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"Bloquons tout", mouvement aux contours flous qui complique encore la donne pour Macron
information fournie par Reuters 09/09/2025 à 16:27

Préparation de la manifestation nationale du 10 septembre en France

Préparation de la manifestation nationale du 10 septembre en France

par Elissa Darwish

PARIS (Reuters) -Le mystère entourant les actions à venir et la portée du mouvement "Bloquons tout", qui appelle à mettre la France à l'arrêt mercredi 10 septembre, déconcertent les services de sécurité et complique encore la donne pour Emmanuel Macron, déjà contraint de trouver un nouveau Premier ministre après la chute du gouvernement Bayrou.

Selon des chercheurs et des responsables, "Bloquons tout" a vu le jour sur les réseaux sociaux au mois de mai parmi des groupes classés politiquement à droite, mais il a depuis été repris par la gauche et l'extrême gauche.

En raison de l'absence d'une direction centralisée et d'une organisation via les réseaux sociaux et Telegram, il est difficile d'estimer les perturbations que les participants au mouvement vont provoquer mercredi.

Le gouvernement ne prend aucun risque et prévoit de déployer 80.000 policiers et gendarmes pour contenir des manifestations qui pourraient rassembler 100.000 personnes au total et viser les aéroports, les gares et les autoroutes avec des opérations de blocage et des actes de sabotage.

Le soutien en ligne de "Bloquons tout", qui fait boule de neige, illustre un profond mécontentement populaire contre ce que les manifestants considèrent comme une élite dirigeante dysfonctionnelle prônant une austérité douloureuse.

"Je suis ultra remontée contre le système politique en place en France, qui fait la part belle aux grandes entreprises, aux richissimes milliardaires (...) et petit à petit grignote les droits des citoyens de la masse populaire française, qui est celle qui fait tourner le pays", a déclaré Mathieu Jaguelin, guide touristique dans le sud-ouest âgée de 43 ans, membre de plusieurs groupes du mouvement sur Telegram.

Le ministère de l'Intérieur n'a pas souhaité commenter cet article.

"On ne tolérera aucun blocage, aucune violence", a déclaré lundi le locataire de la place Beauvau, Bruno Retailleau, sur France 2. "Je comprends la colère, mais (...) on ne peut pas la faire éclater dans la rue à travers la violence."

UNE NOUVELLE PHASE D'INSTABILITÉ SOCIALE ?

Le futur ex-Premier ministre François Bayrou a échoué lundi à obtenir la confiance des députés à l'issue d'un vote sans surprise qui a vu les forces d'opposition mettre à exécution leur menace de faire chuter le gouvernement en place depuis neuf mois, plongeant la France dans une nouvelle crise politique.

Reuters s'est entretenu avec six participants à la journée de mobilisation "Bloquons tout" de mercredi, qui invoquent un système politique inadapté à la situation actuelle.

Certains demandent une révision de la Constitution, tandis que d'autres appellent à la démission d'Emmanuel Macron et à augmenter les impôts pour les plus riches. Tous estiment que le mouvement est une réaction au chaos politique qui règne dans le pays et espèrent que les manifestations pousseront les responsables politiques à agir.

"Les pouvoirs publics et le gouvernement nous ont tellement trahis que je suis pas sûre qu'ils puissent vraiment répondre aux attentes du peuple", a déclaré Louise Nechin, une militante de gauche à Paris.

"Bloquons tout" est parfois comparé au mouvement des "Gilets jaunes" de 2018, qui a commencé par des appels à manifester contre la hausse du prix des carburants avant de s'étendre aux questions du coût de la vie et des inégalités.

Des milliards d'euros de baisses d'impôts avaient alors permis d'éteindre progressivement la contestation au bout de six mois, mais une certaine colère résiduelle anime toujours le mouvement "Bloquons tout".

Deux syndicats - la CGT et l'Union syndicale Solidaires - ont clairement apporté leur soutien à "Bloquons tout" et d'autres prévoient de faire grève le 18 septembre, ce qui pourrait marquer le début d'une nouvelle phase d'instabilité sociale pour Emmanuel Macron, au pouvoir depuis 2017.

LES COUPES BUDGÉTAIRES COMME CATALYSEUR

Selon Paola Sedda, spécialiste des mouvements en ligne à l'université de Lille, "Bloquons tout" est né de la colère suscitée par les coupes budgétaires proposées par François Bayrou, sur fond de défiance croissante à l'égard des institutions.

La profonde méfiance des activistes à l'égard des médias traditionnels et des institutions politiques a également rencontré un large écho, a-t-elle ajouté.

Selon une source des services de renseignement français s'exprimant sous couvert d'anonymat, des acteurs étrangers "opportunistes" incluant des groupes pro-russes et pro-iraniens "amplifient certains hashtags populaires, en particulier sur X" et tentent ainsi "d'instrumentaliser un contexte domestique sensible".

Toutefois, "le phénomène est plutôt marginal par rapport aux publications d'origine domestique".

Les ambassades de Russie et d'Iran à Paris n'ont pas répondu à des demandes de commentaires.

Un modérateur de "Bloquons tout" sur un canal Telegram, qui a refusé de donner son nom pour ne pas apparaître comme un meneur, a déclaré qu'il arrivait parfois que des comptes pro-Kremlin publient des messages, mais que ceux-ci étaient "systématiquement modérés ou critiqués".

"Cela ne change rien au fond : l'origine du mouvement et sa dynamique viennent de personnes réelles, ici, qui expriment leur colère et leur volonté de changement", a-t-il ajouté.

(Reportage Elissa Darwish, version française Benjamin Mallet, édité par Augustin Turpin)

6 commentaires

  • 17:55

    Il ne faut pas nommer un premier ministre avant au moins le 25 septembre. Laissez d’abord les mouvements du 10 et 18 s’essouffler et après on verra. Quoi que fasse, les français raleront. Ils ne votent pas râlent tout le temps.


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