Photo de la salle de la cour d'assises des Landes de Mont-de-Marsan où s'est ouvert le procès d'une mère accusée d'avoir empoisonné ses filles aux médicaments le 24 novembre 2025 ( AFP / Gaizka IROZ )
Maylis Daubon a été condamnée à 30 années de réclusion criminelle pour avoir empoisonné ses deux filles, dont l'une est morte, et avoir voulu faire assassiner son ex-mari, mercredi devant la cour d'assises des Landes.
À Mont-de-Marsan, l'accusée âgée de 53 ans a été reconnue coupable de l'empoisonnement de sa fille Enea, morte à l'âge de 18 ans après une absorption massive de médicaments. Des analyses ont également révélé la prise importante d'un somnifère réservé aux adultes chez la fille cadette Luan, mais cette dernière a défendu l'innocence de sa mère à la barre.
"La cour a estimé votre culpabilité acquise" sur les faits concernant Enea et "la vie de Luan a été sauvée du fait de votre interpellation", a déclaré Emmanuelle Adoul, la présidente de la cour d'assises, au moment du verdict.
La magistrate a justifié la décision, prise à la majorité, "au regard de la gravité des faits, de la mort d'Enea, de leur durée, des modes opératoires et des préjudices pour les parties civiles".
La cour a assorti la peine d'une période de sûreté de 20 ans, plus longue de cinq ans que celle requise par l'avocat général, qui avait également demandé 30 ans de réclusion criminelle.
Dans son box, Maylis Daubon, est restée stoïque, la tête basse, dissimulée par ses cheveux, sans regard pour la cour. Elle a dix jours pour faire appel.
- Convulsions -
Enea, déscolarisée depuis plus d'un an et souffrant de troubles psychologiques, a été prise d'une crise de convulsions le 13 novembre 2019 au domicile familial. Sa mort a été causée par une prise de Propranolol, un bêta-bloquant qui ralentit l'activité du cœur, à un taux "dix fois supérieur à la dose thérapeutique", selon l'enquête.
Selon les réquisitions de l'avocat général, "rien" ne pouvait étayer la thèse du suicide de la fille aînée, avancée par l'accusée pour clamer son innocence. Pour le ministère public, la mère avait deux mobiles: "J'ai une emprise sur quelqu'un qui va m'échapper, je ne peux pas le supporter, je le tue. C'est le syndrome de Münchhausen par procuration. Et la détestation du père, tellement forte".
Yannick Reverdy, ancien international français de handball, avait divorcé de Maylis Daubon en 2009, qui l'accusait de violences, et avait ensuite perdu contact avec ses filles. Au moment du verdict, il était en larmes, comme sa compagne et les grands-parents.
L'avocat général a présenté Enea "comme une enfant affaiblie par la surmédicalisation, avec une soumission chimique qui entraîne une abolition du libre arbitre".
Des éléments de preuve dans le procès de Maylis Daubon sont présentés au tribunal, le 24 novembre 2025 à Mont-de-Marsan (Landes) ( AFP / Gaizka IROZ )
Confrontée aux "incohérences" relevées dans ses déclarations, aux soupçons de falsifications d'ordonnances, l'accusée a persisté à l'audience dans ses dénégations.
Pour l'avocat général, "l'absorption de Propranolol" a eu lieu le matin des faits. "On lui donne ou elle le prend, je ne peux l'affirmer, mais l'absorption a été faite dans des conditions d'emprise", a dit Marc Bourragué.
"On ne peut pas se cantonner à des hypothèses pour asseoir son intime conviction", avait plaidé Me Gérard Danglade, l'un des deux avocats de Maylis Daubon, demandant aux jurés de "juger une mère avec des défauts et des comportements pas toujours adaptés", mais en évacuant des "accusations fondées essentiellement sur sa personnalité".
- "Emprise" -
L'avocat général n'a pas apporté la "preuve de la culpabilité", avait pour sa part allégué Me Carine Monzat, décrivant méticuleusement Enea comme une adolescente "aux troubles psychiatriques sévères et chroniques" dont les intentions suicidaires étaient connues de certains de ses proches.
La fille cadette Luan a aussi maintenu pendant le procès que sa mère n'était "pas coupable", revenant sur leur enfance "heureuse" mais "compliquée" par le divorce des parents et des violences imputées à son père.
Yannick Reverdy s'adresse à la presse, le 24 novembre 2025 à Mont-de-Marsan (Landes) ( AFP / Gaizka IROZ )
Ce dernier accuse son ex-femme de s'être servi de ses filles comme "outil de sa vengeance" contre lui.
Devant la cour, un expert psychiatre a décrit "l'emprise" que la mère exerçait sur ses filles, vouée à "s'aggraver" à mesure qu'elles grandiraient, doublée d'une volonté d'"éliminer le père".
Outre l'empoisonnement d'Enea et Luan, Maylis Daubon était aussi soupçonnée d'avoir voulu faire assassiner son ex-mari en soudoyant des codétenues à la prison de Pau.
Mme Daubon a dénoncé des "ragots de prison" à ce sujet, mais la cour l'a également déclarée coupable de ces faits.

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