
Le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau arrive au défilé militaire annuel lors des célébrations de la fête nationale à Paris
Le ministre de l'Intérieur et président du parti Les Républicains (LR), Bruno Retailleau, a suscité l'émoi du camp présidentiel en prédisant la fin du "macronisme", qu'il fait rimer avec "immobilisme", sans rompre avec le gouvernement pour l'instant.
Dans un entretien à l'hebdomadaire conservateur Valeurs Actuelles, l'élu vendéen entré place Beauvau il y a dix mois prend ses distances avec le camp du chef de l'Etat au sein du "socle commun", alliance entre LR, le centre et certains socialistes qui compose le gouvernement de François Bayrou.
"Le 'macronisme' s'achèvera" avec le départ d'Emmanuel Macron de l'Élysée en 2027, "tout simplement parce qu'il n'est ni un mouvement politique, ni une idéologie : il repose essentiellement sur un homme", déclare l'ancien "patron" des sénateurs LR, âgé de 64 ans.
Bruno Retailleau doit rencontrer le président jeudi à l'Elysée, un rendez-vous prévu de longue date destiné à évoquer notamment les relations entre la France et l'Algérie, avec laquelle le ministre de l'Intérieur préconise une ligne dure.
S'il n'a pas évoqué les propos tenus à son égard lors du conseil des ministres de mercredi, Emmanuel Macron a évoqué la nécessaire solidarité gouvernementale lors de la gestation d'un budget 2026 censé faire des dizaines de milliards d'économies.
"Tout ce qui nous désynchronise nous pénalise", a dit le président selon la porte-parole du gouvernement, Sophie Primas.
Elu en 2017 à l'âge de 39 ans et réélu cinq ans plus tard, Emmanuel Macron doit composer avec un paysage politique éclaté depuis la dissolution de l'été 2024 qui a privé son camp de majorité à l'Assemblée nationale.
Ministre de l'Intérieur des gouvernements de Michel Barnier et François Bayrou, Bruno Retailleau défend une ligne marquée par le retour de "l'ordre" et des propositions sur l'immigration qui rejoignent parfois celles du Rassemblement national.
Dans Valeurs Actuelles, il préconise un "cordon sanitaire" autour du parti d'extrême gauche La France insoumise.
En mai, il a été facilement élu président des Républicains face au "patron" des députés LR à l'Assemblée nationale, Laurent Wauquiez, ce qui le met aujourd'hui sur une rampe lancement pour briguer l'Elysée dans moins de deux ans.
DES PROPOS "INACCEPTABLES"
"Rentrer dans ce gouvernement, ce n'est pas se 'macroniser', ça n'est pas se dissoudre, ça n'est pas la confusion", dit-il à Valeurs Actuelles. "Les Français veulent une droite utile, dans l'action, mais une droite qui ne renonce pas à son identité."
Bruno Retailleau tacle au passage l'ancien Premier ministre Edouard Philippe, candidat à l'Elysée, soupçonné de vouloir reprendre la formule "en même temps" chère Emmanuel Macron.
"Edouard Philippe conçoit son espace politique de la gauche à la droite. Je crois que cet 'en même temps' conduit à l'immobilisme. Ça ne marche pas, on ne peut pas mélanger l'huile et l'eau", dit-il.
Des propos jugés "inacceptables" par le parti présidentiel Renaissance dirigé par l'ancien Premier ministre Gabriel Attal.
"Le temps passé à diviser et à déclencher ces polémiques est du temps perdu pour l'action au service des Français", peut-on lire dans un message posté sur X.
Sur le même réseau, la ministre de l'Education, Elisabeth Borne, accuse son confrère de "tenter de diviser le socle commun" au risque d'"affaiblir les remparts contre les extrêmes".
"Agir ensemble exige du respect mutuel", souligne l'ancienne Première ministre.
Une proche de Bruno Retailleau pense que l'heure de quitter le gouvernement n'est pas venue.
"Je ne vois pas quelles seraient les raisons qui le conduiraient à démissionner", dit-elle. "En entrant au gouvernement, nous avons pris nos responsabilités. S'il décidait de partir ce serait une décision de sa famille politique, qui se prendrait collectivement."
A l'approche des élections municipales et présidentielle, les appétits s'aiguisent.
"Le 'macroniste' historique que je suis se dit que vu l'âge d'Emmanuel Macron, le 'macronisme' survivra certainement au 'retaillisme' dont on attend de voir s'il naîtra vraiment", sourit un proche du chef de l'Etat.
(Reportage Elizabeth Pineau, avec Michel Rose)
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