L'investissement en bitcoin nécessite des mises au point tant sur le plan juridique que fiscal ( Crédits : tiendientu vietnam )
C’est LE terme de l’année 2017, accompagné de son acolyte blockchain : le bitcoin (et les cryptomonnaies de manière générale) fascine les Français. Les deux sont indissociables, tant dans les recherches Google que dans leur fonctionnement. Certains acteurs considèrent le bitcoin comme étant une monnaie, et la blockchain comme étant une révolution au niveau de la protection des données et la sécurité de celles-ci.
Méfiance cependant ! Il convient de rappeler que la Banque de France et l’Autorité des marchés financiers n’ont pas encore décidé du statut officiel de cette crypto-monnaie : il faut alors faire très attention avec ces notions, et rappeler que le dicton “tout investissement comporte des risques” s’applique également au bitcoin, dont le potentiel spéculatif n’est désormais plus à prouver.
Mais, c’est quoi le bitcoin ?
Le bitcoin est la plus connue des “crypto-monnaies sur le marché” : c’est une monnaie virtuelle créée de toutes pièces qui utilise, comme toutes les crypto-monnaies, la technologie de la blockchain. Celle-ci consiste en une suite de bloc qui renferme des informations. Celles-ci sont stockées, vérifiées, et sécurisées de façon transparente, et surtout sans organe de contrôle central. Le bitcoin voit le jour en 2009. Son créateur, Satoshi Nakamoto, est motivé par une idée : celle d’instaurer une modalité de paiement nouvelle, virtuelle, sans aucun contrôle étatique. C’est l’affirmation d’une pensée libertarienne, que partagent souvent les adeptes du bitcoin.
Il ne s’agit pas de la seule crypto-monnaie existante : on en dénombre plus de 4.500, comme le Litcoin, l’Etherum, le Ripple, ou encore le Metronome, nouvelle-née. Celles-ci ont été créées en vue de pallier aux quelques défauts dont souffre le bitcoin (système de vérification et d’inscription des transactions lents, mauvaise presse …).
Le bitcoin a inspiré les acteurs de l’économie numérique, en quête d’argent rapide : ces derniers créent par la suite les Initial Coin Offerings (ou ICO) : un moyen de lever des fonds via la création de tokens (jetons), échangeables par la suite contre des crypto-monnaies (donc des bitcoins) ou des monnaies étatiques.
C’est ainsi que le cours du bitcoin s’est envolé, pour atteindre, le 7 décembre 2017, la valeur de 15.000$ le bitcoin.
( Crédits : BFG Capital )
Et du côté juridique, ça donne quoi ?
Il faut savoir, tout d’abord, que l’Autorité des Marchés Financiers (AMF) et l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) recommandent la prudence en ce qui concerne l’investissement dans le bitcoin : en effet, celui-ci repose sur un marché non régulé, et ne dispose donc pas de cours officiel. Ainsi, le bitcoin n’obéit qu’aux règles de l’environnement informatique dans lequel cette “monnaie virtuelle” évolue. Par conséquent, le marché du bitcoin est volatil, et donc risqué pour des néophytes qui n’ont pas de connaissances en la matière ou qui sont mal renseignés. Le prix du bitcoin peut varier à la hausse comme à la baisse très rapidement, ce qui le rend imprévisible. En quelques mots : l’investisseur peut perdre tout ou partie de son argent !
Il convient donc de faire attention à ce niveau et de vérifier, par exemple, que l’intermédiaire en bitcoins dispose d’un agrément de prestataire de paiement délivré par l’ACPR. C’est une qualité professionnelle requise, vu que le bitcoin ne dispose pas des garanties offertes par les banques centrales, et qu’il ne protège en aucun cas l’investisseur en cas de faillite de l’intermédiaire.
Les autorités rappellent également qu’en France, seul l’euro a cours légal selon l’article L.111-1 du Code monétaire et financier : ainsi, même s’il est possible de l’accepter comme moyen de paiement, il est également possible de refuser un paiement en bitcoin. De manière globale, sur le plan juridique, le bitcoin se heurte à une absence de réglementation et d’information détaillée, ce qui fait que les institutions (AMF et ACPR) se penchent désormais sur le sujet afin de fournir un cadre légal à ce cyber-phénomène.
Puis-je être imposé sur l’acquisition de bitcoins ?
C’est également au tour de l’administration fiscale de se pencher sur le traitement fiscal réservé aux opérations afférentes au bitcoin. Les dernières instructions fiscales à ce sujet soumettent à imposition les revenus issus des transactions de bitcoin, en fonction de la régularité de celles-ci.
Ainsi, si les gains issus de l’achat-revente de bitcoins sont occasionnels, alors ils relèveront de la catégorie des bénéfices non-commerciaux (BNC). En revanche, si ces gains sont issus d’une activité habituelle, ils relèveront de la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux (BIC).
En ce qui concerne le sort de la TVA, est exonérée toute opération de change de bitcoins contre des devises traditionnelles, selon une décision de la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE, 22/10/2015, Aff. 264/14), et ce même si la Cour a admis que les opérations réalisées dans le cadre de l’activité d’échange d’une monnaie virtuelle en une devise légale sont des prestations de services effectuées à titre onéreux, qui entrent donc dans le champ de la TVA. Il faut donc bien vérifier que les opérations réalisées entrent dans le champ de la TVA, puis de voir si elles n’entrent pas dans le cadre des exonérations prévues par la directive européenne n°2006/112/CE.
Que retenir de tout cela ?
Au final, le but du bitcoin était d’échapper au contrôle des états, et par extension, des juridictions et administrations fiscales desdits états. Un eldorado de liberté financière désormais compromis car les institutions judiciaires, administratives et fiscales se penchent sérieusement sur la question. L’ACPR refuse même l’appellation de crypto-monnaie pour le bitcoin, lui préférant le terme de “cryptoactif”. Cela démontre la volonté de ne pas associer au terme de monnaie le bitcoin.
Le traitement fiscal de celui-ci est donc sommaire, en attendant une reconnaissance juridique et fiscale officielle prochaine du bitcoin comme catégorie de monnaie. Ce n’est pas gagné, vu la rigidité de l’administration fiscale et la lenteur législative à ce sujet.
Ceci dit, le porte-parole du gouvernement, M. Benjamin Griveaux, a déclaré le 10 janvier dernier la possibilité de soumettre les crypto-monnaies à la flat-tax, car il s’agirait de revenus financiers. Ceci constituerait une véritable avancée fiscale en la matière. Affaire à suivre …
(Achevé de rédiger le 6 mars 2018)
Amine Mostefaï Chargé des Affaires Juridiques chez BFG Capital
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