La Banque centrale européenne (BCE) devrait maintenir jeudi ses taux directeurs inchangés, l'inflation restant contenue en zone euro, mais la probable chute du gouvernement français et la faiblesse persistante de l'économie allemande lui compliquent la donne.

( AFP / DANIEL ROLAND )
En juillet, la présidente de la BCE Christine Lagarde avait affirmé que la banque centrale était "dans une bonne position", sous-entendu pas pressée de bouger, après avoir ramené en juin le taux de dépôt – son principal taux directeur – à 2%, via huit baisses successives.
En août, l'inflation en zone euro est restée quasi stable à 2,1% sur un an, après 2% en juillet, soit autour de la valeur cible de 2% fixée par la BCE.
La réunion de jeudi aurait pu être routinière si les deux principales économies de la zone euro n'envoyaient pas de signaux préoccupants.
- Crise politique en France -
La France risque de replonger dans l'instabilité politique après la probable chute lundi en soirée du gouvernement de François Bayrou, à l'issue du vote de confiance à l'Assemblée nationale.
"Tous les risques de chute de gouvernement dans la zone euro sont préoccupants", a prévenu Mme Lagarde, rappelant que les "développements politiques" peuvent influencer l'économie et la perception des investisseurs.
Les marchés de la dette française ont déjà réagi: le rendement de l'emprunt à trente ans a retrouvé ses niveaux de la crise de 2011.
Les investisseurs continuent toutefois de faire confiance à la signature française.
Les problèmes de dette de la France "ont peu de chances d'affecter directement les décisions de taux de la BCE ", relativise Andrew Kenningham, économiste chez Capital Economics.
Mais ils risquent de ralentir la réduction par la BCE de son stock d'obligations souveraines, héritage des années de crise, selon l'expert.
La BCE pourrait même devoir intervenir sur les marchés pour contenir les tensions sur les taux souverains et "éviter une contagion à l'Italie ou à d'autres pays" plus vertueux, ajoute-t-il.
Elle peut racheter des obligations d'un pays subissant une envolée de ses coûts de financement si elle juge qu'il n'en est pas responsable.
"Ce n'est pas le cas de la France actuellement", rappelle Carsten Brzeski, économiste chez ING.
- Panne prolongée en Allemagne -
Sur le plan de la croissance économique, les piètres performances de l'Allemagne – recul de 0,3% du PIB au deuxième trimestre – viennent assombrir le tableau d'ensemble: la zone euro a progressé moins vite d'avril à juin qu'au premier trimestre.
Cette fragilité laisse craindre une croissance déprimée au second semestre et donc une "pression baissière sur l'inflation", selon Eric Dor, professeur à l'IESEG.
En réaction, la BCE pourrait de nouveau relâcher la bride sur les taux afin de relancer l'économie.
Mais l'inflation pourrait aussi grimper avec les droits de douane américains à 15%, via la hausse des coûts des exportations américaines et l'augmentation des prix en Europe pour compenser la baisse des ventes aux États-Unis, explique M. Dor.
Les tensions salariales dues aux pénuries de main-d'œuvre en zone euro ont aussi de quoi faire grimper le niveau général des prix.
Au sein de la BCE, le débat entamé en juillet sur la trajectoire attendue de l'inflation devrait se poursuivre.
Les gardiens de l'euro disposeront jeudi de nouvelles projections économiques, qui devraient, d'après les attentes, légèrement revoir en baisse les prévisions de croissance et d'inflation pour 2026.
Mais devant la presse, Mme Lagarde devrait s'en tenir à une communication prudente, croient les observateurs.
"La BCE ne semble pas prête à quitter sa +bonne position+ pour l'instant", résume M. Brzeski, "mais une baisse des taux plus tard dans l'année ne peut être exclue".
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