La Réserve fédérale américaine (Fed) devrait patienter encore deux mois au moins avant de baisser ses taux d'intérêt en raison des risques d'inflation liés aux politiques commerciales du président Donald Trump, estime une majorité d'économistes interrogés par Reuters.
Les économistes interrogés ont été réticents à modifier leurs perspectives économiques alors que les négociations autour des droits de douane permises par la pause de 90 jours accordée par Donald Trump prennent fin le 9 juillet.
Aux enjeux commerciaux s'ajoutent des inquiétudes croissantes sur la dette américaine et les marchés obligataires avec un projet de réduction d'impôt adopté par la Chambre des représentants mais pas par le Sénat.
D'autant que les données publiées vendredi outre-Atlantique n'ont montré aucun signe de tension significative sur le marché du travail, suggérant que la Fed ne sera pas pressée de réduire ses taux d'intérêt dans l'immédiat.
Les 105 économistes interrogés par Reuters du 5 au 10 juin, à l'exception de deux d'entre eux, ont prédit que la Fed ne changera pas sa fourchette de taux, située entre 4,25% à 4,5%, lors de sa réunion du 17 et 18 juin.
Environ 55% des économistes - 59 sur 105 - ont déclaré que la Fed recommencerait à réduire ses taux au prochain trimestre, très probablement en septembre, en ligne avec les anticipations de marché et conformément aux prévisions du mois dernier.
"Tant que le marché de l'emploi se porte bien, nous nous attendons à ce que le comité de politique monétaire de la Fed (FOMC) continue à être attentiste et à utiliser la rhétorique pour renforcer sa crédibilité en matière de lutte contre l'inflation", a déclaré Jonathan Pingle, économiste en chef pour les Etats-Unis chez UBS, soulignant "la grande incertitude" à laquelle est confrontée le FOMC.
RELANCE FISCALE DE TRUMP
Les consommateurs américains s'attendent à ce que les pressions sur les prix augmentent dans les années à venir tandis que les économistes prévoient que l'inflation restera bien au-dessus de l'objectif de 2% de la Fed jusqu'en 2027 au moins.
Une minorité significative de 42% des participants au sondage - 44 sur 105 - s'attend à ce que le FOMC recommence à réduire les taux au quatrième trimestre 2025 ou plus tard, et 20 ne prévoient aucune réduction cette année.
"Les droits de douane élevés sont là pour rester, et ils produiront une inflation élevée qui se maintiendra jusqu'en 2026", a déclaré James Egelhof, économiste en chef pour les États-Unis chez BNP Paribas, pour qui "la Fed ne verra pas la nécessité de réduire ses dépenses... la leçon que nous avons tirée de l'histoire est que si l'inflation s'installe dans l'économie, il peut être très difficile et très coûteux de l'éliminer".
Il n'y a pas eu de consensus clair sur le niveau des taux d'ici à la fin de l'année 2025, mais environ 80% des économistes - 85 sur 105 - ont prédit que le taux des fonds fédéraux se situerait dans une fourchette de 3,75% à 4,0% ou plus.
Donald Trump a appelé vendredi à une réduction d'un point de pourcentage des taux immédiatement.
Le projet de loi du président passée à la Chambre des représentants devrait ajouter 2.400 milliards de dollars à une dette déjà énorme de 36.200 milliards de dollars, rendant une baisse des taux encore plus improbable.
"Le projet de loi sur les impôts et les dépenses étant plus stimulant sur le plan fiscal, la Fed estime qu'il est moins justifié de soutenir l'économie avec des taux d'intérêt plus bas", a réagi Bill Adams, économiste en chef à la Comerica Bank.
"La politique budgétaire semble vouloir creuser le déficit, exerçant une pression continue à la hausse sur les taux d'intérêt à long terme, ce qui constituera un vent contraire pour les secteurs de l'économie à forte intensité de crédit tels que le marché immobilier et les dépenses d'investissement des entreprises", a-t-il ajouté.
L'économie américaine, qui s'est contractée de 0,2% au dernier trimestre en raison d'un déficit commercial croissant, ne devrait croître que de 1,4% cette année, selon les économistes, après +2,8% en 2024.
Pour 2026, la croissance du produit intérieur brut (PIB) des Etats-Unis est attendue à 1,5%, une perspective inchangée par rapport à l'enquête de mai.
(Autres articles issus du sondage Reuters)
(rédigé par Indradip Ghosh ; enquêtes de Mumal Rathore et Sarupya Ganguly ; version française Bertrand De Meyer, édité par Blandine Hénault)
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