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Les paramilitaires des FSR ont pris El-Facher
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L'Onu évoque de possibles massacres
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Les FSR démentent toute exécution sommaire
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La présidente de la Croix-Rouge juge la situation "horrible"
par Timour Azhari
L'histoire se répète au Darfour, au Soudan, avec les massacres signalés lors de la chute de la ville d'El-Facher aux mains des paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR) la semaine dernière, a déclaré la présidente du Comité international de la Croix-Rouge (CICR).
La prise d'El-Facher, dernier bastion de l'armée soudanaise au Darfour, pourrait constituer un tournant dans la guerre civile au Soudan car elle donne de facto aux FSR le contrôle de plus d'un quart du territoire de ce pays d'Afrique de l'Est.
Des centaines de civils et de combattants désarmés pourraient avoir été tués lors de la chute de la ville, a estimé vendredi le Haut Commissariat aux droits de l'homme des Nations unies. Des témoins ont rapporté que des combattants des FSR avaient séparé les hommes des femmes et des enfants avant que ne retentisse le crépitement d'armes automatiques.
Les FSR démentent s'en prendre aux civils.
La situation au Soudan est "horrible", a dit la présidente du CICR, Mirjana Spoljaric, à Reuters au cours d'une interview réalisée durant le week-end lors d'une visite à Ryad.
Selon elle, des dizaines de milliers de personnes ont fui El-Facher après l'arrivée des paramilitaires et il est probable que des dizaines de milliers d'autres soient piégées à l'intérieur de la ville sans accès à l'eau, à la nourriture ni aux soins médicaux.
"C'est l'histoire qui se répète et c'est pire à chaque fois qu'un endroit est pris par l'autre camp", a-t-elle ajouté.
Les violences ethniques déclenchées par la répression d'une rébellion au Darfour ont fait des centaines de milliers de morts dans les années 2000. Les FSR trouvent leur origine dans les milices arabes "djandjaouïd" mobilisées par le pouvoir soudanais à l'époque.
Le CICR est aussi "extrêmement préoccupé" par les témoignages faisant état d'un massacre à l'hôpital saoudien d'El-Facher, dernier établissement de santé fonctionnel dans la ville, même s'il n'a pas encore pu établir les faits, a dit Mirjana Spoljaric.
APPEL À LA PROTECTION DES CIVILS
Selon des témoignages reçus par le personnel du CICR dans la ville voisine de Taouila, les habitants fuyant El-Facher "s'écroulaient parfois voire, mouraient d'épuisement ou de leurs blessures", a ajouté Mirjana Spoljaric, jugeant que la situation allait "absolument au-delà de ce que l'on peut considérer comme acceptable".
Les Etats-Unis accusent les FSR de génocide à Geneina, autre ville du Darfour, lors d'une précédente bataille de cette guerre civile en cours depuis deux ans et demi, ce que les paramilitaires démentent. Des organisations de défense des droits humains et des responsables américains ont aussi accusé les FSR et leurs milices alliées de nettoyage ethnique dans la région.
Interrogée sur son message aux puissances étrangères susceptibles de soutenir les belligérants, Mirjana Spoljaric a répondu: "Les Etats en particulier qui ont une influence sur les parties au conflit ont la responsabilité de faire le nécessaire pour les maîtriser et de s'assurer qu'ils protègent les populations civiles."
Les Emirats arabes unis sont accusés de fournir de grandes quantités d'équipements militaires aux FSR, ce qu'ils démentent régulièrement. Les autorités installées à Port-Soudan bénéficient pour leur part du soutien de divers pays étrangers dont l'Egypte et ont eu recours à des drones de conception iranienne l'an dernier pour tenter d'inverser le cours du conflit.
Plus de 70.000 personnes ont fui El-Facher depuis le 26 octobre, selon l'Organisation internationale pour les migrations. Peu d'informations filtrent en revanche au sujet des près de 200.000 autres habitants qui seraient restés dans la ville au cours des 18 mois de siège et d'assaut menés par les FSR.
Pour Mirjana Spoljaric, le monde traverse une "décennie de guerre", le nombre de conflits armés ayant doublé au cours des 15 dernières années à environ 130.
Cette prolifération est alimentée par l'évolution rapide des technologies militaires, notamment l'émergence des drones, qui "crée un environnement où plus aucun endroit n'est sûr", a-t-elle dit.
Lors de l'assaut ayant conduit à la chute d'El-Facher, des habitants ont déclaré à Reuters qu'ils devaient se réfugier dans des abris souterrains pour se protéger des drones et des obus tirés sur des camps de déplacés, des cliniques et des mosquées.
(Timour Azhari à Ryad, version française Bertrand Boucey, édité par)

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