
immobilier, maison (Crédits: Unsplash - Tierra Mallorca)
Après la démission du premier ministre, les taux de crédit qui étaient jusque-là relativement stables, vont-ils s'emballer ?
Aussitôt nommé, presque aussitôt dissous. Sébastien Lecornu a nommé son gouvernement hier soir avant de donner sa démission ce matin . Il devient le premier ministre le plus éphémère de l'Histoire, en quittant Matignon seulement 27 jours après sa nomination. L'équipe ministérielle n'a ainsi duré qu'une douzaine d'heures. Cette énième crise politique aura-t-elle un impact sur les taux de crédit immobilier ?
Avant ce coup de théâtre, en octobre, les taux restaient relativement stables. Seules quelques banques augmentent leurs taux de crédit, de 0,10% en moyenne. Ainsi en octobre, les taux moyens sont en légèrement en hausse à 3,10 % sur 15 ans, 3,30 % sur 20 ans et 3,50 % sur 25 ans. L'apport personnel nécessaire pour emprunter avait fortement baissé, pour les primo-accédants notamment : il est passé de 24% en 2024, soit 38.982 euros, à 18% en octobre 2025, soit 28.539 euros. Même la production de crédits a retrouvé des couleurs avec un quasi-doublement - de 7 à 13 milliards d'euros de prêts accordés chaque mois aux ménages, selon la Banque de France.
Après la démission de Sébastien Lecornu, qu'en est-il ? « Ce qui est certain c'est que l'on a toujours dit que les hausses limitées des taux dépendraient de la capacité du gouvernement à se mettre d'accord sur le budget. Là, le premier ministre est resté 27 jours, donc ce temps perdu pénalise les taux et montre l'incapacité de l'État à se mettre d'accord sur un gouvernement et du coup sur un budget », souligne Sandrine Allonier, porte-parole de Vousfinancer, courtier en crédit immobilier. En cas d'instabilité politique durable, les tensions sur les taux d'emprunt d'État pourraient s'accentuer. « Les agents économiques, les banques et les emprunteurs, ont horreur de l'incertitude. Dans cet univers incertain, ils ont tendance à repousser les investissements », confirme Frédéric Figer, directeur général adjoint en charge des Réseaux du Groupe MeilleurTaux, autre courtier.
Une absence de budget inquiétante
Caroline Arnould, directrice générale de CAFPI, un courtier en crédit immobilier, reste prudente. « À chaud, la potentielle dissolution pourrait être inquiétante. L'OAT 10 ans ( NDLR le coût de l'emprunt français à 10 ans ) a bondi, il est à 3,59% alors qu'il était depuis un certain temps à 3,50%. Mais souvent, il flambe après une annonce puis il retombe », assure-t-elle. Mais les craintes de surcoût pour les futurs emprunteurs sont réelles. « Si l'OAT 10 ans reste durablement à 3,6% les banques ne pourront pas continuer à prêter à 3,20%. Les banques devront répercuter ce surcoût sur les clients », souligne-t-elle.
L'impact dépendra de la durée de l'instabilité politique selon elle. La BCE, si elle perçoit un risque systémique pourrait aussi intervenir pour faire baisser cet impact. « La France est un pays important dans l'Union européenne et la BCE prend en considération cet élément. La France a la capacité de lever de l'impôt facilement. On ne se trouve pas comme certains pays, en défaillance totale », affirme le directeur général de la franchise de courtage en crédits IN&FI Crédits Pierre-Etienne Beuvelet. « L'effet ne sera pas instantané, il sera modulé par la perception des marchés. Les banques ne vont pas augmenter demain les taux », rassure Caroline Arnould. Sophie Ho Thong directrice générale adjointe de Finance Conseil, se veut aussi rassurante : « Le lien de corrélation entre instabilité politique et hausse des taux n'est pas systématique. Lors du vote de confiance de François Bayrou, ils sont restés stables parce que les banques avaient envie d'accompagner les emprunteurs ».
Même son de cloche du côté de Pierre-Etienne Beuvelet : « La chute d'un gouvernement, ce n'est pas la première fois que cela existe chez nous. Jusqu'à présent, peu importe le temps qu'un gouvernement est resté au pouvoir, cela n'a eu aucun effet sur les taux ». Frédéric Figer n'est pas aussi optimiste : « Lors de la chute du gouvernement Barnier il ne s'était pas passé grand-chose. De même pour la chute de Bayrou même s'il y a eu un peu de tension au moment de l'annonce du vote de confiance mais la répétition de ces événements et le caractère inattendu de la démission de Lecornu plonge les acteurs économiques dans l'incertitude ».
Pour les investisseurs, les prochaines semaines ou mois ne s'annoncent également pas sous les meilleurs auspices. La ministre du Logement démissionnaire Valérie Létard (avant que ne soit nommé Éric Woerth hier soir), a refusé de réintégrer le gouvernement, « considérant que, dans le contexte actuel, je n'aurais pas disposé de la latitude nécessaire pour agir utilement ». « Les mots de Valérie Létard sont problématiques. Alors qu'on était sur le point d'avoir un statut du bailleur privé, le projet est reporté sine die. Le marché repart pour les primo et les secundo accédants mais pas pour les investisseurs », s'inquiète Sandrine Allonier.
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