
( AFP / AURORE MESENGE )
Droits de douane américains relevés, budget resserré, consommation des ménages prudente... L'Institut national de la statistique dévoile mercredi le taux de croissance atteint au deuxième trimestre par une économie française confrontée à des chocs multiples.
Deuxième économie de la zone euro, la France sera la première mercredi à dire comment son produit intérieur brut (PIB) a évolué entre avril et juin. Suivront deux autres poids lourds européens, l'Allemagne et l'Italie, tandis que l'Espagne a confirmé mardi son dynamisme avec une hausse de 0,7% tirée notamment par les exportations.
Au deuxième trimestre, l'Insee prévoit un PIB en légère progression de 0,2% après une quasi-stagnation (+0,1%) les trois mois précédents, malgré un effort budgétaire d'une cinquantaine de milliards d'euros validé dans la douleur en février et les tensions suscitées par le relèvement des droits de douane américains en avril.
Ceux-ci seront encore relevés à 15% pour la majorité des exportations européennes le 1er août, en vertu d'un accord conclu dimanche entre l'UE et les Etats-Unis et qui suscite de fortes inquiétudes en France.
- "Un peu mieux" -
Le deuxième trimestre pourrait avoir été "un peu mieux" que le précédent, "en raison de facteurs exceptionnels", estime Stéphane Colliac, économiste chez BNP Paribas, auprès de l'AFP.
Il cite "une production de blé normale" après des récoltes gâchées par la pluie l'an dernier et, malgré les économies, une reprise de la consommation publique dans des domaines comme la santé ou la défense, là où elle avait été pénalisée début 2025 par l'absence de budget.
Au-delà, dans un environnement de grande incertitude nationale et internationale, "le rythme de croissance de l'économie française semble relativement faible", ajoute-t-il.
Avant même l'entrée en vigueur des nouvelles surtaxes douanières, l'économie française a commencé à subir l'impact direct mais aussi indirect des droits de douane américains.
L'Allemagne ayant réduit ses achats d'intrants - car ses exportations vers les Etats-Unis baissent et qu'elle anticipe une moindre production -, la situation affecte en retour des entreprises françaises, dans le secteur automobile notamment, illustre Stéphane Colliac.
En France, malgré des gains de pouvoir d'achat grâce au net repli de l'inflation, l'Insee n'attend qu'un redémarrage modéré (+0,2%) de la consommation des ménages au deuxième trimestre. Pilier traditionnel de la croissance, celle-ci s'était repliée de 0,2% au premier trimestre, avec notamment la dégringolade des ventes automobiles.
Moins portés sur la dépense, les ménages préfèrent alimenter leurs bas de laine: le taux d'épargne a atteint 18,8% en début d'année, le record hors période Covid.
Car leur confiance demeure "basse", avec "des craintes élevées" sur le niveau de vie concentrées désormais sur l'emploi plutôt que les prix, selon l'économiste. Leur inquiétude est également alimentée par l'incertitude quant aux futures mesures budgétaires.
- Un budget "rapidement" -
Les grandes orientations budgétaires pour 2026 ont été déclinées le 15 juillet par le Premier ministre François Bayrou, avec l'objectif de ramener de 5,4% à 4,6% du PIB le déficit public de la France, la plus mauvaise élève de la zone euro en la matière.
Les mesures prévoient un effort de 43,8 milliards d'euros, passant notamment par un gel des prestations sociales, des retraites et des dépenses budgétaires (hors Défense). Elles pourraient toutefois être aménagées par le gouvernement pour échapper à une censure à l'Assemblée nationale.
Pour 2025, l'Insee comme la Banque de France tablent sur une croissance de 0,6%, contre 0,7% pour le gouvernement, sensiblement moins qu'en 2024 (1,1%).
Le ministre de l'Economie, Eric Lombard, a confirmé mardi dans le quotidien Libération que la prévision de croissance annuelle serait révisée à la rentrée, tout en estimant que l'accord commercial avec les Etats-Unis, certes perfectible, aurait "un impact modeste sur notre économie".
La priorité était de "mettre fin à une incertitude qui pénalise notre économie", a-t-il fait valoir.
Mais pour Stéphane Colliac, il faut aussi "qu'on ait un budget relativement rapidement", car le long processus budgétaire l'an dernier avait entraîné "une incertitude économique conséquente, avec un poids économique conséquent".
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