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Face aux dérives, des éleveurs réhabilitent l'abattoir à la ferme
information fournie par Le Figaro 28/02/2019 à 10:41

Face aux dérives, des éleveurs réhabilitent l'abattoir à la ferme (Crédits photo: Annie Spratt - Unsplash)

Face aux dérives, des éleveurs réhabilitent l'abattoir à la ferme (Crédits photo: Annie Spratt - Unsplash)

FIGARO DEMAIN - La loi Alimentation ouvre la voie à une expérimentation de nouveaux dispositifs locaux. Des structures mobiles permettant d'accueillir le personnel et les outils d'un véritable abattoir à la ferme s'apprêtent à sillonner les routes et des projets de caissons d'abattage respectueux des animaux émergent.

Transport déplorable, animaux stressés, attente interminable, mauvais traitements, absence de transparence... La diffusion de vidéos choc sur les abattoirs mobilisent éleveurs et consommateurs pour demander un système plus respectueux des animaux. D'autant que la loi Alimentation ouvre la voie à une expérimentation de quatre ans sur des «dispositifs d'abattoirs mobiles en France».

Avant la loi Egalim, l'abattage d'animaux de boucherie (bovins, ovins, caprins, porcins, équidés) devait être pratiqué dans un abattoir agréé pour des raisons de traçabilité, de sécurité sanitaire, vétérinaire et de protection animale. L'abattage à la ferme était alors seulement autorisé s'il s'agit d'ovins, de caprins, de porcins, de volailles ou de lapins destinés à l'autoconsommation.

«La loi Egalim nous a permis d'avoir des interlocuteurs dans les couloirs du ministère beaucoup plus à l'écoute de nos questions, mais cela ne règle pas tout, les pressions sont encore là pour tenter d'empêcher le projet», confie Émilie Jeannin, à la tête d'un cheptel de Charolais en Côte-d'Or, en passe de lancer le premier abattoir mobile en France. Cette structure mobile pourra accueillir le personnel et les outils d'un véritable abattoir. Le camion se rendra sur les élevages pour les mises à mort, en présence d'un vétérinaire, afin de réduire le stress des animaux pendant les transports et offrir une meilleure traçabilité. «Je fais de la vente directe et, sur notre ferme, nous mettons tout en œuvre pour que nos animaux soient élevés dans les meilleures conditions possible, pour produire la meilleure viande possible. Nos bêtes sont sélectionnées et nourries uniquement à l'herbe, elles sont dociles et nous limitons le stress dès que nous pouvons. Toutefois, nous ne maîtrisons pas l'abattage, or la mise à mort et le transport sont des sources de stress pour eux». Outre le bien-être animal, «la façon d'abattre joue sur la qualité de la viande», souligne la passionnée.

Réduire le stress des transports

Jocelyne Porcher, directeur de recherches à l'INRA et Stéphane Dinard, éleveur en Dordogne partagent ce point de vue et se mobilisent également pour faire évoluer le système. Ensemble, ils ont créé l'association dont le nom est évocateur: «Quand l'abattoir vient à la ferme». «Nous avons beaucoup de nouveaux adhérents, il y a un élan d'initiatives et de projets. Des éleveurs sont de plus en plus nombreux à rechercher la proximité pour l'abattage de leurs animaux afin de réduire le stress», souligne Jocelyne Porcher. «C'est une revendication très forte des éleveurs qui sont dans un lien affectif et moral avec leurs bêtes et souffrent de les voir maltraitées», ajoute la sociologue et ex-éleveuse. Pendant des années, Stéphane Dinard, petit éleveur basé en Dordogne a ainsi préféré abattre ses bêtes chez lui, quitte à enfreindre la réglementation. En tuant ses animaux là où ils ont grandi, il souhaitait leur épargner le stress et la souffrance occasionnés par le transport et l'attente.

«Nous avons un projet d'abattage à la ferme afin d'éviter à nos animaux des heures de transports et leur permettre une mort digne. L'animal ne quitte jamais son lieu de vie, le changement et le transport sont vécus comme un vrai traumatisme», souligne Guylain Pageot coprésident avec Stéphane Dinard de l'association Quand l'abattoir vient à la ferme. «Nous planchons sur un outil fixe de mise en carcasse des animaux à la ferme. L'étourdissement se ferait à la ferme puis la saignée de l'animal inconscient aurait lieu dans un caisson qui serait le prolongement de l'abattoir à la ferme. Ensuite, ce caisson et la carcasse de l'animal seront transportés dans un lieu de découpe», ajoute l'éleveur laitier bio basé en Loire Atlantique.

Les éleveurs sont de plus en plus nombreux à réclamer d'autres solutions que celles des abattoirs classiques, de moins en moins nombreux. Dans les Yvelines, Éric Sanceau élève des vaches rares. Ses bovins n'ont pas un gabarit conventionnel, avec notamment de grandes cornes, ce qui pose un problème. «Il faudrait écorner nos animaux avant de les abattre mais ce serait un vrai traumatisme, ce n'est pas possible», indique l'éleveur. Le membre de l'Afad, l'association en faveur de l'abattage des animaux dans la dignité, est contraint de faire des kilomètres pour emmener ses bêtes vers un établissement d'abattage plus respectueux, en mesure d'assurer aux bovins un abattage avec étourdissement. Mais le transport est long et stressant pour les animaux, un système loin d'être optimum. Ce dernier défend ainsi la création d'un outil d'abattage local et respectueux, garantissant un niveau optimal de bientraitance animale adapté aux espèces locales. Mais ces solutions ont un coût. Reste à savoir si les Français sont prêts à mettre la main au portefeuille pour consommer des animaux qui ont été abattus dignement.

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