Face "à la réglementation" sur le marché européen et à la "surréglementation à la française", les États-Unis sont un excellent débouché pour les alcools français, selon un représentant du secteur.

Donald Trump à Miami, aux États-Unis, le 3 avril 2025. ( AFP / MANDEL NGAN )
Le vin et les alcools français sont de loin les produits agroalimentaires les plus menacés par les droits de douane mis en place par Donald Trump. Mais les fromages ou les viennoiseries, par exemple, en pâtiront également, avec la clé une fragilisation des agriculteurs et des transformateurs.
"Pour l'agroalimentaire, l'impact des mesures (...) c'est en gros 1 milliard d'euros , dont environ deux tiers pour les vins et les spiritueux", a affirmé jeudi à l' AFP Jean-François Loiseau, président de l'Association nationale des industries alimentaires (Ania), juste après avoir été reçu à l'Élysée pour un point sur les annonces américaines. Face "à la réglementation" sur le marché européen et à la "surréglementation à la française", "les États-Unis étaient un très bon marché de valeurs", synonyme de "pouvoir d'achat", a-t-il relevé.
En 2024, la France a exporté aux États-Unis pour 342 millions d'euros de produits laitiers, 129 millions en pain, pâtisseries et viennoiseries fraîches, 82 millions en biscuits et pâtisseries de conservation, ou encore 186 millions de préparations et conserves à base de fruits et légumes , selon les Douanes.
"Nous allons être confrontés à une double peine", a assuré à l' AFP Dominique Chargé, président de la Coopération agricole, qui rassemble 2.100 coopératives représentant 70% de la production agricole française. D'abord des "perturbations importantes sur les marchés" avec des produits pour lesquels il faudra trouver d'autres débouchés que les États-Unis, faute d'exporter. Puis les conséquences des mesures "de rétorsion" qu'annoncera l'Union européenne, car "nous sommes en partie dépendants des États-Unis" pour certains approvisionnements, "comme par exemple le soja", a-t-il ajouté.
Les agriculteurs pourraient donc voir leurs coûts de production augmenter , "notamment dans les filières laitières", avec un impact direct sur "le modèle coopératif", car "l'ADN des coopératives est de valoriser la production des agriculteurs sur nos territoires, ce qui les distingue des industriels qui, eux, peuvent délocaliser et contourner les taxes".
"Désescalade"
Pour Gabriel Picard, président de la Fédération des exportateurs de vins et spiritueux (FEVS), et Jérôme Despey, premier vice-président de la FNSEA et patron de la branche viticulture, il faut une "désescalade" dans la réponse européenne. Plusieurs géants laitiers (Danone, Savencia, Bel, Lactalis) ont des sites de production aux États-Unis, mais ceux-ci ne pourront remplacer les produits liés à des territoires (AOP).
Pour les produits laitiers, les coopératives représentent un peu plus de la moitié du lait collecté et un peu moins de la moitié du lait transformé en France. Les entreprises privées, dont les quatre géants du secteur, représentées par la Fédération nationale de l'industrie laitière (Fnil), collectent et transforment l'autre moitié. Les droits de douane annoncés sont "à peu près similaires à ce qu'on avait connu en 2019", lors du premier mandat de Donald Trump, a souligné le PDG de la Fnil, François-Xavier Huard.
"Ça reste un choc, mais on est en terrain plus connu que si on nous avait imposé 200 à 300%" , a-t-il ajouté, pointant malgré tout le risque que cela stoppe à nouveau la progression du marché, qui avait doublé en une décennie aux Etats-Unis.
Selon lui, les produits d'entrée de gamme (comme l'emmental) devraient davantage souffrir que les AOP, pour lesquelles les consommateurs sont susceptibles de payer quelques dollars de plus. Mais "tout dépend aussi des marges des distributeurs", a expliqué à l' AFP Aurélien Vorger, directeur du syndicat des AOP Fourme d'Ambert et Bleu d'Auvergne, dont une centaine de tonnes sont exportées chaque année aux Etats-Unis. Il appelle à réfléchir à d'autres débouchés.
Le président des coopératives a aussi été reçu jeudi à l'Élysée, où il a été question de la nécessité d'une "solidarité entre les filières concernées" en France et "d'une réponse cohérente, unie à l'échelle de l'Europe", a-t-il dit à la presse.
"C'est la multiplication des fronts au niveau du commerce mondial qui nous inquiète", a signalé à l' AFP François-Xavier Huard, citant l'enquête de Pékin sur les produits laitiers et la baisse des exportations vers l'Algérie. Le président de l'Ania a également défendu la nécessité de "redonner de la compétitivité aux entreprises".
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