverse, les apprentis préparant une formation de niveau CAP représentaient environ 27% des nouveaux contrats signés en 2020, contre 41% en 2018. Pourtant, l'apprentissage est beaucoup plus bénéfique pour les jeunes infra-bac : il peut leur ouvrir des perspectives de carrière et leur permettre d'entrer rapidement en emploi, tout en leur transmettant des compétences professionnelles. C'est aussi un moyen de former les jeunes aux métiers en tension, même si la difficulté réside dans l'attractivité de ces emplois. Enfin, une question se pose : l'effort des entreprises se maintiendra-t-il au même rythme qu'actuellement lorsque l'Etat réduira sa contribution ? Un recentrage des aides sur les diplômes infra-bac sera alors à envisager.

Les compétences et la formation sont un élément essentiel pour les entreprises comme pour les salariés. Pourtant, selon les chiffres de la DARES, moins de 1 % des accords de négociation collective portent sur la formation. Plus largement, peu d'entreprises françaises investissent dans la formation de leurs salariés : en moyenne, seulement 1% de l'investissement va à la formation, ce qui reste largement insuffisant dans le contexte des multiples transitions que nous avons à réaliser. Les compétences et donc la formation doivent être une priorité pour l'entreprise qui devrait y consacrer davantage de moyens. L'investissement en capital humain est non seulement un investissement rentable mais il est absolument nécessaire.

Nathalie Chusseau
Professeure à l'Université de Lille
Invitée par le Cercle des économistes

Cette thématique sera abordée lors des Rencontres Economiques d'Aix-en-Provence les 7, 8 et 9 juillet, organisées par le Cercle des économistes