Dans un entretien à France 5 , l'ex-ministre de l'Economie et des Finances maintient avoir averti le président de la République sur l'état des comptes du pays, dans un courrier écrit en avril 2024. Cette alerte, suggérant une loi de finances rectificative pour corriger le dérapage budgétaire, était restée lettre morte, en pleine campagne des élections européennes.
Bruno Le Maire, à l'Assemblée nationale, le 7 mai 2024 ( AFP / LUDOVIC MARIN )
"On ne ment pas aux Français. Je n'ai jamais menti aux Français". Dans une édition spéciale de C dans l'Air diffusée dimanche 9 novembre, Bruno Le Maire a détaillé les raisons de sa lettre secrète envoyée au président de la République, dont le contenu a été révélé dans l'émission de France 5 , consacrée au dérapage du déficit public.
Dans cette missive, datée du 6 avril 2024, Bruno Le Maire alertait le président de la République sur le dérapage des comptes publics et demandait des mesures d'économies pour limiter le déficit à 4,9% du PIB en 2024 ainsi qu'une loi de finances rectificative. Des recommandations qui n'avaient pas été suivies par Emmanuel Macron.
Interrogé sur la mauvaise surprise enregistrée par Bercy sur les 42 milliards de recettes manquantes par rapport aux prévisions initiales pour 2024, Bruno Le Maire explique ne pas avoir de "réponse". "J'aimerais avoir une réponse à apporter aux Français, je ne l'ai pas. Je reconnais avec beaucoup d'humilité : nous nous sommes plantés sur les recettes. Et plantés big time !" , lance t-il.
"Le Conseil des ministres est un lieu où l'on ne discute pas"
Le ministre juge que son alerte n'a pas été écoutée. "Je suis toujours celui qui leur a dit la vérité sur la nécessité de rétablir les comptes", mais "il n'y a pas pire sourds que ceux qui ne veulent pas entendre" , accuse t-il.
Bruno Le Maire justifie ainsi sa démarche de ne pas avoir lancé son alerte face à ses collègues du gouvernement d'alors. "Le Conseil des ministres est un lieu où l'on ne discute pas. C'est un lieu où on fait passser des nominations, mais comme il n'y a pas de secret dans le Conseil des ministres et que dès que vous dites quelque chose ça se retrouve dans le Canard Enchainé, il vaut mieux se taire". "Quand c'est grave, il faut écrire! Quand vous avez beaucoup discuté, dit qu'il fallait réagir qu'il fallait que les ministres soutiennent, et que vous voyez tout autour de la table des sourires narquois du genre 'cause toujours', il y a un moment où vous prenez votre plume, parce que c'est votre responsabilité", a t-il encore abondé.
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Le ministre affirme ainsi avoir suggéré l'option d'une loi de finances rectificative, écartée ensuite par l'Elysée. Désormais, ces révélations sont reprises par les oppositions, LFI dénonçant notamment une "omission d'Etat".
Le gouvernement appelle à regarder devant
La porte-parole de l'actuel gouvernement a réagi lundi 10 novembre à la mi-journée, jugeant que "le président de la République a pris toutes les mesures nécessaires durant cette année 2024 pour réduire les déficits, à commencer par le gel de dix milliards d'euros intervenu de mémoire en mars 2024".
"Je me souviens au passage des discussions qu'il y a pu avoir à l'Assemblée nationale où tous les groupes confondus ont reproché à Bruno Le Maire, ont reproché au président de la République de faire ces économies-là, alors que c'était pourtant bien nécessaire", a ajouté Maud Bregeon. Elle a invité la classe politique à travailler à la réduction du déficit pour les années à venir "plutôt que de regarder dans le rétroviseur".
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