(Actualisé avec détails, déclarations)
par Yimou Lee et Joe Cash
La Chine a effectué mardi pour la deuxième journée consécutive des manoeuvres militaires d'une ampleur sans précédent autour de Taïwan, déployant des navires d'assaut amphibies, des bâtiments de guerre et des bombardiers pour simuler un blocus de l'île.
Effectuant des tirs à balle réelle durant dix heures, la Chine a livré une démonstration de force autour de l'île démocratiquement gouvernée qu'elle tente de ramener dans son giron.
Des tirs des roquettes ont été effectués et des frappes aériennes et maritimes simulées, le tout filmé et diffusé par les médias d'Etat chinois pour vanter la supériorité technologique et militaire de Pékin.
Ces manoeuvres, baptisées "Mission Justice 2025", interviennent moins de deux semaines après que les Etats-Unis ont annoncé une vente d'armes à Taïwan d'un montant inédit de 11 milliards de dollars. Washington est le principal fournisseur d'armes de Taipei.
Pour la première fois, l'armée chinoise a déclaré que ces exercices visaient à dissuader toute intervention extérieure.
"Toute force extérieure qui tenterait d'intervenir dans la question taïwanaise ou de s'immiscer dans les affaires intérieures de la Chine se heurterait à coup sûr à la résistance farouche de l'Armée populaire de libération chinoise", a déclaré lundi le Bureau des affaires taïwanaises de Chine dans un communiqué.
Une source sécuritaire taïwanaise a déclaré à Reuters que Taipei surveillait de près ce sixième cycle d'exercices militaires de la Chine depuis 2022, et notamment de possibles tirs de missiles au-dessus de l'île comme ce fut le cas il y a trois ans, quand Pékin avait ainsi protesté contre la visite à Taïwan de Nancy Pelosi, alors 'speaker' de la Chambre américaine des représentants.
D'après ce représentant de haut rang, il semble que l'armée chinoise profite de ces manoeuvres pour s'entraîner à viser des cibles terrestres telles que les systèmes américains de lancement de missiles HIMARS, dont la portée d'environ 300 kilomètres pourrait potentiellement permettre d'atteindre des zones côtières du sud de la Chine continentale.
LES "MARTEAUX DE LA JUSTICE"
Pékin, qui considère Taïwan comme une province renégate, répète de longue date ne pas exclure de recourir à la force pour la placer sous son contrôle.
Le président américain Donald Trump a minimisé l'importance de ces exercices lundi, vantant ses relations avec le président chinois Xi Jinping et rappelant que la Chine mène des exercices navals autour de Taïwan depuis 20 ans.
Les manoeuvres de cette semaine sont toutefois les plus importantes en termes de périmètre d'action et les plus proches de Taïwan à ce jour.
Une porte-parole de la Commission européenne a déclaré mardi que les exercices militaires menés par la Chine autour de Taïwan accentuaient encore les tensions dans la région.
Il a ajouté que l'Union européenne avait un intérêt direct à préserver le statu quo dans le détroit de Taïwan.
"Nous nous opposons à toute action unilatérale visant à modifier le statu quo, en particulier par la force ou la coercition", a-t-il dit.
Le détroit de Taïwan est un axe important de transit commercial, tandis que l'espace aérien au-dessus de l'île sert de corridor entre la Chine et les marchés à forte croissance d'Asie du Sud-Est et d'Asie de l'Est.
La presse officielle chinoise a de nouveau diffusé mardi des images de propagande, dont une, intitulée "Les Marteaux de la Justice", montrant le président taïwanais Lai Ching-te être écrasé par un marteau frappant le sud de Taïwan tandis qu'un autre marteau s'écrase sur le nord de l'île.
Simuler un blocus des deux ports essentiels de Taïwan - Keelung dans le sud de l'île et Kaohsiung dans le nord - est au coeur des manoeuvres, a fait savoir lundi le commandement militaire du théâtre oriental chinois.
Une ébauche d'un rapport du Pentagone, que Reuters a pu consulter la semaine dernière, estime que "la Chine s'attend à être capable de livrer une guerre contre Taïwan et de la remporter d'ici la fin de l'année 2027", soit pour le centenaire de la création de l'armée chinoise.
Reste que la campagne de lutte anti-corruption menée par le président Xi Jinping dans les rangs de l'armée chinoise a soulevé des interrogations sur l'état de préparation de celle-ci, alors que huit généraux ont été exclus en octobre dernier.
(Joe Cash à Pékin, Yimou Lee à Taipei; version française Jean Terzian et Etienne Breban ; édité par Sophie Louet)

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