Une quirielle de mesures tous azimuts ont été votées dans le cadre des débats sur la partie recettes du Budget de l'Etat. Ces textes doivent toutefois encore suivre un long chemin parlementaire.
(illustration) ( AFP / DENIS CHARLET )
En dépit des mises en garde du ministre de l'Economie sur les mesures "inopérantes" validées par les députés de l'Assemblée nationale, qu'il qualifie de "sorcellerie fiscale", de nombreux textes ont passé l'écueil de ce début d'examen du projet de budget 2026. En toile de fond : justice fiscale, compétitivité des entreprises ou encore pouvoirs d'achat des ménages.
Une série de mesures fiscales a ainsi été adoptée sans parvenir à dégager un consensus politique. La copie, encore largement incomplète, suscite des critiques de toutes parts. Ces mesures ont été étudiées dans le cadre de l'examen de la partie recettes du budget de l'Etat, qui n'est pas achevé. En cas d'approbation de ce volet du budget, qui est loin d'être acquise, le devenir de ces mesures dépendra de la suite de la navette parlementaire.
Contribution des plus riches
Les députés ont voté la prolongation de la contribution différentielle sur les hauts revenus (CDHR), qui restera en vigueur tant que le déficit public dépasse 3 % du PIB. Le maintien de cette mesure fixant un taux minimal d'imposition de 20% pour les ménages dont les revenus dépassent 250.000 euros, devrait rapporter 1,5 milliard d’euros en 2026, selon les chiffres avancés par le gouvernement.
La taxe sur les holdings (outil parfois utilisé par des ultrariches pour échapper à l'impôt) proposée par le gouvernement a finalement été adoptée dans une version édulcorée. La droite a réussi à circonscrire le nombre de holdings visées et l'assiette, en listant précisément les biens somptuaires concernés. Son nouveau rendement n'est pas connu.
L'Assemblée nationale a en revanche rejeté la taxe Zucman, défendue par la gauche, qui en espérait de 15 à 20 milliards d'euros de recettes.
Les députés ont cependant voté en faveur d'une transformation de l'impôt sur la fortune immobilière (IFI) en impôt sur la fortune improductive, qui élargit l'assiette de l'impôt, tout en en modifiant le barème et en créant un abattement sur la résidence principale ou unique. Le chiffrage, sujet à caution, est toujours en cours. Le flou demeure ainsi pour l'heure sur l'étendue de ce potentiel impôt, et de l'éventuelle taxation des livrets réglementés, assurances-vie en fonds euros, ou encore oeuvres d'art.
Pouvoir d'achat
A l'initiative de la droite et contre l'avis du gouvernement, les députés ont largement rejeté le gel du barème de l'impôt sur le revenu. Il aurait conduit 200.000 foyers supplémentaires à payer cet impôt. Coût du rejet: 2,1 milliards d'euros.
La défiscalisation totale des heures supplémentaires a été approuvée, également à l'initiative des LR. Coût estimé: un milliard d'euros. Les écologistes ont fait voter la défiscalisation des pensions alimentaires pour ses bénéficiaires, et en miroir la fiscalisation pour ceux qui la versent, là aussi contre l'avis du gouvernement. Bénéfice attendu: 500 millions d'euros.
A l'initiative de LFI, une mesure de soutien pour les résidents en Ehpad ou leurs familles ayant des revenus modestes a été votée. Elle transforme une réduction d'impôt de 25% sur les frais de séjour en crédit d'impôt. Le gouvernement, défavorable à la mesure, la chiffre à 574 millions d'euros.
Infographie comparant la dette publique française à divers critères, comme le patrimoine des ménages, le stock de lingots d'or à la Banque de France, etc. ( AFP / Valentina BRESCHI )
Fiscalité des entreprises
L’Assemblée a voté une hausse de la surtaxe sur les bénéfices des grandes entreprises, qui devrait rapporter deux milliards d'euros de plus. La mesure du gouvernement augmente le taux pour les très grands groupes (jusqu’à 35,3 %), tout en l’allégeant pour les entreprises intermédiaires.
A l'initiative des socialiste, la chambre a voté pour réduire l’impôt sur les sociétés des petites et moyennes entreprises jusqu'à 100.000 euros de bénéfice. Le gouvernement s’y est opposé, chiffrant la mesure à 1,7 milliard d’euros.
Les députés ont aussi voté une taxe sur les rachats d’actions, portée à 33 % contre 8 % actuellement, sur proposition du Rassemblement national, et contre l'avis du gouvernement. Enfin, une taxe exceptionnelle sur les superdividendes, proposée par LFI, a été votée, mais jugée inapplicable par le gouvernement, en raison du droit européen.
Sur l’évasion fiscale, Lescure met en garde contre les "effets pervers" de la taxe sur les multinationales
Les députés ont voté le doublement de la taxe GAFAM, qui cible les géants du numérique, passant de 3 % à 6 %. Le gouvernement s’y est opposé, craignant des représailles américaines. Recettes supplémentaires estimées: 882 millions d’euros.
À l’initiative de LFI, l’Assemblée a aussi adopté un impôt minimal effectif de 25 % sur le chiffres d'affaires réalisé en France par les multinationales. Son rendement potentiel est estimé à 26 milliards d’euros par LFI. Mais, le gouvernement juge la mesure contraire aux réglementations européennes et internationales. "On va à l'encontre de 125 conventions fiscales signées avec 125 pays différents", pointe ainsi le ministre de l'Economie Roland Lescure lundi matin, à l'antenne de RMC/BFMTV, disant vouloir "expliquer l'effet pervers de cette taxe".
Et après ?
Les débats font une pause à partir de lundi soir et reprendront le 12 novembre. Plusieurs sujets sensibles restent à trancher comme la suppression de la niche fiscale des retraités ou le rehaussement des droits de timbre liés au droit au séjour et à l’accès à la nationalité.
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