
Votre épargne peut-elle être réquisitionnée par l'État ? / iStock.com / Andrii Yalanskyi
Un droit protégé par la loi
En France, la propriété privée est protégée par la Constitution et le Code civil. L’article 17 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen de 1789 stipule que « nul ne peut en être privé, si ce n’est lorsque la nécessité publique l’exige, et sous la condition d’une juste et préalable indemnité ». L’article 544 du Code civil renforce ce principe en affirmant que la propriété permet de jouir et disposer de ses biens de manière absolue, dans le respect des lois en vigueur. Philippe Crevel, président du Cercle de l’Épargne, est catégorique : « L’épargne des ménages appartient aux ménages. L’État ne peut pas unilatéralement décider de piocher dedans ». Toute intervention nécessiterait une décision parlementaire, comme l’augmentation des taxes ou la mise en place de mesures de sûreté pour éviter des retraits massifs en période de crise, comme le permet la loi Sapin 2 de 2016.
Des outils légaux déjà existants pour récupérer des fonds
L’administration fiscale dispose déjà de dispositifs légaux pour intervenir sur les avoirs des contribuables en cas d’impayés. L’Avis à tiers détenteur (ATD) et la Saisie administrative à tiers détenteur (SATD) permettent de prélever des sommes dues directement sur les comptes bancaires, les livrets ou les contrats d’assurance-vie. Toutefois, ces procédures sont strictement encadrées et ne concernent que les cas de créances non payées, comme des impôts ou des amendes. Ces mécanismes ne peuvent être utilisés pour des besoins nationaux liés à une crise économique globale. Ils sont conçus pour répondre aux défaillances individuelles, et le contribuable dispose de recours pour contester ces saisies.
Blocage temporaire en cas de crise ?
En période d’instabilité financière, un blocage temporaire des fonds pourrait être décidé, notamment pour prévenir un effondrement du système bancaire. La loi Sapin 2 permet de suspendre temporairement les rachats de contrats d’assurance-vie dans des situations exceptionnelles. Ce blocage vise à stabiliser les marchés financiers, mais les fonds restent la propriété des épargnants et sont intégralement récupérables une fois la situation normalisée. De telles décisions relèvent du Haut Conseil de Stabilité Financière (HCSF) et de la Banque de France, des organismes indépendants du pouvoir politique. Comme l’explique Laurent Denis, avocat en droit bancaire, il est essentiel de distinguer entre un blocage des fonds et leur confiscation : « Il y a une confusion entre bloquer les fonds et s’emparer de ces fonds ».
Le scénario de la banqueroute
En cas de faillite bancaire majeure, le dispositif de « bail-in » prévu par la directive européenne BRRD de 2014 peut être activé. Ce mécanisme impose d’abord aux actionnaires et aux créanciers des banques de contribuer au redressement. Les épargnants ne seraient sollicités qu’en dernier recours, et uniquement pour les montants excédant 100 000 euros. Cependant, cette situation reste hautement improbable en France. Philippe Crevel rappelle qu’une telle mesure n’a pas été appliquée dans le pays depuis 1797, lors de la faillite des deux tiers.
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