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Face-à-face entre Trump et Poutine en Alaska, Ukraine et contrôle des armes au menu
information fournie par Reuters 15/08/2025 à 22:00

(Actualisé avec début des discussions à Anchorage)

par Steve Holland, Andrew Osborn et Darya Korsunskaya

Le président américain Donald Trump et son homologue russe Vladimir Poutine sont arrivés vendredi en Alaska et ont entamé des discussions très attendues sur l'Ukraine, avec une incertitude sur l'accord de cessez-le-feu voulu par le président américain.

Une offre du président russe sur le contrôle des armes pourrait permettre aux deux dirigeants de sauver les apparences en ne repartant pas bredouilles.

Organisée sur la base militaire aérienne des Etats-Unis à Anchorage, cette première réunion en face-à-face entre Donald Trump et Vladimir Poutine depuis 2018 s'accompagne de craintes, en Europe et en Ukraine, que le président américain effectue des concessions importantes au détriment de Kyiv.

Donald Trump a cherché à apaiser ces inquiétudes à bord d'Air Force One, affirmant qu'il laisserait l'Ukraine décider sur la question territoriale. "Je ne suis pas ici pour négocier pour l'Ukraine, je suis ici pour les réunir autour d'une table."

Alors que la guerre fait rage depuis près de quarante-deux mois, le président ukrainien Volodimir Zelensky, qui n'a pas été invité aux négociations, a déclaré que le sommet devrait ouvrir la voie à une "paix juste" et à des négociations tripartites.

De telles discussions tripartites seraient encore plus importantes que sa rencontre avec Vladimir Poutine, a dit Donald Trump, en écho à des commentaires de la Maison blanche, laquelle a tempéré les attentes en présentant le sommet comme une "prise de contact" entre les présidents américain et russe.

Interrogé par les journalistes à bord d'Air Force One sur ce qui pourrait faire de ce sommet un succès, Donald Trump a répondu : "Je ne peux pas vous le dire. Je ne sais pas. Rien n'est gravé dans le marbre. Je veux certaines choses. Je veux un cessez-le-feu."

Après avoir atterri à Anchorage, Donald Trump est allé à la rencontre de Vladimir Poutine à sa sortie d'avion, esquissant quelques applaudissements à l'égard du président russe. Les deux hommes se sont ensuite salués d'une chaleureuse poignée de main, avant de quitter le tarmac dans la même voiture.

Pour ces discussions, Donald Trump est accompagné du secrétaire d'Etat Marco Rubio et de l'envoyé spécial Steve Witkoff et Vladimir Poutine du ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov et de son conseiller Iouri Ouchakov. Les deux dirigeants devaient initialement s'entretenir en tête-à-tête.

LE SPECTRE DE SANCTIONS ?

Revenu au pouvoir en janvier, Donald Trump a opéré d'emblée un rapprochement avec la Russie, marquant un revirement par rapport à la politique adoptée par son prédécesseur Joe Biden, qui avait apporté un soutien sans faille à l'Ukraine et décidé avec les Européens de trains de sanctions contre Moscou.

En plus d'être une promesse de campagne électorale, obtenir un accord de paix en Ukraine revêt une importance particulière pour l'ancien magnat de l'immobilier, ouvertement désireux de recevoir cette année le prix Nobel de la paix, dont il ne cesse de répéter l'importance à ses yeux.

Européens et Ukrainiens ont eux pour préoccupation qu'aucun accord défavorable à Kyiv ne soit scellé. Ils ont dit avoir reçu mercredi, au cours d'une réunion virtuelle, des garanties de la part de Donald Trump que les questions territoriales seraient discutées seulement en présence de l'Ukraine.

Volodimir Zelensky a déclaré que le président américain s'est également dit favorable à l'idée d'apporter des garanties sécuritaires à Kyiv dans le cadre d'un accord mettant fin à la guerre. Donald Trump n'en a pas fait mention publiquement.

Pour le Kremlin, l'enjeu est d'obtenir que Washington favorise un allègement des vastes sanctions occidentales mises en place contre la Russie depuis l'invasion de l'Ukraine lancée en février 2022. Ou, tout du moins, que les Etats-Unis n'imposent pas de sanctions supplémentaires, comme a menacé de le faire Donald Trump.

A la veille du sommet, Vladimir Poutine a évoqué la possibilité d'un nouvel accord russo-américain de non-prolifération des armes nucléaires, conscient qu'une telle offre est à même de plaire à Donald Trump, alors que l'ultime pacte encore en vigueur entre les deux grandes puissances nucléaires doit prendre fin en février prochain.

Le président russe a aussi salué les "efforts sincères" de son homologue américain pour mettre fin à la guerre avec l'Ukraine.

FERMETÉ

Donald Trump a dit jeudi penser que Vladimir Poutine voulait sceller un accord de paix, continuant d'entretenir le doute sur les conclusions potentielles du sommet.

Une source proche du Kremlin a rapporté à Reuters que les deux camps semblaient avoir été en mesure de trouver un terrain d'entente sur certaines questions, non-spécifiées, en amont des discussions de vendredi.

"Apparemment, certains détails vont être approuvés avant demain (vendredi) parce que dire non à Trump n'est pas possible, et nous ne sommes pas en position de refuser" à cause du problème des sanctions, a déclaré cette source.

Lors de ses entretiens téléphoniques avec Donald Trump ces derniers mois, ou par le biais des hauts représentants chargés de mener des négociations directes avec Kyiv - sans avancée notable -, Vladimir Poutine a affiché sa fermeté à l'égard des conditions majeures qu'il réclame pour conclure un quelconque accord avec l'Ukraine.

Un compromis pourrait toutefois prévoir l'instauration d'une trêve aérienne progressive, bien que des mesures similaires ont déjà été annoncées sans succès plus tôt cette année, les deux camps s'accusant mutuellement d'enfreindre une trêve partielle.

Des analystes ont dit penser que Vladimir Poutine pourrait tenter de faire croire à Donald Trump qu'il répond aux demandes de celui-ci, tout en restant libre de mener une nouvelle escalade en Ukraine s'il le souhaite.

Si les Russes sont "capables de proposer un accord qui s'apparente à une certaine forme de cessez-le-feu mais laisse à la Russie le contrôle des dynamiques escalatoires, qui ne met pas en place de réelle dissuasion sur le terrain ou dans le ciel de l'Ukraine (...), alors ce sera une issue formidable aux yeux de Poutine", a commenté Sam Greene, du Centre d'analyse des politiques européennes, basé à Washington.

DISSOCIER LIENS BILATÉRAUX ET UKRAINE

Volodimir Zelensky a régulièrement accusé Vladimir Poutine de bluffer concernant son réel désir de sceller un accord de paix - un avis partagé par des responsables européens -, dénonçant des manoeuvres du président russe destinées à éviter des sanctions supplémentaires. Le président ukrainien a également exclu de céder des territoires à la Russie.

Donald Trump a déclaré récemment qu'un "échange de territoires" pourrait être indispensable pour sortir de l'impasse diplomatique, inquiétant les Européens et Kyiv.

La Russie, qui a annexé la péninsule de Crimée en 2014, a pris le contrôle d'environ un cinquième du territoire ukrainien dans le cadre de son offensive. L'Ukraine, qui a réalisé un temps une percée dans la région frontalière de Koursk, n'occupe aucune région russe.

Moscou entend obtenir le contrôle complet du Donbass, coeur industriel de l'Est ukrainien, qui comprend les régions de Louhansk et de Donetsk où, malgré des avancées constantes de l'armée russe, Kyiv n'a pas entièrement cédé.

Vladimir Poutine réclame également la garantie que l'Ukraine ne sera jamais autorisée à intégrer l'Otan et veut limiter les capacités militaires de Kyiv. Volodimir Zelensky dénonce des demandes inacceptables qui équivaudraient selon lui à capituler.

Un flou demeure sur la possibilité que Vladimir Poutine effectue des concessions, alors que le président russe, au pouvoir depuis un quart de siècle, ambitionne de revendiquer une victoire dans cette guerre pour soigner son héritage.

Il souhaite également que Donald Trump restaure les liens politiques, économiques et d'affaires entre la Russie et les Etats-Unis - et, dans l'idéal, sans que ces démarches ne soient liées à de quelconques avancées sur le dossier ukrainien.

(Rédigé par Guy Faulconbridge, Gareth Jones et James Oliphant ; version française Jean Terzian et Kate Entringer)

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