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L'âge des propriétaires, les rendant vulnérables, a joué en leur faveur.
Les préfets sont régulièrement accusés de faire traîner les procédures d'expulsion, alors même qu'une décision de justice ordonnant ladite expulsion a été rendue. Souvent, ils refusent d'intervenir pour éviter d'éventuels troubles à l'ordre public ou parce qu'ils font face à des femmes enceintes ou à des enfants en bas âge. « Le refus d'octroi du concours de l'État à l'exécution d'une décision de justice n'est légal que si des considérations impérieuses le justifient », rappelle la Cour des comptes. Par « considérations impérieuses », comprenez « sauvegarde de l'ordre public », comme l'a précisé le Conseil d'État dans une décision de 2010.
Ici, un préfet refuse d'expulser un couple de propriétaires, âgés de 87 et 85 ans, dont la femme est clouée depuis 3 ans dans un lit médicalisé. C'est donc l'âge des occupants qui joue en leur faveur ainsi que l'état de santé de la femme.
Le couple a fait l'acquisition de sa maison à Perpignan et s'y est installé en 2002. Il a ensuite accueilli successivement 29 enfants placés à son domicile de la Sarthe et a ensuite fait donation de cette propriété à la seule fille qu'il a adoptée . Ils conviennent oralement entre eux qu'ils resteront dans la maison jusqu'à leur décès, et détiendront donc l'usufruit, mais aucun acte notarié n'officialise cette donation. Les parents règlent tous les frais inhérents à la maison et s'acquittent du paiement de la taxe foncière.
Un âge avancé
Ils tombent malades et ne parviennent plus à payer cette taxe. Les impôts se retournent alors contre la propriétaire officielle, leur fille, qui décide d'assigner les parents en justice en 2019. Elle veut vendre la maison sans prendre en considération le désir de sa famille. La justice tranche et ordonne l'expulsion des parents. Elle considère qu'aucun acte n'a été réalisé devant le notaire et que le contrat est donc nul. Les époux sont des occupants sans droit ni titre selon elle. « C'est nous qui l'avons payée cette maison et on n'a pas à nous jeter dehors comme des chiens. On nous fait mourir avec cette histoire. De toute façon, on ne va pas vivre 20 ans de plus, il suffit d'attendre un peu », se plaint le père de famille auprès du journal L'Indépendant .
Le 18 septembre, le préfet a refusé le concours de la force publique, c'est-à-dire l'intervention de la police, pour expulser les octogénaires. « Je ne comprends pas que l'on ait accordé le concours de la force publique dans ce dossier. Je retire le concours de la force publique pour une raison simple : le principe à valeur constitutionnelle de sauvegarde de la dignité de la personne humaine » , confie le préfet, Pierre Régnault de la Mothe, préfet des Pyrénées-Orientales, au Figaro . L'avocat du couple, Me Codognès se réjouit que « le préfet ait évalué la balance entre l'obligation d'exécuter une décision d'expulsion et le préjudice énorme qu'il implique à un couple âgé en grandes difficultés ». La fille adoptive dispose de 10 jours pour déposer un recours devant le Tribunal administratif.
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