par Timour Azhari, Suleiman Al-Khalidi et Maya Gebeily
Le gouvernement syrien a mal interprété la façon dont Israël réagirait au déploiement de ses troupes dans le sud de la Syrie, encouragé par des déclarations faites par les Etats-Unis selon lesquelles le pays devrait être gouverné comme un Etat centralisé, ont déclaré à Reuters huit sources au fait de la question.
Israël a mené une série de puissantes frappes aériennes à Damas mercredi, endommageant le ministère syrien de la Défense et ciblant un site proche du palais présidentiel, dans le but affiché d'empêcher le gouvernement de déployer des troupes dans le Sud.
Damas avait précédemment déployé des troupes à Soueïda pour mettre fin aux combats opposant des combattants bédouins à des factions druzes, une minorité religieuse également présente au Liban et en Israël.
Les troupes envoyées par le gouvernement syrien ont été accusées de commettre des violations généralisées contre les Druzes et ont essuyé des assauts de l'armée israélienne avant de se retirer, en vertu d'une trêve conclue mercredi.
Damas pensait avoir reçu le feu vert des Etats-Unis et d'Israël pour envoyer ses forces dans le sud de la Syrie, bien que l'Etat hébreu lui ai demandé de manière répétée de ne pas le faire, selon les sources.
Les sources ont indiqué que Damas était parvenu à cette conclusion en se basant sur les propos émis en public et en privé par l'émissaire américain pour la Syrie Tom Barrack, ainsi que sur le début des pourparlers avec Israël.
Tom Barrack a déclaré publiquement et en privé que la Syrie devrait être "un seul pays", sans zones autonomes contrôlées par les communautés druzes, kurdes ou alaouites.
Un porte-parole du département d'Etat américain a refusé de commenter les discussions diplomatiques privées, mais a déclaré que les Etats-Unis soutenaient l'unité territoriale de la Syrie.
"L'Etat syrien a l'obligation de protéger tous les Syriens, y compris les groupes minoritaires", a déclaré le porte-parole, exhortant le gouvernement syrien à demander des comptes aux auteurs de violences.
Un haut fonctionnaire du ministère syrien des Affaires étrangères a nié que les déclarations de Tom Barrack aient influencé la décision de déployer des troupes dans le sud de la Syrie.
Selon lui, cette décision a été prise sur la base de "considérations purement nationales" et dans le but de "mettre fin à l'effusion de sang, de protéger les civils et d'empêcher l'escalade du conflit".
Une source syrienne et une source occidentale au fait du dossier ont déclaré que Damas pensait que les pourparlers en matière de sécurité qui se sont déroulés la semaine dernière avec Israël avaient abouti à un accord sur le déploiement de troupes dans le sud de la Syrie afin de placer Soueïda sous le contrôle du gouvernement syrien.
Israël a annoncé vendredi avoir accepté d'accorder aux forces syriennes de sécurité un accès limité à la région de la ville de Soueïda pour les prochaines 48 heures.
APPROBATION TACITE
Un responsable militaire syrien a déclaré que la correspondance avec les Etats-Unis avait conduit Damas à croire qu'il pouvait déployer des forces dans le sud de la Syrie sans qu'Israël ne les confronte.
Il a ajouté que les responsables américains n'avaient pas réagi lorsqu'ils avaient été informés du projet, ce qui avait conduit les dirigeants syriens à penser que le déploiement de troupes avait été tacitement approuvé et "qu'Israël n'interviendrait pas".
Un diplomate basé à Damas a déclaré que les autorités syriennes avaient fait preuve d'un excès de confiance "sur la base de messages américains qui se sont avérés ne pas refléter la réalité".
L'une des sources a estimé que Damas avait fait une "grave erreur" en déployant des troupes à Soueïda, ajoutant que celles-ci avaient commis des violations généralisées contre les Druzes ce qui avait offert à Israël l'opportunité de réagir avec force.
Le Réseau syrien des droits de l'homme a déclaré vendredi avoir dénombré au moins 321 morts dus aux affrontements à Soueïda, parmi lesquels des membres du personnel médical, des femmes et des enfants, précisant que ce bilan incluait des exécutions commises par toutes les parties.
(Avec Tom Perry et Crispian Balmer; version française Camille Raynaud)
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